IDS252 - La gestion du vieillissement du parc de dispositifs médicaux en milieu hospitalier
DOI mémoire
https://doi.org/10.34746/ids252Catégories
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Auteurs
Sarah
Alaeddine
Laurent
Estelle
Contacts
- AIT KHOUYA AISSA Sifeddine : aitkhouyaaissasifeddine1@gmail.com
- ARBAOUI Sarah : sarah.arbaoui0802@gmail.com
- BOUTUIL Alaeddine : alaeddine.boutuil@outlook.com
- LATROUITE Laurent : l.latrouite@gmail.com
- LAWSON Estelle : lawson.estelle5@gmail.com
Citation
A rappeler pour tout usage : AIT KHOUYA AISSA Sifeddine, ARBAOUI Sarah, BOUTUIL Alaeddine, LATROUITE Laurent, LAWSON Estelle, « La gestion du vieillissement du parc de dispositifs médicaux en milieu hospitalier », Université de Technologie de Compiègne (France), Master Ingénierie de la Santé, Parcours Technologies Biomédicales et Territoires de Santé (TBTS), Mémoire de Projet, réf n° IDS252, https://travaux.master.utc.fr/, DOI : https://doi.org/10.34746/ids252, janvier 2025, https://travaux.master.utc.fr/formations-master/ingenierie-de-la-sante/ids252
Résumé
Ce mémoire traite de la gestion et le renouvellement des dispositifs médicaux dans les établissements de santé en France, en mettant en évidence les défis financiers auxquels ils font face. Selon le décret 2001-1154, les hôpitaux doivent garantir la maintenance et le contrôle qualité de leurs équipements médicaux. Mais, avec des budgets limités, les hôpitaux ont du mal à renouveler comme ils le souhaiteraient leur parc d'équipements, d'autant plus que le prix des dispositifs médicaux augmente en raison de la hausse des matières premières, des coûts de transport et des difficultés d’approvisionnement. Cela entraîne une vétusté croissante des équipements pouvant altérer leur performance et donc la qualité des soins. La gestion efficiente des équipements médicaux est donc un enjeu crucial pour assurer la sécurité des patients et optimiser les coûts de maintenance. Un renouvellement efficace des équipements permettrait non seulement de respecter les normes de sécurité, mais aussi de réaliser des économies tout en restant à la pointe des technologies et d'améliorer les soins. Cette approche inclut des recherches bibliographiques, des entretiens avec des professionnels du secteur, ainsi qu’un questionnaire destiné aux ingénieurs biomédicaux, français et belges, pour recueillir des retours d'expérience. L’objectif est d’élaborer un outil d’aide à la décision pour faciliter les choix de renouvellement d’équipements dans les hôpitaux.
Abstract
This thesis deals with the management and renewal of medical devices in healthcare institutions, highlighting the financial challenges they face. According to Decree 2001-1154, hospitals must guarantee the maintenance and quality control of their medical equipment. However, with limited budgets, hospitals are struggling to renew their equipment fleet as they would like, especially since the price of medical devices is increasing due to the rise in raw materials, transport costs and supply difficulties. This leads to increasing obsolescence of equipment that can affect its performance and therefore the quality of care. The efficient management of medical equipment is therefore a crucial issue to ensure patient safety and optimize maintenance costs. An efficient renewal of equipment would not only make it possible to comply with safety standards, but also to save money while remaining at the cutting edge of technology and improving care. This approach includes bibliographic research, interviews with professionals in the sector, as well as a questionnaire intended for French and Belgian biomedical engineers to collect feedback. The objective is to develop a decision-making tool to facilitate the choice of equipment renewal in hospitals.
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Mémoire Complet
La gestion du vieillissement du parc de
dispositifs médicaux en milieu hospitalier
Introduction
La gestion des dispositifs médicaux est un enjeu important pour les établissements de santé. Les hôpitaux ont l’obligation d’assurer la maintenance et le contrôle qualité de leurs équipements tout en gardant un registre des opérations effectuées. Ces activités constituent la gestion du parc de dispositifs médicaux. Cependant, de nombreux défis compliquent cette gestion. Les équipements deviennent de plus en plus vétustes, les prix augmentent, et les budgets des hôpitaux diminuent.
Ce mémoire a pour but d’exposer des solutions innovantes pour aider les services biomédicaux à mieux gérer le vieillissement de leurs équipements sous forme d’un outil de calcul sous Excel. Il s’appuie sur des recherches et des retours d’expérience pour proposer des idées pratiques adaptées aux contraintes actuelles des établissements de santé.
1. État des lieux et contraintes des services biomédicaux
1.1. Obligation de maintenance du parc
Le décret 2001-1154 relatif à l'obligation de maintenance et au contrôle de qualité des dispositifs médicaux prévus à l'article L. 5212-1 du code de la santé publique oblige les établissements de santé à mettre en place “une organisation destinée à s’assurer de l'exécution de la maintenance et du contrôle de qualité interne ou externe des dispositifs”. Ils ont aussi l’obligation de conserver un registre où sont répertoriées les opérations de maintenance et de contrôle qualité qui ont été menées pour chaque dispositif [1
].
De ce fait, le service chargé de la gestion de ces dispositifs médicaux se doit d’assurer la maintenance de ces derniers mais aussi de renouveler ses équipements dès lors qu’ils ne sont plus fonctionnels ou qu’ils présentent un risque pour les patients. Le renouvellement peut aussi être lié à un besoin d'acquérir de nouvelles technologies plus performantes et plus attrayantes pour les soignants pour améliorer la qualité des soins.
Néanmoins, les hôpitaux ne sont pas en mesure de fournir les fonds suffisants pour se permettre de renouveler le parc ou certains équipements aussi souvent qu’ils le souhaiteraient.
La baisse des budgets de la fonction publique et l'augmentation du prix des dispositifs médicaux obligent les SBM (Services Biomédicaux) à optimiser la gestion de leur parc. Selon la Cour des comptes, les hôpitaux publics faisaient déjà face à une situation financière difficile avant la crise sanitaire, avec des dettes importantes et un manque d'investissements dans leurs infrastructures et équipements [2].
1.2. Hausse des prix des dispositifs médicaux
Les prix sur le marché des dispositifs médicaux connaissent une forte hausse. Selon le SNITEM (Syndicat National de l'Industrie des Technologies Médicales), cette augmentation des prix est principalement explicable par la hausse du prix des matières premières (zinc, aluminium, cuivre…), par la hausse des coûts de transport ainsi que par les difficultés d’approvisionnement. Les entreprises du secteur des dispositifs médicaux sont particulièrement touchées par ces augmentations. Ainsi la combinaison de ces facteurs a entraîné une flambée des coûts de production, affectant directement le prix des dispositifs médicaux [3].
Ceci rend difficile l’accès pour les hôpitaux d’acquérir de nouveaux dispositifs médicaux innovants.
1.3. Hausse des prix des dispositifs médicaux
Il existe donc une difficulté financière des hôpitaux publics qui a pu être étudiée. Cette tendance a pu être explicitée dans les dossiers de la DREES (Direction de la Recherche, des Études, de l'Évaluation et des Statistiques) sur la situation économique et financière des établissements de santé en 2020. Cela est illustré par la courbe bleue (investissements équipements) contenue dans le graphique ci-dessous (figure 1)[4].
Figure 1 : Effort d’investissement des hôpitaux public entre 2005 et 2021 par type d’investissement [4] .
Cette observation nous amène à conclure que les hôpitaux investissent de moins en moins dans leurs infrastructures et équipements. En conséquence, le vieillissement du parc hospitalier s’accentue, comme le démontre la courbe du taux de vétusté des équipements présentée dans le graphique ci-dessous (figure 2).
Figure 2 :Taux de vétusté des équipements et construction de 2005 à 2021 [4].
En alliant les observations précédentes, nous pouvons déduire qu’aujourd’hui, les hôpitaux font face à une baisse de budget dans un contexte où le prix des dispositifs médicaux a augmenté. Cela crée une tension sur le service biomédical, principal responsable de la gestion du parc de dispositifs médicaux au sein des établissements de santé.
La nécessité de trouver un moyen de faire face à ces problématiques est primordiale. Une meilleure gestion du vieillissement et des budgets permettraient de gommer les effets de ces contraintes.
1.4. Importance de la gestion du parc d’équipements dans les activités d’un établissement de santé
Le sujet est au cœur des préoccupations des ingénieurs biomédicaux. La gestion des équipements biomédicaux joue un rôle majeur dans l’amélioration de la qualité des soins fournis aux patients. En effet, une maintenance inadéquate ou une utilisation prolongée d’un équipement en fin de vie peut entraîner des conséquences délétères voire mortelles auprès du patient. Aussi, la conformité réglementaire n’est plus respectée dès lors que les dispositifs médicaux perdent en sécurité et performance.
Cette gestion permet également de faire réaliser des économies d'échelle sur les coûts de la maintenance. En effet des équipements vieillissants génèrent des coûts de maintenance supplémentaires, Ces économies pourraient ainsi libérer du budget pour répondre à d’autres besoins de l’hôpital.
Finalement, une gestion optimale permettrait d’acquérir de nouveaux équipements et d’être ainsi à la pointe de la technologie, améliorant la qualité des soins, le confort, et la satisfaction du personnel médical et des patients.
C’est dans cette optique qu’une question telle que : « Quelles stratégies innovantes les services biomédicaux hospitaliers peuvent-ils adopter pour optimiser la gestion du vieillissement du parc de dispositifs médicaux ? » s’impose. Les travaux présentés dans ce mémoire visent à apporter des réponses ou des axes de réflexion à ce questionnement.
1.5. Objectif et méthodologie des travaux entrepris
Afin de mener à bien ce projet, il a été entrepris, en premier lieu, des recherches bibliographiques sur les pratiques mises en place, accompagnées d'entretiens avec des professionnels du domaine (ingénieurs et techniciens biomédicaux). En second lieu, un questionnaire destiné aux ingénieurs et techniciens biomédicaux a été diffusé afin de récolter les retours d'expériences du plus grand nombre. L’objectif final est d’élaborer un outil d’aide à la décision pour les ingénieurs biomédicaux lors des décisions de renouvellement.
La récolte de données via des entretiens avec des ingénieurs biomédicaux français est primordiale. Il a également été jugé intéressant de questionner des ingénieurs biomédicaux belges afin d’en extraire des idées pouvant être applicables à notre système de santé. Cela permettra d’avoir une vue d’ensemble sur les stratégies mises en place ainsi que sur les outils exploités.
Le but principal est d’identifier et d’exploiter au mieux les mesures et indicateurs potentiellement mis en place au sein des services biomédicaux, afin de les améliorer et, dans une plus grande mesure, de les intégrer dans un outil pour en maximiser le potentiel.
2. La place du vieillissement dans la gestion du parc des dispositifs médicaux
2.1. Gestion selon le cycle de vie des dispositifs médicaux
Les services biomédicaux jouent un rôle essentiel dans la gestion du cycle de vie des équipements médicaux, assurant leur bon fonctionnement, leur sécurité, et leur conformité aux normes réglementaires en vigueur [5].
La continuité de ce développement concernant le cycle de vie ne sera détaillée qu’uniquement du point de vue de l’exploitation des dispositifs médicaux en établissement de santé.
Le cycle de vie d’un dispositif médical est constitué de 5 grandes étapes principales : l’introduction, la mise en service, l’utilisation, la maintenance et la réforme, explicitées ci-dessous (figure 3). Chaque étape requiert des missions spécifiques pour garantir la performance et la durabilité des dispositifs médicaux.
Figure 3 : Schéma du cycle d’exploitation du DM du point de vue du SBM. (Source : auteurs)
2.1.1. Introduction et mise en service d'un dispositif médical
Lors de l’acquisition d’un nouvel équipement, le service biomédical intervient activement en amont de la phase d'introduction. En effet, ses missions incluent la participation à la définition des besoins en collaboration avec les utilisateurs et l’analyse des offres techniques et financières des fournisseurs [6].
Une fois l’équipement livré, le service assure le contrôle qualité initial, vérifie la conformité aux spécifications contractuelles et procède aux tests de réception pour s’assurer que l’équipement est fonctionnel et sûr. Ensuite, il organise l’installation, la calibration initiale et le paramétrage en fonction des besoins cliniques. Par ailleurs, le SBM organise des formations du personnel soignant afin de garantir une utilisation optimale, sécurisée et donc un allongement de la durée de vie de l’équipement [7].
2.1.2. Exploitation et maintenance d'un parc de dispositifs médicaux
La phase d’utilisation est au cœur du cycle de vie, où le service biomédical veille à la disponibilité et à la sécurité des équipements médicaux afin que les utilisateurs et les patients soient satisfaits du service rendu [8]. Par conséquent, le SBM va être chargé de planifier des maintenances préventives et/ou correctives [9]. En effet, la prise en charge des patients ne doit pas être impactée par une panne, une casse ou tout autre dysfonctionnement de l’équipement. Ces risques liés à l’utilisation des dispositifs médicaux sont à prendre en compte pour une meilleure gestion du parc.
Les maintenances préventives sont exécutées selon une fréquence déterminée par le fabricant, notifiée dans la documentation technique, délivrée avec l’équipement. Celles-ci peuvent varier en fonction de la criticité et de la fréquence d’utilisation du dispositif médical. Le dispositif est alors mis à disposition du SBM, la maintenance préventive est réalisée soit en interne, par les techniciens du service, soit en externe par des structures de tierce. Cette décision est propre à chaque établissement, selon plusieurs critères comme la politique et l’intérêt de l’hôpital, le coût de la maintenance, les compétences et la disponibilité du personnel technique, l’accès aux équipements de contrôle, de mesure et d’essai (ECME), etc...[10]. Enfin, les opérations de maintenance doivent être enregistrées et documentées dans un logiciel de GMAO pour assurer une traçabilité. Cela permet de prévoir la prochaine maintenance et d’informer sur l’état général du dispositif médical.
Durant la maintenance, certains tests vont être effectués afin de vérifier les fonctionnalités de l’équipement. Si le test ne répond pas aux exigences générales en termes de performances et de sécurité, une maintenance corrective doit avoir lieu. Le défaut de l’équipement sera identifié et réparé. Tout comme la maintenance préventive, la maintenance corrective peut être effectuée en interne ou par une tierce maintenance et l’intervention est documentée.
Par conséquent, la maintenance préventive est considérée comme un moyen qui permet de rallonger la durée de vie du dispositif médical, donc du parc, et de réduire le taux de panne durant leur utilisation. La maintenance constitue ainsi une stratégie essentielle pour garantir la qualité, la sécurité et la pérennité des services médicaux [11]. En l’absence de l’obtention de cette garantie, l’équipement entre dans sa phase de fin de vie. Dans le cas où le dispositif médical ne peut être réparé, il sera réformé ou mis au rebut.
2.1.3. Fin de vie d'un dispositif médical
La fin de vie est un processus qui concerne également le rôle du SBM. Elle est définie comme “l’étape de la vie d'un produit où celui-ci ne peut plus être utilisé ou cesse de fonctionner sans possibilité d'être réparé” [12].
Celui-ci dispose de plusieurs indicateurs qui lui permettent de juger si un dispositif doit être réformé, réutilisé ou réparé. Si l’appareil est obsolète ou non fonctionnel, le service planifie son retrait, en veillant à respecter les réglementations en matière de gestion des déchets dangereux.
Dans certains cas, l’équipement peut être donné à des organismes caritatifs ou transféré dans des structures où les besoins sont moindres. Enfin, le service assure une traçabilité complète du processus de déclassement, incluant la désactivation des données patients pour les dispositifs électroniques, garantissant ainsi la confidentialité et la sécurité des informations [7].
Une fois le cycle de vie des équipements médicaux explicité, il sera possible de mieux comprendre les composantes spécifiques de la gestion du parc qui assure son bon fonctionnement et sa pérennité.
2.2. Composantes clé dans la gestion du parc d'équipements biomédicaux
La fédération de l’hospitalisation privée définie l’activité médicale ou l’activité de médecine comme “la prise en charge polyvalente ou spécialisée, à visée diagnostique, thérapeutique ou palliative, des patients dont l’état de santé nécessite des soins ou une surveillance de nature médicale, en hospitalisation à temps complet ou partiel [13].” Cette activité médicale, réalisée par le personnel soignant, est possible grâce à la mise à disposition d’équipements médicaux fonctionnels. Cette responsabilité incombe à l'ingénieur biomédical, qui se doit de veiller à garder un parc de dispositifs médicaux conforme et performant. Afin de remplir cette mission, l’ingénieur biomédical met en place une stratégie de gestion de ce parc qui permettra de conjuguer performance, budget, satisfaction du personnel soignant et spécificité de son centre hospitalier (EHPAD, CLCC, CHU…). Cette stratégie de gestion du parc de dispositifs médicaux comporte plusieurs entrées et plusieurs sorties mais aussi des demandes et des concepts à prendre en compte, comme l’illustre le schéma juste dessous.
Dans le schéma ci-dessous (figure 4), réalisé suite à nos échanges avec l'ingénieur biomédical du CHI de Compiègne-Noyon, on peut visualiser les différentes entrées et sorties qui composent la gestion globale d’un parc de dispositifs médicaux en milieu hospitalier. Comme évoqué plus haut, on rappelle que la gestion est au service de l’activité médicale.
Figure 4 : Schéma de la gestion du parc de DM. (Source : auteurs)
En entrée, il y a les investissements qui correspondent à des achats pour une expansion du parc, par exemple.
En sortie, il y a les réformes qui sont des dispositifs médicaux qu’on pourra soit revendre à des professionnels dédiés (dit brokers) [14] (revalorisation du DM), ou qu'on stockera dans le “plan blanc” (correspond aux stratégies mises en place afin de faire face à des crises) [15].
En termes de cycles, les prêts sont les dispositifs médicaux qui sortent et rentrent dans le parc selon les besoins des hôpitaux partenaires, dans le cas des GHT par exemple, mais aussi les prêts fait par les fournisseurs lorsqu’un établissement envoie un DM pour réparation et qu’un autre DM de remplacement est nécessaire (cela dépend des contrats et de la volonté du fabricant). Des prêts sont aussi possibles lorsqu’un établissement acquiert un équipement mais que le temps de livraison est considéré comme long. Dans ce cas là, les fabricants peuvent prêter un équipement d’une gamme inférieur (la plupart du temps) afin de permettre de faire perdurer l’activité des soins le temps de l’arrivée de l’équipement acheté. En terme de remplacement, il existe d’une part les équipements irréparables qui doivent être remplacés de façon plus ou moins urgente selon la criticité du dispositif. D’autre part, il y a les équipements vieillissants qui sont potentiellement toujours fonctionnels mais pour lesquels il serait judicieux d’étudier la nécessité ou non d’un remplacement. Ensuite, il y a les équipements qui subissent une obsolescence (principalement induite par les avancées technologiques). Ces équipements irréparables, vieux ou obsolètes sortent du parc et sont remplacés par des dispositifs médicaux neufs. Enfin, il y a les équipements en pannes qui sortent du parc afin d'être dépannée puis reviennent dans le parc.
Des concepts comme le développement durable sont des enjeux à prendre en compte à la vue de la situation écologique actuelle. Également, les avis utilisateurs correspondant à la définition des besoins des utilisateurs (ici, le personnel soignant) doivent être pris en compte afin de pérenniser l’activité médicale et la satisfaction du personnel.
Le parc de dispositifs médicaux d’un établissement de santé est donc sujet à des changements rythmés par les casses, les pannes, les avancées technologiques mais aussi les exigences du personnel soignant.
L’ingénieur biomédical fait donc face à des situations qui nécessite une réflexion en amont car, rappelons le, le budget est une composante qui limite le champ d’action de ce dernier. La hausse du prix des dispositifs médicaux et les budgets accordés qui diminuent en sont les causes principales. D’autres causes peuvent entrer en compte dans cette gestion, en voici certains exemples :
- L’évolution du forfait technique correspondant à une diminution du remboursement d’un acte en imagerie par exemple ;
- Le rapport entre le prix d’un équipement et celui de ses consommables. Acheter un équipement relativement peu cher mais qui nécessite l’achat fréquent de consommables au prix élevé peut représenter une erreur de gestion du budget ;
- La fin de support technique de l’appareil, qui correspond à l'arrêt du support technique de l’appareil par le fournisseur, donc à l'arrêt des activités de maintenance sur cet appareil. L’appareil reste cependant fonctionnel [16];
- La fin de commercialisation de l’appareil, qui correspond au moment où le fabricant ne produit plus l’équipement, donc les consommables ;
- La fin de production des pièces détachées qui “condamne” le produit à ne plus être fonctionnel si une panne arrive car on ne sera plus en mesure de réparer l’appareil ;
- La fin de vie est “l’étape de la vie d'un produit où celui-ci ne peut plus être utilisé ou cesse de fonctionner sans possibilité d'être réparé” [12], qui nécessite un rachat plus ou moins rapide en fonction de la criticité de cet équipement.
La gestion du parc de dispositifs médicaux est donc une équation complexe faisant intervenir plusieurs inconnues.
Ici, l’objectif est de se pencher sur la gestion du vieillissement qui est un concept assez complexe car, elle se définit différemment selon l’interlocuteur, et englobe plusieurs notions différentes.
2.3. Vieillissement et vétusté des dispositifs médicaux au sein du parc
Le vieillissement des dispositifs médicaux d’un établissement de santé est un indicateur qui nous informe sur la santé des équipements et sur leur durabilité. Cela permet d’anticiper les renouvellements afin de mieux gérer le budget, principale préoccupation d’un ingénieur biomédical lors de l’élaboration du plan pluriannuel d'équipements (PPE) pour les années à venir. Il est important de rappeler qu’une connaissance la plus fine possible de l’avenir des équipements du parc permet d'être plus libre afin de réaliser de nouveaux projets car la planification devient plus fiable. Une panne n’est pas inévitable mais un bon contrôle du parc permet de ne pas être pris au dépourvu et permet une réflexion en amont des dépenses. Cependant, il est important de préciser que le vieillissement est un concept difficile à évaluer dans sa globalité.
Selon le dictionnaire Le Robert, le vieillissement est défini par “le fait de devenir vieux, ou de s'affaiblir par l'effet de l'âge”. Le vieillissement, selon cette définition, n’est que l’évaluation du temps qui passe. Il est important de notifier que ce terme à une résonance humaine et sert à caractériser le vivant.
Un autre concept est à définir : la vétusté. Selon le dictionnaire Larousse, la vétusté est un état de détérioration produit par le temps. Il implique donc une certaine notion d’usure qui est légèrement différente du vieillissement. Ainsi le terme correct à utiliser lorsqu’on caractérise un équipement est “vétuste”.
Cependant, dans l’explication globale du phénomène, le terme “vieillissement” est le plus couramment utilisé.
Si on applique cette définition aux dispositifs médicaux composant le parc, on peut considérer qu’un DM vieillissant est âgé de 10 ans ou plus. Cependant, il existe des DM “vieux” (selon cette définition) qui sont toujours fonctionnels mais également performants et d'autres “jeunes” qui ne le sont plus. Il existe donc une nuance dans cette notion de vieillesse des équipements biomédicaux.
Figure 5 : Schéma de la compositions du vieillissement du parc de dispositifs médicaux. (Source : auteurs)
Le vieillissement du parc de dispositifs médicaux inclut différentes notions regroupées dans le graphique ci-dessus (figure 5).
- L'âge est un facteur à prendre en compte mais n’est pas le seul facteur déterminant le niveau de vieillesse d’un DM. Les fabricants sont soumis au Règlement européen et fournissent “toute information sur la durée de vie prévue du dispositif et le suivi éventuellement nécessaire” [17]. Le dispositif possède donc une date de fin de durée de vie où il sera considéré comme vieux, cependant, dans certains cas, cette durée de vie ne constitue pas une garantie de vérité.
- Le nombre de pannes est un facteur qui va devenir important dans la décision d’un remplacement car elles entravent la bonne prise en charge d’un patient car leur temps d’indisponibilité augmente. Ce temps est la “période pendant laquelle un dispositif n'est pas en état d'accomplir sa fonction requise” [18]. Ce nombre de pannes peut aussi indiquer que l’appareil arrive à un stade de dysfonctionnement (réparable ou non).
- La perte de performance sera un facteur qui justifiera le remplacement d’un équipement car dans certains cas, il met en péril la vie du patient. Un moniteur qui n’est plus aussi précis dans ses prises de valeurs pourrait fausser les choix des médecins car l’information qu’il apporte n’est pas fiable. Dans d’autre cas, il se peut que la perte de performance puisse devenir un obstacle au bon travail du personnel soignant. Dans l'exemple d’une machine d’imagerie qui fournirait une image de mauvaise qualité, le soignant ne serait pas en mesure d'émettre un diagnostic et cela l'obligerait à refaire l’examen.
- L’obsolescence est définie par le dictionnaire Larousse comme la “dépréciation d'un matériel ou d'un équipement avant son usure matérielle”. Cependant, ici on parle d'obsolescence technologique et elle se défini selon plusieurs axes :
- Une perte des performances, causée par le vieillissement du dispositif médical (ici on parle de la dégradation causée par le temps et l’utilisation), qui l'empêche de remplir sa fonction de base ;
- L’évolution des techniques médicales qui rend la technologie utilisée par l’appareil arriérée ;
- Une avancée technologique qui permet de ne plus encourir autant de risques qu’avec celle utilisée dans ce DM ;
- Une évolution de la réglementation qui rend le dispositif médical non conforme.
- La fin de support quant à elle correspond à l'arrêt des services de support technique délivré par le fabricant et va donc privé l’équipement des maintenance et de toutes les nouvelles mises à jour. L’équipement peut rester fonctionnel mais continuer de l’utiliser peut comporter des risques. Le manque de mises à jour peut mettre en péril l’établissement d’un point du vue de la cybersécurité.
- La fin de vie, comme défini plus haut, est le moment où l’équipement est arrivé à un stade de non réparabilité.
Toutes ces composantes constituent le vieillissement des équipements du parc d’un établissement de santé. Il est essentiel d’en comprendre la subtilité afin de pouvoir agir dans le but d’optimiser la gestion du vieillissement.
Il est également essentiel de considérer la réalité du terrain pour adopter une approche du vieillissement plus concrète. C'est dans cette optique qu'un questionnaire a été élaboré.
3. Questionnaire pour le retour d’expérience
Sur base des différentes notions relatives à la définition du vieillissement des dispositifs, un questionnaire a été élaboré afin de recueillir des informations, d'une part, sur les divers points de vue existants concernant le vieillissement d’un équipement, et d'autre part, sur les stratégies de renouvellement mises en place au sein de ces différentes structures.
Le questionnaire a été envoyé en novembre 2024 à 45 professionnels, comprenant des directeurs, des ingénieurs et des techniciens biomédicaux d’établissements de santé . Ce ciblage garantit une diversité de points de vue et renforce la validité externe de l’étude.
Différentes sections ont permis de recueillir des données sur les répondants, notamment leur fonction, le type d'établissement, la taille en nombre de lits, et la zone géographique. Ces informations permettent de caractériser les environnements professionnels et d'identifier les disparités territoriales.
Il comprend notamment une section sous forme de QCM, conçue pour caractériser les dispositifs médicaux en fonction des indicateurs pertinents identifiés à partir de la littérature citée plus haut (point 2.3).
Enfin, une partie s’est intéressée aux pratiques de gestion du vieillissement du parc suivie d'un volet contenant les améliorations proposées par nos répondants.
3.1. Résultats de l'enquête mené
Le questionnaire a recueilli les réponses de 31 personnes issues des services biomédicaux. Cette population est composée pour les deux tiers des ingénieurs biomédicaux et le tiers restant par des techniciens. La majorité d’entre eux travaillent dans des centres hospitaliers de plus de 800 lits pour lesquels le parc de dispositifs médicaux est très important.
3.1.1. Principaux défis dans la gestion
L’analyse des réponses concernant les principaux défis dans la gestion de la maintenance des dispositifs médicaux nous montre une prédominance de problèmes d'ordre organisationnel et logistique avec des besoins en ressources financières, matériels et humains, comme visible sur le graphique ci-dessous (figure 6).
Figure 6 : Les principaux défis dans la gestion de la maintenance des dispositifs médicaux en fin de vie. (Source : auteurs)
Cette répartition peut également s’expliquer par une implication inadaptée de la direction, qui ne répond pas pleinement aux attentes et aux besoins spécifiques des services biomédicaux concernés. Un manque de coordination, de compréhension des enjeux techniques ou de priorisation des investissements nécessaires peut engendrer des dysfonctionnements, limitant ainsi la capacité des services biomédicaux à assurer une gestion optimale des dispositifs médicaux.
3.1.2. Définition du vieillissement d’un dispositif médical
Compte tenu de ces premiers résultats, il semblait très important d'interroger les répondants sur leur propre définition du vieillissement, car, comme mentionné précédemment, cette notion varie en fonction de la perception de chacun. Les résultats sont présentés dans le graphique ci-dessous (figure 7).
Figure 7 : Définition du vieillissement d’un dispositif médical selon les répondants. (Source : auteurs)
La définition du vieillissement d'un dispositif est très variable suivant les interviewés avec des résultats assez homogènes entre le End of support des fabricants, l'âge du dispositif, ou encore une technologie devenue obsolète. Ces différentes perceptions, représentées de manière équitable, illustrent à quel point aborder cette problématique est plus complexe qu’il n’y paraît. Le vieillissement apparaît comme un concept multifactoriel, difficile à définir et à gérer.
3.1.3. Le critère le plus important dans la décision d’un remplacement
Ensuite, il leur à été demandé de choisir le critère le plus important dans une décision de remplacement. Cette question permettra ainsi de savoir si leur définition du vieillissement est en accord avec leur prise de décision.
Figure 8 : Le critère le plus important dans la décision d’un remplacement d’après les répondants. (Source : auteurs)
Les critères pour la prise de décision de remplacement par les services biomédicaux montre que ce n’est envisagé que lorsque le fabricant ne propose plus de support technique ni de pièces détachées. Dans une moindre mesure la récurrence des pannes et la fréquence d'apparition de celles-ci restent un critère important dans la prise de décision d’un remplacement. Cela nous montre très clairement que les services biomédicaux cherchent à exploiter le plus possible leurs équipements avant d'engager des démarches de remplacement.
Figure 9 : Indicateurs utilisés dans le suivi du vieillissement des dispositifs médicaux. (Source : auteurs)
Ce graphique met en évidence l’ordre de priorité des cinq indicateurs les plus couramment utilisés pour évaluer le vieillissement du parc d’équipements : l’âge, le coût des réparations, le taux de panne, le temps moyen entre les pannes et le temps d’indisponibilité de l’appareil.
Il apparaît que l’âge du dispositif est le premier indicateur utilisé pour évaluer le vieillissement. Viennent ensuite le coût des réparations et le taux de panne, qui obtiennent des scores de priorisation équivalents. Le temps moyen entre chaque panne suit en troisième position, tandis que le temps d’indisponibilité, bien qu’en dernier, reste un indicateur systématiquement suivi.
Figure 10 : Age moyen de renouvellement des DM selon leur type. (Source : auteurs)
L’analyse de l’âge des dispositifs médicaux en fonction de leur type révèle des temps de renouvellement variés. Pour les pompes à perfusion, le renouvellement intervient généralement au-delà de 10 ans d’utilisation. Tandis que les dispositifs de monitorage sont remplacés plus rapidement, une tendance encore plus marquée pour les appareils de ventilation. Ces différences s’expliquent par la criticité des dispositifs et leur nombre au sein de la structure.
En ce qui concerne les équipements d’imagerie, leur rythme de remplacement est notablement plus rapide, en grande partie en raison de la diminution progressive du forfait technique. Ce forfait constitue une compensation financière versée par la sécurité sociale pour couvrir les coûts d’utilisation des équipements médicaux, tout en incluant une part destinée à leur acquisition ou à leur renouvellement. Cependant, ce montant remboursé diminue au fil du temps (au bout de 7 ans en général), ce qui incite les établissements de santé à remplacer les équipements anciens par des modèles plus récents. Ceci vise à garantir un parc d’équipements à la pointe de la technologie, contribuant ainsi à l’amélioration continue de la qualité des soins.
4. Recommandations et indicateurs pour évaluer le vieillissement de son parc de dispositif médicaux
Dans la littérature, il est possible de retrouver un grand nombre de bonnes pratiques et d’indicateurs disponibles. Cependant, il est important de choisir les indicateurs les plus pertinents pour la problématique rencontrée. C’est donc grâce à la littérature mais aussi à des entretiens pratiqués qu’il a été extrait des indicateurs et des bonnes pratiques qui semblent être pertinents dans la gestion du vieillissement.
4.1. Bonne pratique dans l’évaluation du parc à l’aide de la notion de criticité
Dans un hôpital, le parc d’équipements peut se subdiviser en plusieurs sous-parcs, chacun regroupant un type spécifique de matériel. On peut distinguer un parc global composé d’un sous-parc de pompes à perfusion, d’un sous-parc de respirateurs et d’un sous-parc d’échographes par exemple. Chaque sous-parc se caractérise par des éléments propres, tels que le coût global d’acquisition, les coûts cumulatifs liés à la maintenance, la fréquence d’utilisation des équipements, ainsi qu’un niveau de criticité associé à leur usage dans les soins aux patients.
La notion de criticité d’un dispositif médical est essentielle à prendre en compte pour décider de la priorité dans le renouvellement des équipements et ainsi optimiser la gestion du vieillissement. Par exemple, un parc de tensiomètres présente un risque moindre en cas de panne pour la survie du patient comparé à un parc de respirateurs, dont le bon fonctionnement est crucial pour la survie des patients. Il est donc nécessaire de tenir compte de cette criticité du parc. Plusieurs normes définissent précisément cette notion, qui sont à intégrer dans la priorisation des achats [source : auteurs].
Pour établir une priorisation dans les achats d’équipements médicaux, on peut s’appuyer sur des méthodologies décrites dans :
- les normes internationales ISO 14971 (Application de la gestion des risques aux dispositifs médicaux), ISO 31010 (Gestion du risque - Techniques d'appréciation du risque);
- les normes européennes EN 60812 (Analyse des modes de défaillance et de leurs effets);
- les normes nationales NF S99-170 (Système de management de la qualité pour la maintenance et la gestion des risques associés à l’exploitation des dispositifs médicaux) et NF S99-172 (Gestion des risques liés à l’exploitation des dispositifs médicaux dans les établissements de santé).
Il est important de détailler la norme européenne EN 60812 qui définit la criticité d’une défaillance en combinant la gravité de ses effets et sa fréquence d’occurrence, ainsi que d’autres paramètres indiquant la nécessité d’une intervention.
Ainsi, les méthodes d’analyse des risques s’appuient souvent sur des données subjectives (gravité) et quantitatives (probabilité). Parmi les nombreuses méthodes de la norme ISO 31010, AMDEC (Analyse des Modes de Défaillance, de leurs Effets et de leur Criticité) et PIEU (Panne, Importante, Etat, Utilisation) sont les plus fréquemment utilisées par les services biomédicaux en raison de leur simplicité et de leur capacité d’adaptation à différents contextes.
A titre d’exemple, dans la méthode PIEU, chaque critère est évalué sur une échelle, généralement de 0.1 à 3, et la criticité est calculée en multipliant les valeurs des quatre critères :
Criticité PIEU = Panne x Importance x Etat x Utilisation [19]
En parallèle, L'AMDEC repose généralement sur une évaluation semi-quantitative où la criticité est calculée par un indice :
Criticité = Sévérité x Probabilité d’Occurrence [20]
Ces méthodes permettent d’évaluer la criticité en multipliant des critères techniques et d’usage. Cependant, elles restent limitées dans leur applicabilité à large échelle en raison de l'hétérogénéité des échelles de mesure et des critères adoptés. Ceci peut créer un manque de compréhension entre les établissements de santé de par ce langage différent.
Pour pallier ce manque d’uniformité, la norme française NF S99-170 recommande l’utilisation d’un taux de criticité normé (Tc) dont le but est de standardiser la criticité sur une échelle de 0 % à 100 %. Cette approche permet d’harmoniser les évaluations de criticité, quelle que soit la méthode ou les critères utilisés, facilitant ainsi la prise de décisions dans la gestion des risques liés aux dispositifs médicaux [21].
Pour prioriser les achats, il est alors intéressant d’exploiter ces méthodes normées, en fonction de leur pertinence et des besoins spécifiques de l’établissement de santé, afin de déterminer quels parcs d’équipements au sein de l’hôpital nécessitent une priorité budgétaire.
4.2. Indicateurs guidant l’évaluation du vieillissement du parc
4.2.1. Amortissement comptable
Pour définir la notion de « vieillesse » pour un dispositif médical au sein d’un établissement de santé, une approche simple et mesurable consiste à considérer un dispositif comme « vieux » lorsqu’il est utilisé au-delà de la durée de son amortissement comptable [source : Ingénieurs et techniciens biomédicaux].
L’amortissement comptable est un processus qui permet de répartir le coût d'un équipement sur sa durée de vie estimée. Ainsi, un dispositif est « amorti » sur une période d’utilisation déterminée en fonction de sa durée de vie utile, qui peut varier d’un équipement à l’autre [22].
Lorsqu’un dispositif médical dépasse sa période d’amortissement, il peut être considéré comme « vieux » (ce choix reste subjectif). Bien qu’il puisse encore être opérationnel, il devient généralement plus vulnérable aux pannes fréquentes, à une diminution des performances, ou à des coûts de maintenance en augmentation. Toutefois, ce constat n’est pas systématique. Cet indicateur, de par sa simplicité, se révèle robuste et aisément mesurable. Il constitue ainsi une méthode objective pour identifier les équipements nécessitant une attention particulière en vue d’un éventuel remplacement.
A titre d’exemple, supposons qu'un dispositif ait un coût d'achat initial de 100 000€ et qu'il ait une durée de vie estimée de 10 ans, selon le fabricant. Dans ce cas, on répartit le coût de l'équipement sur cette période, ce qui permet de déterminer ce qu’on appelle un « amortissement linéaire ».
- Coût d'achat initial : 100 000€
- Durée de vie estimée : 10 ans
Amortissement annuel = coût d’achat/durée de vie = 100 000 / 10 = 10 000
Ainsi, chaque année, l'hôpital comptabilise un amortissement de 10 000€ pour le dispositif. Cela signifie qu'après 10 ans, le coût total de l'équipement sera entièrement amorti, et le dispositif sera considéré comme ayant atteint la fin de sa durée de vie comptable.
Même si le dispositif peut encore être en bon état de fonctionnement à la fin de la période d’amortissement, à ce stade, l'hôpital pourrait décider si l'équipement est encore rentable à maintenir ou s'il doit être remplacé, en tenant compte de son état réel, des coûts de maintenance prohibitif et des besoins cliniques.
Par ailleurs, il est possible de rendre ce calcul d’amortissement plus fin et complexe en tenant compte d'autres facteurs comme le coût de la maintenance, les coûts d’exploitation et les évolutions technologiques du dispositif médical [source : auteurs].
4.2.2. Taux de vieillissement du parc
Pour évaluer le vieillissement d’un parc de dispositifs médicaux, il est essentiel de s’appuyer sur des indicateurs à la fois quantitatifs et facilement mesurables.
Le concept d’amortissement, initialement appliqué à un dispositif médical de manière unitaire, peut être élargi à l’échelle d’un parc d’équipements. En s’appuyant sur le principe d’amortissement comptable décrit précédemment, il devient pertinent d’adapter cette approche à l’ensemble d’un parc de dispositifs médicaux. Cela permettrait, par exemple, de définir un « seuil de taux de vieillissement acceptable », en tenant compte de la proportion d’équipements (par exemple, supérieure à 30 %) encore utilisés malgré avoir dépassé leur période d’amortissement comptable. Cette approche offrirait une vision globale de l’état de vieillissement du parc et faciliterait la priorisation des remplacements ou des maintenances.
Prenons l’exemple d’un parc de 50 moniteurs multiparamétriques dans un hôpital, acquis à différentes périodes. La période d’amortissement comptable de ces dispositifs est fixée à 8 ans. Parmi ces équipements, 10 moniteurs ont été acquis il y a 3 ans, 20 moniteurs il y a 7 ans, 15 moniteurs il y a 9 ans, et 5 moniteurs il y a 12 ans.
Pour évaluer le vieillissement de ce parc, il est possible de calculer le taux de vieillissement, c’est-à-dire la proportion de moniteurs ayant dépassé leur période d’amortissement. Dans ce cas, 20 moniteurs (15 âgés de 9 ans et 5 âgés de 12 ans) ont dépassé la limite des 8 ans. Ainsi, le taux de vieillissement du parc est de 40 % (20 équipements sur 50).
Ce taux, supérieur au seuil acceptable de 30 % défini à titre d’exemple, indique qu’une partie significative du parc est vieillissante mais ne veut pas dire qu’il n’est pas performant !
Pour remédier à cette situation, plusieurs actions peuvent être envisagées. Premièrement, les 5 moniteurs les plus anciens, âgés de 12 ans, devraient être remplacés en priorité. Deuxièmement, les 15 moniteurs âgés de 9 ans nécessitent une surveillance afin d’anticiper leur remplacement dans les 1 à 2 prochaines années. Enfin, un plan de renouvellement progressif pourrait être élaboré pour moderniser le parc, tout en tenant compte des contraintes budgétaires, des priorités d’utilisation et leur criticité [source : ingénieurs biomédicaux].
4.2.3. Évaluation de la technologie dépassée (obsolescence)
La notion de technologie dépassée fait référence à l'obsolescence des dispositifs médicaux en raison des avancées technologiques. Un dispositif peut être considéré comme « dépassé » lorsque ses performances, ses fonctionnalités ou sa compatibilité ne répondent plus aux standards actuels ou aux exigences cliniques modernes. Cette obsolescence peut résulter de plusieurs facteurs, notamment l’arrivée de nouveaux équipements plus performants ou encore la fin du support technique et des mises à jour logicielles [23].
Les dispositifs obsolètes sont souvent plus sujets aux pannes, entraînant des coûts de maintenance accrus, un risque de cyberattaque et un risque de non-conformité aux normes en vigueur [23][24].
Lorsqu’un équipement médical devient obsolète, le fournisseur a l’obligation légale ou contractuelle d’en informer l’établissement de santé à l’avance. De plus, il doit garantir un service après-vente pendant une période minimale de 5 ans après l’annonce de l’obsolescence. Cette démarche vise à assurer la continuité d’utilisation de l’équipement tout en permettant à l’établissement de se préparer au renouvellement de son parc. Cette période transitoire est communément appelée la fin de support. Elle offre une marge pour planifier le remplacement des dispositifs tout en minimisant les interruptions dans les soins apportés aux patients [source : ingénieur application Dräger].
Cependant après l’obligation légale des 5 ans, le fabricant peut décider ou non de continuer à prendre en charge ses équipements mais ne garantit pas le dépannage car les pièces deviennent difficiles à trouver sur le marché, ce qui peut entraîner des problèmes pour assurer la maintenance et la sécurité des équipements en fonctionnement [25] [ingénieur application Beckman].
La gestion proactive de cette obsolescence implique au fournisseur de suivre de près les prévisions de fin de vie des composants et de planifier à l'avance la communication pour éviter les coûts imprévus.
Cependant, il est reporté que la gestion de l’obsolescence est souvent sous-estimée, voire négligée, si bien que de nombreuses mesures d’économie sont réduites en cendres que ce soit du côté hospitalier et/ou fournisseur et fabricant [ingénieurs biomédicaux hospitalier].
Compte tenu de l’impact de l’obsolescence technologique, il est essentiel pour les ingénieurs biomédicaux de gérer ce phénomène par une communication efficace entre le personnel technique, les fabricants, et le personnel soignant. Cette interaction vise à assurer une anticipation et une réponse proactive face à l’obsolescence des dispositifs médicaux. Cependant, cette communication est complexe et nécessite des ressources importantes, ajoutant une charge de travail considérable aux responsabilités déjà assignées aux ingénieurs biomédicaux.
Pour faciliter la communication entre les différents parties prenantes, l’évaluation de la technologie dépassée pourrait être réalisée sur une échelle de 1 à 10, pour quantifier l'impact de l'obsolescence technologique d’un parc de dispositifs. Cette échelle permettra aux professionnels de santé, aux ingénieurs et techniciens biomédicaux d’attribuer une note, basée sur des critères comme les performances du dispositif par rapport aux dispositifs médicaux actuels, les capacités d'intégration avec d'autres systèmes, la satisfaction d’usage ou la disponibilité du support technique. Une note élevée (par exemple, 10) indiquerait un équipement obsolète, dépassé par les avancées technologiques et difficile à maintenir, tant sur le plan technique que financier. En revanche, une note plus basse (par exemple, 1) suggérerait que l'appareil est encore pertinent et technologiquement à jour [Ingénieurs biomédicaux] [auteur].
4.2.4. Coût de maintenance prohibitif
La maintenance des dispositifs médicaux est planifiée et mise en place dès l’achat de l’appareil, afin d’assurer une performance, une sécurité optimale et allonger la durée de vie. Cependant, au fil du temps, avec le vieillissement de l’équipement, les coûts de maintenance, qu’il s’agisse de maintenance préventive ou curative, peuvent croître considérablement. Cette augmentation s’explique par la fréquence accrue des pannes due à l’usure des composants (notion de vétusté). Il arrive ainsi un moment où le coût de cette maintenance atteint un seuil critique, soulevant la question de la pertinence d’un renouvellement du parc pour éviter des dépenses d’entretien excessives.
Pour intégrer cette notion de coût dans l’évaluation du vieillissement des dispositifs médicaux, il est judicieux de comparer les dépenses de maintenance de chaque équipement avec celles des autres équipements similaires au sein de l’hôpital. Un indicateur pertinent serait de calculer le coût de maintenance annuel au sein de chaque équipement de son parc. Ce calcul sera mis en comparaison avec la médiane des coûts d’entretien pour une catégorie donnée de dispositifs. Lorsqu’un appareil dépasse ce seuil médian, il est considéré comme ayant des coûts de maintenance élevés, voire « prohibitifs » dans le cadre de sa catégorie. Cette approche pourrait faciliter l’identification des dispositifs nécessitant une évaluation approfondie quant à leur remplacement, contribuant ainsi à une gestion budgétaire plus rationnelle [source : ingénieurs biomédicaux].
A titre d’exemple, il est possible d’évaluer le coût de maintenance d’un parc de dispositifs médicaux. Il est facile de rassembler les données annuelles d’entretien de chaque dispositif du parc. Supposons :
Dispositif A : 5000€ de maintenance préventive et curative annuelle
Dispositif B : 7000€ de maintenance préventive et curative annuelle
Dispositif C : 4500€ de maintenance préventive et curative annuelle
Dispositif D : 8000€ de maintenance préventive et curative annuelle
Dispositif E : 3000€ de maintenance préventive et curative annuelle
Pour identifier les dispositifs médicaux ayant des coûts de maintenance élevés, nous commençons par déterminer la médiane de ces coûts. En classant ces valeurs par ordre croissant :
- Les coûts de maintenance ordonnés sont : 3000€, 4500€, 5000€, 7000€, 8000€.
- La médiane (valeur centrale) est donc de 5000€.
En comparant chaque dispositif à cette médiane, il est possible de voir que les dispositifs B et D présentent des coûts de maintenance supérieurs à 5000 €, ce qui suggère une charge de maintenance élevée. Cela peut être le signe d’une obsolescence technique, d’une usure importante ou de problèmes de performance, entraînant des coûts d'entretien fréquents.
Ainsi, les dispositifs dont le coût de maintenance dépasse la médiane pourraient nécessiter une évaluation approfondie pour décider d’une éventuelle modernisation du parc ou d’un remplacement unique du dispositif dans l’optique de réduire les dépenses de maintenance à long terme. En identifiant les équipements ayant des coûts de maintenance élevés par rapport au parc, cette méthode pourrait permettre de cibler les investissements de manière plus efficace.
5. Proposition d’une solution pour la gestion du vieillissement du parc hospitalier
L’un des objectifs dans ce projet était de récolter un maximum de retours d'expérience afin d’une part de confronter les concepts susceptibles d'être compris différemment par chacun et d’autre part de confronter les bonnes pratiques contenues dans la littérature avec les pratiques en milieu hospitalier.
À partir des réponses obtenues ainsi que de l’analyse approfondie des résultats, un outil spécifique a été conçu pour faciliter la gestion du vieillissement des dispositifs médicaux. Cet outil est un moyen de centraliser les informations recueillies concernant les équipements du parc et se présente comme un support décisionnel pour les ingénieurs biomédicaux hospitaliers afin de prioriser les actions de remplacement ou d’évaluation du vieillissement.
5.1. Proposition d’outil d’aide à la gestion du vieillissement
Cet outil représente une aide pour évaluer le vieillissement et la vétusté des dispositifs médicaux et repose sur des indicateurs identifiés comme les plus pertinents pour la gestion du cycle de vie des équipements.
Il est important de noter que le vieillissement et la vétusté ne sont pas synonymes. Un dispositif médical ancien peut encore être pleinement fonctionnel et performant, tandis que la vétusté fait référence à une diminution de performance ou à une inadéquation de l'équipement par rapport aux exigences actuelles.
L’outil distingue clairement ces deux notions :
- Le vieillissement est mesuré à l’aide de l’amortissement comptable, en tenant compte de la durée de vie théorique des équipements ;
- La vétusté est quantifiée à travers d’autres indicateurs, tels que le coût de maintenance, la fréquence des pannes (via le MTBF), le niveau d’obsolescence, et la satisfaction du personnel soignant lié à l’usage.
L’outil, utilisé sur Excel, calcule un score de vétusté pour chaque équipement en pondérant ces indicateurs. En fonction de ce score, une décision est prise pour chaque appareil.
Ce programme a pour objectif principal d'offrir une vision globale du parc d’équipements médicaux, tant en termes de vieillissement que de vétusté. En combinant des indicateurs comme l’amortissement comptable, le coût de maintenance, la fréquence des pannes et le niveau d’obsolescence, il permet donc aux gestionnaires de détecter rapidement les équipements nécessitant une attention particulière en un clin d'œil.
Ainsi, cet outil agit comme une alerte proactive, mettant la puce à l’oreille sur l’état global du parc et aidant à anticiper les décisions stratégiques : remplacement des dispositifs, renforcement de la maintenance ou maintien en service sans intervention immédiate.
5.2. Présentation des interfaces
Afin de pouvoir l’utiliser, il faudra qu’il contienne tous les dispositifs médicaux du parc d’équipement de l’établissement de santé, comme illustré par l’exemple ci-dessous (figure 11).
Figure 11 : Exemple de parc d'équipements biomédicaux dans l’outil. (Feuille Excel) (Source : auteurs)
Elles incluent : le nom de l’équipement, son âge, sa durée d’amortissement, le coût annuel de maintenance, le prix d’un équipement similaire neuf, le niveau d’obsolescence (sur une échelle de 1 à 10), le MTBF (temps moyen entre deux pannes), ainsi que le niveau de satisfaction du personnel soignant sur une échelle de 1 à 10. Ce dernier peut être collecté facilement grâce à un simple échange entre le service biomédical et les cadres de service. L’interface d’ajout d’un équipement avec les différentes informations à fournir est disponible ci-dessous (figure 12).
Figure 12 : Ajout d’un dispositif médical dans l’outil. (Source : auteurs)
Une fois ces informations enregistrées et validées, le programme effectue les calculs nécessaires pour déterminer un score de vétusté pour chaque appareil. Le programme propose également des filtres permettant de se concentrer sur un type d’équipement en particulier, comme l’ensemble des pompes à perfusion, facilitant ainsi l’analyse et la gestion des équipements par catégorie.
Suite à l'analyse des réponses du questionnaire et des entretiens avec les ingénieurs et techniciens biomédicaux, il ressort que les besoins et les difficultés varient d’un établissement de santé à l’autre. Pour certains ingénieurs, l'âge de l'équipement est le critère principal dans la décision de renouvellement du parc, tandis que d’autres estiment que la fréquence des pannes est plus déterminante. C'est pourquoi une fonctionnalité permettant d'attribuer un niveau de pondération à chaque critère d’évaluation du score de vétusté a été ajoutée. Ce niveau de pondération, défini sur une échelle de 0 à 1, visible ci-dessous (figure 13), offre ainsi une grande flexibilité et permet d’adapter l’outil en fonction des priorités spécifiques de chaque établissement.
Figure 13 : Exemple d’ajustement de pondération. (Source : auteurs)
Après le calcul, l’outil génère un score de vétusté et trie automatiquement les résultats par ordre décroissant, offrant ainsi une vue d’ensemble de la vétusté du parc. A noter qu’il prend également en compte la criticité de chaque appareil (voir point 4.1). Ainsi, si un appareil critique est vétuste, il apparaîtra en tête de liste, facilitant son identification, comme le scanner A cité en exemple dans la figure ci-dessous (figure 14).
De plus, afin de mieux personnaliser l’outil à la convenance de l’ingénieur, il est possible d’ajouter une feuille Excel supplémentaire afin de séparer le parc en sous-parc (par exemple une feuille Excel pour les scanner et une autre pour les moniteurs) et calculer un score de vétusté pour chaque sous-parc individuellement.
Figure 14 : Trie des scores selon le score de vétusté. (Source : auteurs)
Il est possible notamment de générer des graphiques permettant de visualiser facilement la vétusté du parc, permettant de justifier les propos auprès de la direction lors des réunions d’arbitrage ou bien de réaliser des présentations. Ces graphiques peuvent être générés par équipement, comme sur l’exemple ci-dessous (figure 15), par catégorie d’équipement ou par service, facilitant ainsi la compréhension rapide de l'état du parc.
Figure 15 : Exemple de score de vétusté hiérarchisé en diagramme en barre. (Source : auteurs)
D’autres statistiques sont également générées, comme celles citées dans la figure ci-dessous (figure 16).
Figure 16 : Exemple de statistiques générées par l’outil. (Source : auteurs)
5.3. Explication de l'algorithme utilisé pour l’outil
L'algorithme utilisé pour évaluer l'état des dispositifs médicaux repose sur deux étapes principales : la mesure de leur vieillissement et l'analyse de leur vétusté. Il sera détaillé ci-après.
Dans un premier temps, l'âge du dispositif médical est évalué pour déterminer s'il peut être considéré comme "vieux". Cette évaluation se base sur la durée d'amortissement comptable. Si l'âge de l'équipement atteint ou dépasse cette durée, il est jugé "vieux" et passe à l'étape suivante. Dans le cas contraire, le dispositif reste dans un état d'attente, ce qui signifie qu'il ne progresse pas dans l'analyse de vétusté tant qu'il n'a pas atteint la durée d'amortissement. Cette démarche garantit que seuls les équipements ayant dépassé leur durée d'amortissement sont pris en compte pour l'étape d'évaluation de la performance du dispositif.
Une fois qu’un dispositif est considéré comme "vieux", son niveau de vétusté est mesuré, car un équipement ancien peut encore rester performant, respecter la réglementation et garantir la satisfaction du personnel soignant. Cette vétusté est calculée en prenant en compte plusieurs critères pondérés selon leur importance relative à l’établissement de santé. Le premier critère analysé est le coût de maintenance annuel. Si ce coût atteint ou dépasse 80 % du prix d’un équipement similaire neuf, il est intégré dans l’évaluation. Dans le cas contraire, il est ignoré pour cette analyse.
Le second critère est l'obsolescence technologique et réglementaire du dispositif. Celle-ci est évaluée sur une échelle de 1 à 10, basée sur une veille technologique et réglementaire menée par les ingénieurs biomédicaux. Cette veille est soutenue par une communication continue avec les fournisseurs de dispositifs médicaux pour identifier les évolutions technologiques, les mises à jour réglementaires et les éventuelles limitations du dispositif.
Le troisième critère porte sur la satisfaction du personnel soignant concernant l'usage du dispositif. Ce critère est également évalué sur une échelle de 1 à 10, en recueillant les retours via des échanges avec les cadres de service ou via des questionnaires ciblés.
Le quatrième critère est le temps moyen entre deux pannes, communément appelé le MTBF (Mean Time Between Failures) et est exprimé en heure. Ce paramètre est normalisé en le divisant par 1 000 pour le rendre comparable aux autres critères, puis pondéré selon son importance.
Le score de vétusté (VS) est ensuite calculé en combinant ces critères selon la formule suivante :
VS = (Âge * Pondération) + (Coût des maintenances * Pondération) + (MTBF * Pondération) + (Obsolescence * Pondération) + (Satisfaction du personnel soignant * Pondération)
Chaque critère est pondéré pour refléter son impact relatif sur l’évaluation globale. Le score de vétusté final est normalisé sur une échelle de 0 à 1, où 1 représente le niveau de vétusté le plus élevé. Une fois tous les scores calculés pour les dispositifs du parc, un tri est réalisé selon leur criticité. Cette étape permet de prioriser les actions.
Ainsi, en s’appuyant sur différents indicateurs tels que l’âge, le coût de maintenance ou le niveau d’obsolescence, et grâce à un système de pondération adaptable selon les besoins de chaque établissement, cet outil offre une estimation de la vétusté et aide à prioriser les décisions pour le futur. Il constitue donc une ressource pertinente pour une gestion anticipatrice des dispositifs médicaux du parc.
Figure 17 : Logigramme détaillé de l’algorithme. (Source : auteurs)
Conclusion
Ce travail a permis de mettre en évidence les enjeux complexes liés à la gestion du parc hospitalier, notamment en ce qui concerne le vieillissement et la vétusté des dispositifs médicaux. Grâce aux retours d'expérience recueillis via le questionnaire et aux entretiens menés auprès des professionnels du domaine, il est apparu que les approches actuelles de gestion varient considérablement selon les structures et les contraintes spécifiques de l’établissement de santé.
En réponse à ces observations, un outil a été conçu pour centraliser et analyser les données du parc d’équipements, en s’appuyant sur des indicateurs pertinents tels que l’âge, le coût de maintenance, le MTBF, et le niveau d’obsolescence. Cet outil se distingue par sa flexibilité, permettant une adaptation aux priorités spécifiques de chaque établissement grâce à un système de pondération des critères.
Au-delà de fournir une évaluation précise de la vétusté des dispositifs, cet outil représente une véritable aide à la décision, en offrant une vision globale et proactive de l’état du parc. Il facilite ainsi l’identification des équipements nécessitant une attention particulière, tout en appuyant les arbitrages stratégiques auprès des directions.
L’outil présente quelques défauts, il nécessite d’entrer les données à la main. Il serait intéressant de pouvoir extraire les données de la GMAO en un clic et le téléverser dans l'outil. Ou que l’outil soit intégré directement dans la GMAO pour faciliter la rapidité d’utilisation.
Ca aurait bien d’avoir plus d’avis et d’avis différent car nous avons remarqué que le sujet de la gestion du vieillissement du parc auprès des services biomédicaux relevait d’une complexité hors norme, ne donnant pas forcément suite à des réponses intéressantes et pertinentes à nos questions lors des entretiens.
La gestion du vieillissement n’est pas forcément le centre de préoccupation des ingénieurs biomédicaux car le temps consacré à ceci est grand et ont d’autres choses à faire.