A rappeler pour tout usage : C.VIGUIER, « Gestion de la transition des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro "legacy devices" vers le Règlement européen 2017/746 », Université de Technologie de Compiègne (France), Master Ingénierie de la Santé, Mémoire de Stage, https://travaux.master.utc.fr/, réf n° IDS248, juillet 2024, https://travaux.master.utc.fr/formations-master/ingenierie-de-la-sante/ids248/
Le 26 mai 2022 a marqué un changement important dans le secteur des Dispositifs Médicaux de Diagnostic In Vitro puisque à cette date, le texte encadrant leur cycle de vie, la directive 98/79/CE, a été officiellement abrogé ; remplacé par le Règlement européen 2017/746.
Vis-à-vis de ce nouveau contexte réglementaire, les DM-DIV peuvent avoir différents statuts possibles : parmi ceux-ci, il y le cas des « Legacy devices », un terme désignant les dispositifs, couverts par un certificat UE valide délivré selon la directive, qui continuent à être mis à disposition sur le marché ou mis en service après la date d’application du Règlement. Pour ces dispositifs, la période de transition vers le Règlement, qui a débuté à son entrée en vigueur, c’est-à-dire le 26 mai 2017, n’est pas encore terminée.
Durant cette période, il y a tout de même certaines exigences réglementaires à appliquer par les fabricants afin que leurs dispositifs puissent continuer à être mis sur le marché de l’UE ou mis en service : par exemple, en matière de Surveillance Après Commercialisation et de Vigilance (cf. article 110 du Règlement européen 2017/746).
Ce mémoire de fin d’études s’attache donc à décrire une stratégie qui a été employée afin de les mettre en place. Le choix a été pris ici de coupler leur implémentation à la mise à jour du Système de Management de la Qualité de la start-up conformément à la norme EN ISO 13485 : 2016, ainsi qu'aux exigences réglementaires en matière de qualité (article 10, annexes IX et XI) grâce à son amendement A11.
May 26th 2022 marked an important change in the In Vitro Diagnostic Medical Devices sector, as on this date, the text framing their life cycle, Directive 98/79/EC, was officially repealed ; replaced by European Regulation 2017/746.
With regard to this new regulatory context, IVDs can have different possible statuses : among these, there is the case of « Legacy devices », a term designating devices, covered by a valid EU certificate issued under the Directive, which continue to be made available on the market or put into service after the date of application of the Regulation. For these devices, the transition period to the Regulation, which began on May 26th, 2017, is not yet over.
During this period, there are still certain regulatory requirements for manufacturers to apply so that their devices can continue to be placed on the EU market or put into service : for example, with regard to Post-Market Surveillance and Vigilance (cf. Article 110 of Regulation (EU) 2017/746).
This master’s thesis therefore describes the strategy used to implement them. The choice was made here to couple their implementation with the updating of the start-up's Quality Management System in accordance with EN ISO 13485 : 2016, as well as with regulatory quality requirements (article 10, annexes IX and XI) thanks to its amendment A11.
En premier lieu, j’adresse ma gratitude à toute l’équipe enseignante du Master Ingénierie de la Santé.
Je tiens à remercier les responsables de formation, Mme CLAUDE et M. PROT, pour leur implication et leur investissement dans la réussite de leurs étudiants.
Je remercie en particulier ma tutrice durant cette année d’apprentissage, Mme FOLLET, pour avoir toujours été très réactive à mes demandes de relecture de mes rapports, pour m’avoir continuellement encouragée à aller chercher plus loin afin de produire un travail construit et crédible ainsi que pour m’avoir motivée à prendre confiance en mes compétences.
Je souhaite ensuite remercier mon maître de stage, M. RAUX, pour m’avoir offert l’opportunité d’intégrer sa structure et m’avoir fait confiance dans mes missions ; cela a transformé cet apprentissage en une expérience particulièrement enrichissante à tous les niveaux.
Je voudrais également témoigner toute ma reconnaissance à Mme HARRIRI, ma collègue chez GENOTROPY et incroyable binôme de travail durant cette année.
J’adresse également tous mes remerciements à l’ensemble des enseignants de la Licence Professionnelle Maintenance et technologie : technologie médicale et biomédicale de l’Université de Paris qui m’ont tous permis d’intégrer la formation à l’UTC : notamment Mme MONDOLINI qui m’a donné envie de me lancer dans les Affaires Réglementaires et la Qualité des Dispositifs Médicaux, Mme LENAT et Mme BAUDOT.
Enfin, mes dernières pensées s’adressent à mes frères et ma sœur pour leur incroyable soutien. Merci à mes parents qui ont toujours cru en moi et sont le moteur de ma réussite. À ma maman, le pilier de ma vie.
Les tests effectués en cas de suspicion de maladie à coronavirus 2019 (COVID-19), les tests de grossesse et les dispositifs d’autosurveillance glycémique pour le diabète sont tous des produits de santé avec un point commun particulier.
Ils font tous en effet partie de la catégorie des Dispositifs Médicaux de Diagnostic In Vitro (DM-DIV) ; les « collègues » moins connus des Dispositifs Médicaux (DM) alors que jusqu’à 70% des décisions médicales reposent sur leurs résultats et qu’ils représentent moins de 1% de la dépense totale de santé en Europe en 2022 (Figure 1) [1]:
Les DM et les DM-DIV ont tous deux une finalité médicale mais les DM-DIV, contrairement aux DM, ne sont jamais utilisés ni à l’intérieur ni sur le corps humain de par leur définition réglementaire. En effet, les DM-DIV fournissent une information sur la base d’un échantillon prélevé sur le corps humain : des liquides biologiques comme le sang et l’urine ou des échantillons de tissu humain. Les DM-DIV sont principalement utilisés par le corps médical au sein des laboratoires privés de biologie médicale et des laboratoires des centres hospitaliers ; parfois directement par des utilisateurs non formés dits « profanes » , on parle alors d’autotests [2].
Dans le monde, le marché des DM-DIV était estimé à plus de 52.622 milliards de dollars en 2017 avec une perspective de croissance de 6.1% jusqu’en 2024 [3]. Cette croissance peut être expliquée par l’augmentation de l’incidence des maladies chroniques et infectieuses, de la population gériatrique et par les nombreuses innovations dans le domaine grâce aux multiples investissements dans les activités de Recherche & Développement (R&D). Dans le monde, ce marché est dominé, à près de 60%, par cinq entreprises : Roche, Abbott Laboratories, Danaher, Siemens Healthineers et Thermo Fisher Scientific (Figure 2) [3]:
En Europe, la croissance du marché des DM-DIV enregistrée en 2021 a été sans précédent principalement à cause de la pandémie de COVID-19 : 41,2% selon les chiffres de MedTech Europe publiés en 2022 (Figure 3) [4]:
Au sein de ce marché européen, la France a atteint la seconde place en 2021, derrière l’Allemagne et devant l’Italie, avec un marché estimé à 2,610 milliards d’euros, en croissance de 22% par rapport à 2020 (Figure 4) [4]:
D’après le Syndicat de l’Industrie du Diagnostic In Vitro (SIDIV) créé en 1977 qui fédère une centaine d’entreprises responsables d’environ 90% du chiffres d’affaires total du secteur en France, le marché français du DM-DIV reste dominé par 80% de Petites et Moyennes Entreprises (PME) et Très Petites Entreprises (TPE) en 2023. Dans un contexte post pandémie, son chiffre d’affaires s’est maintenu à 2 milliards d’euros (hors autosurveillance glycémique) en 2023 [5].
De plus, le marché a généré 15 100 emplois répartis dans plus de 200 métiers [5] ; une catégorie que j’ai rejoint dans le cadre de mon année d’apprentissage en intégrant en septembre 2023, la start-up GENOTROPY, TPE qui commercialise un DM-DIV utilisé pour le diagnostic génétique du rhésus fœtal dans le cadre du suivi de grossesse.
Comme le secteur des DM, celui des DM-DIV a subi un bouleversement majeur avec l’entrée en vigueur le 26 mai 2017 du règlement européen 2017/746 en remplacement de la directive 98/79/CE qui encadrait leur cycle de vie.
Pour les DM-DIV possédant un marquage de Conformité Européenne (CE) à la directive comme celui de GENOTROPY, cette date a aussi marqué le début d’une période de transition dont la fin ne cesse d’être repoussée. Bien que le règlement soit entré en application le 26 mai 2022, les fabricants concernés disposent en effet d’un temps plus long avant d’être contraints à l’appliquer dans son entièreté : jusqu’au 26 mai 2025 pour les dispositifs de classe D, 26 mai 2026 pour les classes C, 26 mai 2027 pour les classes B et 26 mai 2028 pour les classes A à l’état stérile.
Pour bénéficier de cette prolongation de la période transitoire, les fabricants doivent appliquer certaines exigences réglementaires.
C’est dans ce cadre que j’ai pris mes fonctions au sein de l’entreprise GENOTROPY, en tant qu’apprentie chargée des Affaires Réglementaires et de la Qualité.
Le travail d’apprentissage s’est concentré sur la résolution de la problématique suivante :
Quelle démarche opérationnelle les fabricants de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro « legacy devices » doivent-ils suivre pour bénéficier de la prolongation de la période de transition de la directive 98/79/CE vers le règlement européen 2017/746 ?
La première partie de ce mémoire pose le contexte réglementaire lié aujourd’hui aux DM-DIV.
La seconde partie présente un cas d’usage : le produit commercialisé par GENOTROPY.
La troisième partie pose les exigences du règlement 2017/746 applicables aux « legacy devices » en période de transition en juillet 2024 :
Dans cette dernière partie, une attention particulière est donnée à l’identification des liens entre les exigences réglementaires présentées et le domaine qualité.
Les DM-DIV mis sur le marché en Europe sont encadrés par le règlement relatif aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro 2017/746 (RDM-DIV) [6]. Celui-ci est entré en vigueur le 26 mai 2017 mais son entrée en application n’a été promulguée que cinq ans plus tard le 26 mai 2022 afin de laisser un temps suffisant aux acteurs impliqués dans le cycle de vie des DM-DIV pour effectuer la transition par rapport au précédent texte, la directive 98/79/CE [7].
Que ce soit sous directive ou sous règlement, tout dispositif qui est commercialisé sur le marché unique européen doit obtenir en amont un marquage CE médical car celui-ci sert de preuve que le dispositif est conforme aux exigences de sécurité et de performance qui lui sont applicables en vertu du texte en vigueur : les « exigences essentielles ».
Dans les deux textes, sont ainsi retrouvés les fondamentaux de la « Nouvelle Approche » : un principe développé en 1985 selon lequel les législations européennes se limitent à fixer les exigences essentielles que les produits doivent obligatoirement respecter ; le choix étant ensuite laissé aux entreprises des moyens techniques à appliquer pour les respecter.
C’est le « renvoi aux normes » dont certaines élaborées par les organismes européens de normalisation, le Comité Européen de Normalisation (CEN) et le Comité Européen de Normalisation en Électronique et en Électrotechnique (CENELEC) sur mandat de la Commission Européenne, sont en plus harmonisées car elles fournissent une présomption de conformité à certaines exigences établies par la directive/Règlement. Toute norme harmonisée est identifiée par une décision d’exécution de la Commission Européenne et reste d’application volontaire [2] [8].
La directive 98/79/CE définissait la notion de DM-DIV à son premier article. Pour connaître la classe de son DM-DIV, le fabricant devait ensuite se reporter à son annexe II où deux classes étaient distinguées sur la base de la destination d’utilisation du DM-DIV :
Sous la directive, il était possible pour le fabricant ayant un dispositif ne faisant pas partie d’une des deux listes de recourir à une auto certification.
Le règlement 2017/746 s’applique de même au « dispositif médical de diagnostic in vitro » à usage humain et à ses accessoires. Le terme de DM-DIV est défini à son article 2.2 ; il est plus précis que sous la directive 98/79/CE avec notamment : l’inclusion de la prédisposition à une affection ou une maladie et de la prédiction de la réponse à un traitement. Son champs comprend aussi les logiciels et dispositifs compagnons ce qui n’était pas le cas sous la directive 98/79/CE [2].
Seuls les dispositifs « in house », c’est-à-dire ceux dont la fabrication et l’utilisation se font dans le même établissement de santé, sont dispensés de se conformer aux exigences réglementaires autres que la conformité aux exigences essentielles de l’Annexe I et la déclaration aux autorités avant leur mise en service s’il remplissent un certain nombre de conditions (cf. article 5.5 du RDM-DIV). Cela signifie par exemple que ces dispositifs ne portent ni de marquage CE ni d’Identifiant Unique de Dispositif (IUD) et ne font pas l’objet de certificats délivrés par des organismes notifiés (ON).
Des DM-DIV peuvent être retrouvés à toutes les étapes du parcours de soin des patients (Figure 5):
Ces dispositifs sont donc indispensables pour la santé des patients.
De plus, il existe une très grande diversité de DM-DIV sur le marché ; pour les désigner, plusieurs termes faisant référence à leur finalité d’usage sont ainsi fréquemment rencontrés (Tableau 1) :
Avec le RDM-DIV, les DM-DIV sont désormais répartis en 4 classes (Tableau 2) en fonction de leur usage revendiqué et du risque qu’ils engendrent pour l’individu et pour la santé publique en cas de défaillance ; les règles les plus strictes s’appliquant aux classes de risque les plus élevées [11] :
Pour identifier la classe de son dispositif, le fabricant doit se référer à l’Annexe VIII du RDM-DIV, s’appuyer sur le guide MDCG 2020-16 Rev.2 [12] et le document de l’International Medical Device Regulators Forum (IMDRF) (en français : Forum international des régulateurs des dispositifs médicaux) intitulé « Principles of In Vitro Diagnostic Medical Devices Classification » [13].
De manière générale, il est essentiel que le fabricant lise, dans un premier temps, le chapitre « Règles d’application » du RDM-DIV car c’est un préalable à l’identification, dans un second temps, de la ou les règles, parmi les 7 listées, qui sont applicables afin de déterminer la classe de son DM-DIV.
La classification du DM-DIV est vérifiée par l’ON lors de la procédure d’évaluation de la conformité. Il est alors possible que l’ON soit en désaccord avec le fabricant quant à la classe retenue. Dans ce cas, l’autorité compétente de l’État membre où se trouve le fabricant est chargée de trancher sur la classe (cf. article 47 « Classification des dispositifs » du RDM-DIV).
La définition des DM-DIV et leur classification n’ont cependant pas été les seules modifications induites par le règlement 2017/746.
Sur de nombreux autres aspects, le règlement 2017/746 renforce le texte de la directive 98/79/CE : il est plus long, plus précis et intègre des nouveautés (113 articles et 15 annexes contre 24 articles et 10 annexes dans la directive).
De par sa nature, jusqu’au 26 mai 2022, la directive 98/79/CE était transposée dans le droit interne de chaque pays de l’UE avec certain délai accordée pour son application : en France, la transposition était ainsi faite dans le Code de la Santé Publique (livre II titre II cinquième partie) via l’ordonnance n°2001-198 du 1er mars 2001 et le décret n°2004-198 [14].
Contrairement à la directive, le règlement 2017/746 ne fait toutefois pas l’objet d’une transposition dans le droit national : il est directement applicable dans tous les États membres de l’UE ce qui permet notamment d’éviter les différences d’interprétation liées à la transposition des directives.
Dans l’intérêt des utilisateurs des dispositifs, les exigences à respecter pour obtenir le marquage CE ont été considérablement renforcées par le RDM-DIV, notamment en matière de :
Les ON sont des acteurs, désignés (ou « notifiés ») pour évaluer de façon indépendante la conformité de certains DM-DIV avec les exigences de sécurité applicables [11] en vertu du texte en vigueur (Directive ou Règlement) avant leur mise sur le marché sur le territoire de l’UE. Cette désignation n’est possible qu’après une réussite de la procédure dite de « joint assessment » (ou évaluation conjointe, cf. Article 38 du RDM-DIV) auxquels ils sont soumis ; procédure menée par l’autorité compétente nationale (l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé en France ou ANSM en France), la Commission Européenne et deux autres autorités compétentes européennes désignées par la Commission et le Groupe de Coordination des Dispositifs Médicaux (GDCM).
Avec la transition vers le règlement, les exigences et compétences demandées aux ON ont néanmoins été renforcées, notamment en ce qui concerne leurs ressources humaines et leurs processus internes. Les règles de compétence, d’impartialité et d’indépendance auxquelles sont soumis les ON figurent au Chapitre IV ainsi qu’en Annexe IV du RDM-DIV.
Ce renforcement des exigences peut expliquer la réduction du nombre d’ON désignés : 22 organismes désignés dans le cadre de la directive [16] contre 12 organismes au titre du RDM-DIV. Tous les ON désignés selon les directives et règlements européens sont recensés sur la plateforme NANDO (New Approach Notified And Designated Organisations, en français : organismes notifies et désignés “nouvelle approche“) ; chaque décision de désignation prenant effet un jour après sa publication sur la plateforme [2] [16].
Cette réduction a d’autant plus d’impact que leur nombre est toujours inférieur dans le secteur des DM-DIV par comparaison à celui des DM : ainsi, en juillet 2024, seuls 12 ON sont enregistrés sur NANDO dans le premier cas contre 45 dans le second.
En outre, le fabricant doit sélectionner, parmi ces 12 ON, ceux désignés pour l’évaluation de la conformité au RDM-DIV des types de DM-DIV qui le concernent (Figure 6).
Il y a donc moins d’ON disponibles sous le RDM-DIV par rapport à la directive 98/79/CE alors que les chiffres montrent qu’en vertu du RDM-DIV, ils devront superviser dix fois plus de DM-DIV (80% au lieu de 8%) ; la plupart pour la première fois [15] avec un niveau de participation toujours proportionné à la classe de risque du dispositif (Figure 7):
En somme, entre la Directive 98/79/CE et le règlement européen 2017/746, 10 fois plus de DM-DIV nécessitent l’intervention d’un ON pour leur procédure d’évaluation de la conformité ; avec deux fois moins d’ON disponibles et des exigences à respecter par les différents opérateurs économiques renforcées et nouvelles [17].
Le processus de marquage CE sous le RDM-DIV obéit au raisonnement suivant (Figure 8) :
Dans un premier temps, indépendamment de la classe de son DM-DIV, le fabricant doit connaître et comprendre les étapes pour aboutir à son marquage CE médical de son dispositif (Tableau 3) :
Au sein de ce processus, l’étape la plus importante est la sixième car elle fait intervenir des organismes tiers au fabricant : les ON.
Au niveau de l’étape 6, c’est seulement dans le cas où le dispositif est en classe A non stérile que le fabricant du DM-DIV peut s’auto marquer CE c’est-à-dire que la procédure d’évaluation de la conformité de son produit sera placée sous sa seule responsabilité.
Pour le reste des classes, le fabricant doit donc obligatoirement passer par un des ON désignés pour l’évaluation de la conformité de son DM-DIV selon le Règlement.
Quand ils sont impliqués, les ON réalisent des procédures d’évaluation de la conformité qui comprennent toujours deux parties (Figure 9) :
Il est à noter que les certificats EN ISO 13485 :2016 obtenus à l’année n sont valables 3 ans : un audit de suivi a lieu chacune des deux premières années suivant la certification (années n+1 et n+2) ; à la troisième année a lieu l’audit de re certification (année n+3). Les certificats UE sont quant à eux valides 5 ans sans audit intermédiaire.
La procédure d’évaluation de la conformité de certains DM-DIV peut inclure des particularités supplémentaires aux démarches présentées plus haut :
C’est précisément dans ce cadre réglementaire que s’inscrit mon entreprise d’apprentissage pour l’année : GENOTROPY avec son DM-DIV, l’AIO RHD Fetal DNA Kit.
GENOTROPY est une start-up française établie à Rouen (Normandie) crée en novembre 2018 par M. Grégory RAUX, son président, qui reste le seul employé de l’entreprise jusqu’à aujourd’hui.
Depuis 2021, GENOTROPY commercialise en France un DM-DIV de diagnostic du Rhésus D (RHD) fœtal ; ce kit ayant été conçu puis breveté par l’entreprise à la suite de plusieurs années de travaux de R&D en interne.
Ce test est réalisable chez les femmes enceintes de RHD négatif, dès la douzième semaine d’aménorrhée, par des laboratoires d’analyse accrédités par le COFRAC selon la norme NF EN ISO 15189 : 2022 « Laboratoires de biologie médicale -Exigences concernant la qualité et la compétence » [19] pour réaliser des tests prénataux : c’est le cas de Laboratoires de Biologie Médicale (LBM) hospitaliers ainsi que de laboratoires d’analyses médicales privés [20].
Par ailleurs, les tests de génotypage du rhésus fœtal comme celui de GENOTROPY sont remboursés à 100% en France depuis juillet 2017 par l’Assurance Maladie [21]; et depuis 2022 en Allemagne [22], le premier marché du DM-DIV en Europe [4].
Une analyse SWOT a été conduite (Figure 10) : elle permet d’identifier les forces (« Strengths ») et faiblesses (« Weaknesses ») (des facteurs internes), menaces (« Threats »), et opportunités (« Opportunities ») (des facteurs externes) liées à l’organisation actuelle de GENOTROPY :
Cette analyse met en évidence une entreprise prometteuse existant déjà depuis plusieurs années et dont l’organisation future doit être développée si elle souhaite prospérer.
Il s’agit ici de présenter le contexte clinique et le fonctionnement du produit commercialisé par GENOTROPY.
Sur la membrane des érythrocytes, peuvent être présents ou absents un certain nombre d’antigènes : parmi ceux-ci, on retrouve l’antigène majeur RHD. Sa présence fait que l’individu est dit RH positif (RH :1), son absence RH négatif (RH : -1).
Il y a une incompatibilité fœto-maternelle de RHD quand la femme enceinte est de RH : -1 et son fœtus de RH :1.
En effet, dans ce cas, la femme enceinte peut produire des anticorps contre les antigènes RHD de son fœtus lors d’un contact sanguin se produisant principalement lors de l’accouchement ou d’une interruption de grossesse (dans les deux cas, lors de l’expulsion du fœtus, le placenta peut être perturbé ce qui augmente le risque de passage des globules rouges fœtaux). Cette production d’anticorps (ou « alloimunisation ») engendre la destruction des érythrocytes du fœtus : une anémie hémolytique sévère apparaît alors, responsable de la Maladie Hémolytique du Fœtus et du Nouveau-né [23].
Cette anémie engendre généralement la mort du fœtus en l’absence soit de traitement transfusionnel in utéro (curatif) soit d’une injection préventive d’anticorps de prophylaxie (ou Immunoglobulines anti-D) qui supprime le phénomène d’alloimunisation. Des risques et effets indésirables existent en lien avec cet injection ; ils sont les même que ceux liés à la vaccination.
On comprend de ce fait l’intérêt d’un diagnostic précoce du RHD fœtal, qui s’il est négatif, permet d’éviter l’injection inutile des Immunoglobulines anti-D chez la femme enceinte de RH :-1 [23].
Le produit de GENOTROPY fonctionne à partir de l’ADN fœtal : celui-ci est extrait à partir du plasma issu d’un prélèvement sanguin effectué chez la femme enceinte de RH : -1 (non invasif), grâce à un kit d’extraction de l’ADN. Ce kit d’extraction n’est pas commercialisé par GENOTROPY qui recommande simplement à ses clients d’utiliser un kit marqué CE optimisé pour l’extraction d’ADN fœtal [20].
En France, les prélèvements sanguins pour dépister les anticorps irréguliers sont obligatoires chez les femmes enceintes de RH :-1 : au premier trimestre et au cours des 6e, 8e et 9e mois de grossesse [23]. Or, seul un certain pourcentage de ces femmes ont un fœtus RH : 1. Par conséquent, la réalisation précoce du test de GENOTROPY chez ces femmes permet aussi d’éviter ces multiples dépistages inutiles.
Sur l’ADN fœtal libre circulant dans le plasma maternel, le kit de GENOTROPY détecte spécifiquement les exons 5, 7 et 10 du gène RHD.
Les gènes RHD et RHCE, qui forment le locus RH, sont positionnés sur le chromosome 1. Il s’agit de deux gènes séparés par le gène SMP1 et présentant 92% de similitudes [23] dans leurs séquences respectives de 10 exons. Le gène RHD présente 2 boites rhésus en amont et en aval de sa séquence qui sont de même hautement homologues (Figure 11):
Les gènes RHD et RHCE codent respectivement l’antigène RHD et l’antigène RHCE qui traversent la membrane des érythrocytes.
Chez les individus caucasiens, le phénotype RH : -1 est présent à une fréquence de 15%, dans la population africaine à 8% et asiatique à moins de 1% [20] [24]. Le cas le plus fréquent expliquant l’absence de l’antigène RHD est celui de la délétion totale et homozygote du gène RHD.
Grâce au kit de GENOTROPY, les exons 5, 7 et 10 du gène RHD de l’ADN fœtal, sont amplifiés par technique de « Polymerase Chain Reaction » (PCR) au sein d’un appareil programmable, un thermocycleur. Cette technique permet en effet l’amplification, grâce à l’utilisation d’une enzyme Taq polymérase thermorésistante, d’une région spécifique d’un acide nucléique donné afin d’en obtenir une quantité suffisante pour le détecter et l’étudier. Un cycle de PCR comprend trois étapes, toutes effectuées à des températures différentes afin de contrôler l’activité enzymatique :
Dans le cas de GENOTROPY, le type de PCR utilisé est la PCR en temps réel ou q-PCR : cela signifie que la quantité d’ADN est mesurée à chaque cycle de PCR grâce à un « reporter » fluorescent. Le Ct est le nombre de cycles de PCR à partir duquel le signal de fluorescence qu'il émet est statistiquement différent du bruit de fond représenté par la ligne seuil sur le graphique ci-dessous (Figure 12):
En fin de la réaction de PCR, une analyse « High Resolution Melt » (HRM) (en français : fusion à haute résolution) est réalisée, également dans le thermocycleur. Cela signifie que les produits de la PCR, les amplicons, sont soumis à une augmentation de température progressive provoquant une séparation des deux brins d’ADN appelée fusion. Cette fusion est observable en temps réel grâce à des colorants intercalants ayant la propriété d’augmenter en fluorescence lorsque fixés à de l’ADN double brin. En revanche, lorsqu’il n’y a pas de double brin, les intercalants ne peuvent pas se fixer ; par conséquent, la fluorescence est faible.
La courbe représentant l’intensité de fluorescence en fonction de la température est appelée courbe de fusion (Figure 13).
Le Tableau 4 ci-dessous montre plusieurs dérivées de cette courbe de fusion : ces dérivées sont appelées courbes d’analyse. Elles permettent de mettre en évidence les pics correspondant aux températures de fusion de chaque exon du gène RHD (Tableau 4).
GENOTROPY possède le statut de « fabricant » au regard de la directive 98/79/CE et du règlement européen 2017/746 bien que l’entreprise sous-traite la fabrication de son kit car la définition n’exige pas qu’il fabrique son produit ; il peut aussi le faire fabriquer (définition à l’article 2.23 du RDM-DIV).
D’une part, GENOTROPY possède un Système de Management de la Qualité (SMQ) certifié EN ISO 13485 : 2016 par un ON depuis 2021 ; sa certification ayant été renouvelée en septembre 2023 pour un second cycle de 3 ans. Dans le cadre de la procédure d’évaluation de la conformité effectuée sous directive (Annexe IV, Assurance de la Qualité complète), ce SMQ est aussi couvert par un certificat UE relatif au système de gestion de la qualité.
D’autre part, le produit de GENOTROPY est considéré comme un DM-DIV : un « kit » composé d’un ensemble de « réactifs » (et non « instruments »), exclusivement destinés à un usage professionnel (et non « profane »). Ce produit a fait l’objet d’une documentation technique évaluée sous directive, à l’origine d’un autre certificat UE.
Par conséquent, aujourd’hui, GENOTROPY possède 3 certificats avec différentes durées de validité.
Selon le règlement européen 2017/746, un DM-DIV peut avoir 3 statuts différents. Alors que les deux premiers cas concernent des dispositifs qui existaient déjà sous directive, le troisième cas s’applique aux DM-DIV nouveaux :
Le produit de GENOTROPY fait donc partie de la deuxième catégorie : les « Legacy devices ».
GENOTROPY a identifié la règle de classification 2 tiret 2 de l’Annexe VIII du règlement comme étant applicable à son produit : « Les dispositifs destinés à être utilisés pour déterminer les groupes sanguins (…) relèvent de la classe C, sauf s’ils sont destinés à la détermination d’un des marqueurs suivants : (…) – système Rhésus [RH1 (D) (…)] » [6].
Par conséquent, le produit commercialisé de GENOTROPY sera en classe D sous le RDM-DIV ; une classe de risque aux exigences renforcées par rapport à sa classe selon l’annexe II de la directive 98/79/CE : la liste A qui inclut à son premier tiret les « réactifs (…) pour la détermination des groupes sanguins suivants : (…) rhésus (C,c, D, E, e) » [7].
De plus, le produit de GENOTROPY, qui est en classe D sous règlement, est encadré par des spécifications générales communes (une possibilité existant en plus des normes harmonisées pour être conforme aux exigences réglementaires) sous ce même texte. Ces spécifications générales communes sont énoncées aux Annexes I et II du règlement d’exécution 2022/1107 de la Commission Européenne [9].
En conséquence, pour son DM-DIV, GENOTROPY devra suivre, la procédure d’évaluation de la conformité au RDM-DIV qui comprend les trois axes suivants (Figure 14):
Ayant ainsi analysé comment le produit de GENOTROPY a été évalué sous la directive, quel est son statut en période de transition et comment il sera évalué selon le règlement 2017/746, ma première tâche en apprentissage a été de comprendre quelles sont les dates importantes liées à la transition au-delà du 26 mai 2022 ainsi que les conditions d’application de celles-ci.
On compte aujourd’hui plusieurs révisions du RDM-DIV depuis son entrée en vigueur en 2017 :
La version du RDM-DIV à utiliser est la version consolidée (version sans effet juridique) la plus récente qui rassemble toutes ses modifications, celle du 20 mars 2023 [25]. En particulier, l’article 110 fixe les dispositions transitoires applicables aux « Legacy devices ».
À partir d’une analyse de cette version consolidée, il est ainsi possible de répondre à plusieurs questions :
Le Règlement distingue 3 cas :
En règle générale, il est possible de continuer à mettre en service ou mettre sur le marché tant que le certificat produit (=certificat émis suite à l’évaluation de la Documentation Technique) délivré selon la directive 98/79/CE est valide. Le Règlement ne donne plus de date limite (article 110.4 du RDM-DIV).
Il est à noter que les termes « mis sur le marché » et « mis en service » sont respectivement définis aux points 21 et 22 de l’article 2 du RDM-DIV.
Toutefois, il y a une exception à cette règle générale : le cas des dispositifs pour lesquels (article 110.3 3ème paragraphe du RDM-DIV) :
Pour ces dispositifs, les dates limites de mise sur le marché ou mise sur le service sont les suivantes (Tableau 5) :
Ces différentes dates correspondent aux fins respectives des périodes de transition de ces DM-DIV vers le Règlement.
Il y a 3 conditions (d’après le premier et quatrième paragraphe de l’article 110.3 du RDM-DIV) :
Il est à préciser que les notions de « surveillance après certification » et « surveillance du marché » sont des missions respectivement réalisées par les ON et Autorités Compétentes. Elles ne concernent pas les fabricants.
Les fabricants français doivent effectuer une veille réglementaire et normative sur tous les textes pouvant impacter leur activité et leur produit : des textes d’origine internationale, européenne comme le RDM-DIV et française comme le Code de la Santé Publique.
À l’échelle française, il y a notamment l’ordonnance n°2022-1086 (cf. Annexe) qui a été adoptée afin de :
Dans cette ordonnance entrée en vigueur le 31 juillet 2022, l’article 15 est à prendre en compte de façon particulière car il concerne les dispositions transitoires prévues à l’article 110 du RDM-DIV.
Les deux certificat UE possédés par GENOTROPY ont été émis avant le 25 mai 2017 conformément à l’Annexe IV de la directive 98/79/CE. Par conséquent, ils restent valables jusqu’à la fin de période indiquée dessus c’est-à-dire : le 26 mai 2025.
Le produit de GENOTROPY peut donc être mis en service ou mis sur le marché jusqu’au 26 mai 2025 avec ses certificats actuels. À cet effet, il doit obéir à l’ensemble des conditions réglementaires d’application obligatoire.
Dans ce cadre, l’objectif de ma mission globale durant l’année d’apprentissage a été le suivant :
Mettre à jour le SMQ de la société conformément à la norme EN ISO 13485 : 2016 + A11 : 2021* ainsi qu’aux exigences réglementaires applicables Afin de pouvoir poursuivre la mise sur le marché du DM-DIV de l’entreprise jusqu’à la fin de sa période de transition |
Dans cette démarche, a été employé le guide MDCG 2022-8 dont l’annexe liste l’ensemble des exigences applicables aux DM-DIV « legacy devices »[27].
La mise à jour du SMQ selon l’EN ISO 13485 : 2016 n’est pas une obligation surtout chez GENOTROPY où le SMQ est déjà certifié selon la norme. Néanmoins, dans la start-up, dans un objectif d’amélioration continue, le choix a été fait de la faire en combinaison avec l’application des exigences règlementaires en matière de qualité (grâce à l’amendement A11) ainsi que des exigences purement réglementaires liées à la transition (Surveillance Après Commercialisation, vigilance…).
Par ailleurs, pour ce travail, a été employée la version européenne de la norme (qui est donc référencée ci-dessous) car l’ON de GENOTROPY évalue son SMQ selon cette version. Néanmoins, il est à noter que les exigences de cette version européenne de 2016 sont strictement les mêmes que celles de la version française de 2016.
Une Planification Dynamique Stratégique (PDS) (Figure 15) a été réalisée afin de rechercher les enjeux liés à cette mission et les partager à l’ensemble de l’équipe de GENOTROPY :
On notera l’ordre de priorité qui a été donné aux différentes tâches qui ont composé ma mission (Figure 16):
Les tâches 1 et 2 sont présentées dans la partie B de ce rapport tandis que la tâche 3 se trouve dans la partie C.
Les deux premières tâches (Tâche 1 et Tâche 2) de ma mission ayant fait appel à l’EN ISO 13485 : 2016 ainsi qu’à son amendement A11 de 2021, une présentation générale de cette norme s’impose.
Fondée sur les exigences de la norme ISO 9001 : 2008 « Système de management de la qualité » qui est générique, la norme EN ISO 13485 : 2016 « Dispositifs Médicaux – Systèmes de management de la qualité- Exigences à des fins réglementaires » est une norme qui s’adresse à tout organisme (quel que soit sa taille ou sa nature) ayant une action sur une ou plusieurs étapes du cycle de vie d’un DM/DM-DIV, de la R&D à la réforme. Sont donc tous autant concernés le fabricant de DM/DM-DIV, le distributeur, le mandataire, l’importateur et tous les éventuels prestataires d’activités associées : par exemple, les prestataires de support technique.
L’objectif de la norme est de fournir à tous ces acteurs les exigences à respecter, pour leur SMQ, afin de démontrer qu’ils sont conformes aux exigences des clients et aux exigences règlementaires applicables.
La norme EN ISO 13485 : 2016 est une norme harmonisée au titre du RDM-DIV. Comme toute norme harmonisée, elle est identifiée par une décision d’exécution de la Commission Européenne : la décision (UE) 2022/729.
Être une norme harmonisée signifie qu’elle fournit une présomption de conformité à certaines des exigences du Règlement ; ici celles relatives à la qualité. Pour connaître ces exigences, le fabricant doit se référer à l’amendement A11 qui lui a été ajouté en septembre 2021. Cet amendement contient deux annexes Z (Z indique le fait que la norme est harmonisée au titre d’un règlement) : l’annexe ZA pour le règlement 2017/745 (RDM) et l’annexe ZB pour le règlement 2017/746 (RDM-DIV).
Dans chaque annexe Z, plusieurs tableaux relient la norme aux exigences des règlements : c’est-à-dire les exigences décrites à l’article 10, les annexes IX et XI. Chaque tableau décrit 3 cas possibles : « couvert », « partiellement couvert » et « non couvert » (Figure 17):
Pour les deux derniers cas, « partiellement couvert » et « non couvert », le fabricant doit donc mettre en place, en plus de la norme (quand il a fait le choix de l’appliquer), des « mesures supplémentaires » afin que son SMQ soit en conformité totale aux exigences du RDM-DIV.
Cette mise en place représente un travail conséquent de lecture et compréhension des textes qu’il faut donc implémenter par paliers pour ne pas se perdre (Figure 16).
Pour avoir une idée d’ensemble de la compatibilité du SMQ de GENOTROPY avec l’EN ISO 13485 :2016, a été effectué, au début de la démarche, un autodiagnostic du SMQ en utilisant l’onglet « Évaluation rapide » (regroupement de 72 critères sur les 227 de la norme) d’un outil Excel réalisé par des étudiants de l’UTC en décembre 2017 [28].
À la suite de l’évaluation rapide, l’onglet résultat a figuré le graphe radar suivant (Figure 18):
Le résultat global était « convaincant » ce qui est cohérent avec le fait que le SMQ est déjà certifié. Néanmoins, comme précisé par l’outil, « convaincant » signifie également que des améliorations peuvent encore être apportées.
À partir de ce résultat, la tâche 1 a correspondu à la mise à jour du système qualité de GENOTROPY conformément aux exigences de l’EN ISO 13485 : 2016.
Dans le cas de GENOTROPY, c’est le manuel qualité qui reprend ces exigences dans l’ordre, de la section 4 « Système de management de la qualité » à la section 8 « Mesurage, analyse et amélioration » de la norme. Celui-ci a par conséquent été mis à jour durant cette tâche.
Pour présenter la méthodologie employée à cet effet, un exemple concret est utilisé : celui du paragraphe 8.2.4 « Audit interne » de l’EN ISO 13485 : 2016.
Pour la tâche n°1 (Figure 19), la méthodologie employée a compris 3 étapes.
Étape 1 : répond-on aux bien exigences de l’EN ISO 13485 : 2016 dans le Manuel Qualité ?
Dans cette étape 1, il a été mené, pour chaque section du Manuel Qualité, une comparaison de l’existant par rapport aux exigences de la norme afin d’en déduire quels sont les écarts et de les corriger (Figure 20).
Étape 2 : possède t’on les documents demandés par la norme dans le système qualité (documents que l’on relie aux paragraphes correspondants du Manuel Qualité) ?
Dans cette étape 2, une attention particulière a été donnée, pour chaque section du Manuel Qualité, aux exigences documentaires de la norme grâce à l’analyse normative opérationnelle de celle-ci.
Une analyse normative opérationnelle est un processus qui peut être appliqué afin de simplifier la connaissance et la compréhension d’exigences normatives. Pour chaque sous-article du texte, un code couleur est utilisé pour identifier les éléments clefs de l’exigence :
Enfin, dans toute analyse normative opérationnelle, le sous paragraphe de la norme est aussi résumé en un objectif synthétique : en jaune ci-dessous.
La figure 21 montre le cas de l’analyse normative opérationnelle appliquée au sous paragraphe 8.2.4 « Audit interne » de l’EN ISO 13485 : 2016 (Figure 21) :
Ainsi, à partir de cet exemple, s'est posée la question suivante. Le SMQ de GENOTROPY contenait-il :
Cela était bien le cas ici.
Étape 3 : le contenu des documents demandés est-il cohérent avec la section correspondante du Manuel Qualité ?
Dans l’étape 3, après avoir vérifié la présence des documents demandés par l’EN ISO 13485 : 2016 dans le système qualité, il a été vérifié que leur contenu était aligné avec la section correspondante du Manuel Qualité.
Pour le même exemple qu’au-dessus, le cas des audits internes, les enregistrements des audits et de leurs résultats ont ainsi été relus pour observer s’ils contenaient bien une « identification des processus et des domaines audités ainsi que les conclusions » des audits.
La deuxième tâche a concerné la thématique suivante (Figure 22) :
Pour cette deuxième tâche, il a été fait appel à l’amendement A11 de l’EN ISO 13485 : 2016. La dernière colonne « Remarques/Notes » de chaque tableau des annexes Z de cet amendement a été particulièrement utile car elle indique à quel degré chaque exigence réglementaire liée à la qualité est couverte par l’EN ISO 13485 et surtout ce qui est manquant et donc à implémenter en plus de la norme.
Dans l’exemple ci-dessous (Figure 23), on voit que le point 2.2 deuxième paragraphe (b) tiret 2 de l’annexe IX du Règlement est entièrement couvert par, entre autres, le paragraphe 8.2.4 « Audit interne » de l’EN ISO 13485 : 2016.
Il n’y a donc pas de mesures supplémentaires à mettre en place par le fabricant pour ce point en particulier.
Pour cette tâche n°2, chez GENOTROPY, a été fait le choix de créer un enregistrement traçant la démarche de mise en conformité aux exigences réglementaires en matière de qualité ; cet enregistrement comprend le tableau suivant (Tableau 6) :
De plus, pour respecter les délais liés aux audits, dans ce même document, les mesures supplémentaires à mettre en place ont été regroupées par document du système qualité impacté. En effet, la simple lecture de l’article 10 et l’annexe IX permet de voir qu’il s’agit de deux paragraphes du Règlement aux nombreux points communs.
Il est à noter que, pour GENOTROPY, cette tâche n°2 n’a pas concerné l’annexe XI du RDM-DIV puisque étant en classe D, la procédure d’évaluation de la conformité de son DM-DIV au nouveau Règlement se fera exclusivement selon l’annexe IX.
En fin de la démarche, un autodiagnostic du système qualité a été refait en utilisant le même outil qu’au départ (Figure 24).
Par rapport à la situation de départ, cet autodiagnostic montre qu’il y a eu une progression dans la conformité du SMQ avec les exigences de l’EN ISO 13485 : 2016 de façon globale ainsi que pour chaque article de la norme. Ainsi, le SMQ de GENOTROPY est maintenant qualifié de « conforme » et non plus « convaincant ».
Les annexes IX et XI du RDM-DIV ainsi que l’article 10 ne sont toutefois pas les seuls paragraphes du Règlement à considérer en périodes de transition pour les DM-DIV « legacy devices ».
Ces paragraphes dont il est question ont fait l’objet de la tâche 3 de ma mission ; tâche qui est intitulée « application des exigences réglementaires propres à la transition » (Figure 25).
Les exigences réglementaires liées à la transition des « legacy devices » sont retrouvées au paragraphe 3 de l’article 110 « Dispositions transitoires » du RDM-DIV, il s’agit des exigences relatives :
Ces exigences s'appliquent en remplacement des exigences correspondantes dans la directive 98/79/CE. Elles correspondent aux conditions qui sont aujourd’hui à respecter pour pouvoir bénéficier de la prolongation des périodes de transition au-delà du 26 mai 2022.
La SAC n’est pas une nouveauté introduite par le Règlement ; il s’agit d’une exigence qui existait déjà sous la directive 98/79/CE ; en effet, d’après l’annexe III du texte : « Le fabricant met en place et tient à jour une procédure systématique d'examen des données acquises sur les dispositifs depuis leur production » [7].
De plus, cette exigence est aujourd’hui applicable à tous les DM-DIV sans exception.
Pour ces deux raisons, j’ai observé que GENOTROPY possédait déjà, à mon arrivée en septembre 2023, un système de SAC mis en place. Cependant, sa mise en place n’était que partielle (Figure 26):
*Il est à noter que l’envoi de données cliniques par le client est crucial pour gérer la SAC et l’amélioration continue chez GENOTROPY car il s’agit d’une start-up avec un seul client qui n’a jamais eu ni de réclamations sur ses produits ni rencontré aucun incident de vigilance.
Afin de parvenir à un système de SAC 100% compatible avec le RDM-DIV chez GENOTROPY, une méthodologie en 4 étapes a été suivie selon un cycle d’amélioration continue ou de DEMING. Comme la démarche envisagée est une activité stratégique proche de l’audit/inspection, a été fait le choix de débuter ce cycle par le « C » ou « Check » donnant ainsi un cycle CAPD (Figure 27) :
Focus sur le « Check » du cycle :
La première étape du cycle de CAPD a été cruciale puisqu’elle a consisté en une analyse du RDM-DIV afin de mieux comprendre le processus de SAC et les écarts de GENOTROPY par rapport à ces attendus.
La SAC (cf. article 78 du RDM-DIV) : définition et représentation du système, champs d’application :
Ainsi, le système de SAC, tel que défini dans le Règlement, est un processus dont l’objectif final est de surveiller et mesurer la qualité, la sécurité et des performances du DM-DIV à partir du moment où il est sur le marché de l’UE/dans la phase de post-production. Ce processus d’examen des données acquises sur le dispositif depuis sa production est :
Une représentation du système de SAC à implémenter et mettre à jour sous le RDM-DIV peut être produite (Figure 28) :
Il est à noter que le résumé des caractéristiques de sécurité et de performance (cf. article 29 du RDM-DIV) n’est pas applicable aux « Legacy devices » comme indiqué dans le guide MDCG 2022-8 [27].
Enfin, selon le RDM-DIV, un système de SAC doit être construit pour chaque DM-DIV ; proportionnellement à sa classe de risque (Tableau 7 ci-dessous) et de manière appropriée par rapport à son type (cf. article 78 du RDM-DIV).
À la fin de la mise en œuvre du cycle de CAPD, a été obtenu un système de SAC complet ; ce système ayant les caractéristiques suivantes :
1) Chez GENOTROPY, il s’agit maintenant d’un système lié directement au Manuel Qualité (auparavant mis à jour selon l’EN ISO 13485/l’annexe IX et l’article 10 du RDM-DIV) :
Tout d’abord, le système de SAC exigé par le RDM-DIV est lié directement au paragraphe 8.2.1 « Retours d’information » de la norme EN ISO 13485 : 2016 :
Ensuite, le système de SAC exigé par le RDM-DIV est aussi en lien avec le paragraphe 8.2.2 « Traitements des réclamations » de la norme EN ISO 13485 :2016 :
2) Chez GENOTROPY, le système de SAC comprend désormais l’ensemble des livrables requis par le Règlement européen 2017/746 à leur emplacement requis :
Les livrables requis sont indiqués dans le RDM-DIV aux paragraphes suivants :
Conformément à l’article 78 du RDM-DIV, ces livrables font partie intégrante du SMQ du fabricant : le système qualité et la documentation technique du produit pour le marquage CE sous le Règlement (Tableau 7).
Pour le SPAC, il est à noter ce qui est écrit à l’Annexe XIII partie B section 8 du RDM-DIV : « Si le SPAC n'est pas jugé approprié pour un dispositif donné, une justification est fournie et documentée dans le rapport sur l'évaluation des performances » [6].
Chaque livrable du système de SAC peut être élaboré/mis à jour en utilisant les guides suivants (Tableau 8) :
Enfin, il peut être utile de créer des liens entre les livrables du système de SAC (Figure 29) :
3) Une tâche restante vis-à-vis du système de SAC :
Vis-à-vis du système de SAC, une tâche est restée en suspens chez GENOTROPY.
En effet, l’entreprise n’est pas parvenue à transmettre son PSUR à l’ON du fait de la non disponibilité du portail électronique de celui-ci qui est pourtant en principe dédié à sa soumission dans l’attente de la pleine fonctionnalité d’EUDAMED.
Cette situation peut sûrement s’expliquer par le fait que la rédaction d’un PSUR n’est que volontaire pour les fabricants de « Legacy devices » comme indiqué dans le guide MDCG 2022-8 : il précise en effet que seul le rapport de SAC est applicable aux "Legacy Devices" à condition que le fabricant, comme GENOTROPY, prépare volontairement un PSUR. Ainsi, la rédaction d’un PSUR ne devient obligatoire que lorsque le dispositif devient un « IVDR Device » c’est-à-dire conforme au Règlement européen 2017/746, avec passage en classe C ou D.
On peut donc supposer que la transmission du PSUR ne sera réalisable que lorsque la période de transition vers le Règlement européen 2017/746 sera terminée : elle devrait dès lors être possible soit par le portail électronique de l’ON soit via EUDAMED pour revue de l’ON qui y ajoutera son évaluation ; le PSUR et l’évaluation seront ensuite rendus disponibles aux autorités compétentes toujours via EUDAMED.
Dans la tâche n°3, la seconde exigence à mettre en œuvre fait partie d’une des méthodes réactives (et non proactives) listées dans le Plan de SAC afin de collecter les données sur la qualité, la sécurité et les performances du DM-DIV durant tout son cycle de vie : c’est la vigilance.
Comme la SAC, la vigilance fait partie des responsabilités du fabricant de DM-DIV (cf. article 10.9 du RDM-DIV) indépendamment de sa localisation (le Règlement interdit à l’article 11.4 de déléguer, au représentant autorisé, les obligations en matière de vigilance).
Au sein de l’organisation du fabricant, c’est précisément la Personne Chargée de Veiller au Respect de la Règlementation (PCVRR) (cf. article 15 du RDM-DIV et guide MDCG 2019-7) qui assure la mise en place des exigences règlementaires de SAC et de vigilance. À noter que bien que les obligations de SAC et de vigilance soient applicables aux « Legacy devices » et plus généralement à tous les DM-DIV placés sur le marché, un PCVRR n’est pas exigé pour les « Legacy devices » comme indiqué dans le guide MDCG 2022-8.
Chez GENOTROPY, à mon arrivée, il y avait déjà un système de vigilance présent comprenant :
Avec la démarche engagée préalablement, mon objectif a été de m’assurer de la conformité totale de ce système avec le Règlement 2017/746. Il est à noter, qu’à l’heure actuelle, le guide MDCG 2023-3 « Questions and answers on vigilance terms and concepts as outlined in the Regulation (EU) 2017/745 on medical devices » est inutilisable dans cette démarche, bien que central dans le cas des DM, car il ne comprend pas dans son champs d’application le Règlement européen 2017/746.
La méthodologie choisie chez GENOTROPY afin d’aboutir à un système complet de vigilance reprend l’outil de PDCA à savoir PLAN-DO-CHECK-ACT.
Étape 1 : CHECK : Comparaison de l’existant avec les attendus du RDM-DIV [30] :
Cette étape a été réalisée en analysant le Règlement : plus précisément la section 2 du chapitre VII (articles 82 à 87). On retrouve aussi la notion de vigilance des DM-DIV à la section 2 « Organisation de la réactovigilance » (articles R5222-4 à R5222-11) du Code de la Santé Publique, les articles L.5222-2 à L.5222-4 inclus ainsi que l’article L. 5462 avec les sanctions (financières et pénales) prévues en cas de manquements aux obligations.
Après analyse du RDM-DIV, on comprend que la vigilance correspond aux signalements obligatoires de certains problèmes liés au DM-DIV et révélés au cours de leur phase d’après commercialisation. La vigilance entreprise par le fabricant est un processus en 4 activités (Figure 30):
Activité 1 : Collecte d’informations :
La première activité est toujours celle de la collecte d’informations dans le cadre du Plan de Surveillance Après Commercialisation ; toutes les informations relatives à des incidents doivent être considérées. Le terme incident est défini à l’article 2.67 du RDM-DIV et ne doit pas être confondu avec celui d’évènement indésirable défini à l’article 2.60 (en anglais, « adverse event ») utilisé dans le contexte des études de performance menées avant la mise sur le marché (cf. article 76 du RDM-DIV). Malgré cette différence, l’utilisation de la terminologie pour les déclarations des effets adverses catégorisés de l’IMDRF est obligatoire par le fabricant dans les « Manufacturer Incident Report » (MIR).
Les informations peuvent être reçues des professionnels de santé ou des utilisateurs professionnels qui sont soumis, par l’article L.5222-3 du Code de la Santé Publique, à une obligation de déclaration à l’ANSM de tout incident grave dont ils connaissance. Les incidents liés au DM-DIV peuvent aussi être identifiées directement en interne au fabricant.
Activité 2 : Notifications des incidents graves :
La seconde activité est celle de la notification. Cette étape suit le principe suivant :
Si l’incident reçu est grave, alors il doit être obligatoirement notifié. En cas de doute sur sa nature, il faut également le notifier.
La notification est possible via plusieurs livrables dont les formulaires doivent impérativement être présents au sein du système de vigilance du fabricant afin d’être utilisables sans délai en cas de besoin :
Les « incidents graves » qui impliquent des dispositifs mis sur le marché de l’UE sont à notifier dans le respect des délais fixés par le Règlement ; c’est-à-dire [30]:
La notification d’un incident grave doit être transmise à l’autorité compétente de l’État membre où a eu lieu cet incident par le biais du MIR. Un rapport initial incomplet peut être transmis dans un premier temps pour respecter les délais réglementaires, suivi ensuite d’un rapport complet.
L’ON du fabricant peut aussi être concerné par cette notification (cf. contrat liant la société à son ON).
Le rapport de tendances est un document à employer pour notifier les autorités compétentes des États Membres où l’incident grave a eu lieu en cas [25] :
L’objectif de ce rapport est d’empêcher des incidents non graves de causer des plus grands problèmes avec le temps.
Le rapport de synthèse périodique est un document qui ne peut être produit qu’en cas d’accord entre le fabricant et son autorité compétente coordinatrice (qui consulte les autres autorités compétentes référencées aux points a et b de l’article 87.8), selon un format, un contenu et une périodicité définie et dans les cas suivants [25] :
L’objectif du rapport de synthèse périodique est de rassembler ce qui auraient été des rapports individuels d’incidents graves en un seul même document.
Il est à noter que tout autre incident ne rentrant pas dans l’une des catégories mentionnées au-dessus doit être impérativement documenté dans les rapports produits dans le cadre de la SAC.
Activité 3 : Investigations :
Après la notification d’un incident grave en application du RDM-DIV, intervient immédiatement la troisième activité dite d’analyse pour le fabricant ; il s’agit alors de :
Activité 4 : Actions : FSCA (avec notifications de celles-ci) :
Dans une quatrième activité, si elles ont auparavant été évaluées comme étant nécessaires, en application de l’article 82.1 du RDM-DIV, les FSCA doivent être notifiées sans retard injustifié et avant d’être prises sur les dispositifs mis sur le marché dans l’UE et ses pays tiers (seule le cas où la mise en œuvre immédiate des FSCA est nécessaire justifie une notification après son implémentation). Sont concernés par la notification :
Les FSCA sont les mesures correctives prises par un fabricant, pour des raisons techniques ou médicales, afin de prévenir ou d’atténuer le risque d’incident grave [25] en rapport avec un dispositif mis à disposition sur le marché (cf. article 2.71). Selon le guide MEDDEV 2.12-1 rev. 8 [10], il peut s’agir par exemple de :
Par la suite, le fabricant informe les utilisateurs affectés des FSCA implémentées au moyen des FSN ou « Field Safety Notice ». Les FSN sont les « avis de sécurité » (cf. définition à l’article 2.72) dans le RDM-DIV et les « fiches d’avertissement » mentionnées dans la norme EN ISO 13485 : 2016. Comme indiqué dans le guide MDCG 2022-12 [31], les FSN ne sont pas transmises par le fabricant directement aux utilisateurs de ses dispositifs : il s’agit des autorités compétentes qui les ont reçues qui se chargeront de cette transmission.
Étape 2 : ACT : prendre les décisions qui s’imposent :
Après analyse du RDM-DIV, dans le cas de GENOTROPY, deux décisions se sont imposées.
D’une part, a été décidé de revoir entièrement la procédure de vigilance à cause de plusieurs écarts constatés par rapport aux attendus réglementaires ; notamment :
1- La structure choisie de la procédure qui rendait difficilement compréhensible le processus de vigilance : de plus, cette procédure ne présentait pas de liens avec le processus de SAC bien qu’elle lui est directement liée ;
2- L’absence d’une partie relative aux rapports de synthèse périodique alors qu’il s’agit pourtant d’une possibilité de signalement pour le fabricant instaurée par le Règlement ;
3- L’absence d’une partie relative aux dispositions d’EUDAMED en lien avec la vigilance.
D’autre part, a été décidé de s’assurer que le dossier du SMQ répertoriant les formulaires des rapports de vigilance était bien à jour : c’est-à-dire vérifier que tous les formulaires existants étaient bien disponibles dans le SMQ et dans leur version la plus récente.
Étape 3 : PLAN : planifier le travail à réaliser :
En raison des contraintes de temps liées à l’audit interne, cette étape n’a pu être appliquée ; il a fallu passer directement à la mise en pratique des décisions préalablement identifiées (étape suivante).
Étape 4 : DO : exécuter les tâches répertoriées à l’étape précédente :
Dans cette étape, la procédure et le dossier adjacent ont été entièrement revus menant aux résultats présentés ci-dessous.
Suite à la démarche mise en œuvre, les résultats suivants ont été obtenus :
1- Procédure avec une structure reprenant dans leur ordre les activités du processus de Vigilance. Cette procédure est désormais liée au Processus de SAC aux niveaux suivants (Figure 31):
2- Une partie de la procédure est désormais dédiée aux rapports de synthèse périodique.
De plus, le dossier avec l’ensemble des formulaires utilisables pour reporter les cas de vigilance est complet avec les versions les plus récentes des documents disponibles ; ces formulaires sont tous présents sur le site web de l’ANSM.
Concernant ces formulaires, le fabricant doit cependant rester vigilant car certains n’ont pas encore été adaptés en fonction des exigences du RDM-DIV comme cela est précisé dans le guide MDCG 2022-12 [31] : cela est le cas du formulaire pour les FSCA, les rapports de synthèse périodique et les rapports de tendances. Par conséquent, pour ces cas, le guide MDCG 2022-12 [31] précise que le fabricant peut se servir des sections « Commentaires Généraux » des formulaires pour y indiquer ce qui est exigé par le RDM-DIV et manquant dans le reste du document.
Pour ce qui est des dispositions d’EUDAMED en lien avec la vigilance, celles-ci sont vues dans la partie suivante de ce rapport qui explique en détail le fonctionnement de la base de données européenne.
Selon l’article 110.3 du Règlement européen 2017/746, la dernière exigence réglementaire applicable aux « Legacy Devices » pendant la période de transition est celle relative à l’enregistrement des opérateurs économiques et des dispositifs.
Les exigences correspondantes sont présentes respectivement aux articles 26 « Enregistrement des dispositifs » et 28 « Système électronique d’enregistrement des opérateurs économiques » du RDM-DIV. Ces deux articles concernent évidemment EUDAMED.
Chez GENOTROPY, ma principale mission vis-à-vis de ces articles a été de vérifier si la société était bien dans le respect des règles qu’ils fixent.
EUDAMED signifie “EUropean DATAbase on MEDical devices” ou banque de données européenne sur les Dispositifs Médicaux. Il s’agit d’un élément qui existait déjà sous les directives (mention par exemple dans la décision de la Commission du 19 avril 2010, [32]). Néanmoins, dans le Règlement 2017/746, sa prévalence a été renforcée puisqu’il y est mentionné dans près de 50 articles dont l’article 30 qui encadre sa gestion et le place sous la responsabilité de la Commission Européenne.
EUDAMED doit permettre la centralisation de l’ensemble des informations relatives au cycle de vie des dispositifs mis sur le marché de l’UE ; avec les opérateurs économiques qui leur sont associés. De cette manière, la plateforme doit permettre d’améliorer la transparence et la disponibilité des informations pour les patients et professionnels de santé ainsi que la coordination des différents États membres de l’UE.
Les spécifications fonctionnelles de la plateforme, définies par la Commission Européenne en collaboration avec le Groupe de Coordination des Dispositifs Médicaux (GDCM) (en anglais : MDCG, « Medical Device Coordination Group ») (cf. article 34 du RDM), ont été publiées pour la première fois en mars 2019. Leur dernière version date du 15 décembre 2022 (version 7.2) [33].
D’après ces spécifications, une fois achevé, EUDAMED sera composé de 6 modules interconnectés ; des modules qui sont communs à la fois aux DM et aux DM-DIV (Figure 32) :
À terme, les six modules d’EUDAMED présenteront chacun des niveaux accessibles au public ; les établissements médicaux et la presse inclus [2].
Les principaux acteurs qui auront accès à EUDAMED resteront néanmoins [2] :
Chacun de ces acteurs est identifié dans EUDAMED grâce au « Single Registration Number » (SRN) ; numéro fourni par son autorité compétente nationale après son enregistrement initial dans EUDAMED. En fonction de l’activité exercée par une même entité, le SRN est différent car différents acteurs n’ont pas les même devoirs vis-à-vis d’EUDAMED [2]. Une même entité peut donc avoir plusieurs SRN si elle exerce plusieurs activités.
Un SRN est composé de trois parties (Figure 33) [34] :
À l’heure actuelle, EUDAMED n’est pas complet [35].
En effet, seuls trois modules sont aujourd’hui disponibles (Figure 34) :
La moitié d’EUDAMED n’est donc pas encore prête. Par conséquent, l’utilisation d’EUDAMED n’est ni obligatoire ni exigée ; son utilisation n’est que volontaire aujourd’hui.
En accord avec les dispositions transitoires du RDM-DIV, le système, dans son entièreté, deviendra obligatoirement utilisable quand (cf. article 34 du RDM) :
En attendant la pleine opérabilité de la base, les dispositions transitoires de l’article 112 et de l’article 113.3.f du Règlement sont applicables [6]. Le fabricant peut de plus s’appuyer sur le guide MDCG 2022-12 paru en juillet 2022 qui liste les dispositions alternatives pouvant être mises en œuvre avant la pleine fonctionnalité d’EUDAMED [31]. Enfin, le paragraphe III de l’article 15 de l’ordonnance 2022-1186 doit également être pris en compte (cf. Annexe).
La mise en œuvre d’EUDAMED reste lente : en effet, lors de son entrée en vigueur, l’article 34 du RDM indiquait que l’avis de la Commission annonçant sa pleine opérabilité serait publié au plus tard le 25 mars 2020 [6]. Plus de 4 ans après et la moitié de la base n’est pas encore déployée.
De plus, les trois modules déjà accessibles ne s’avèrent pas complètement opérationnels dans la pratique. On se concentre ci-dessous sur ceux relatifs à l’application des exigences réglementaires durant la période de transition des « Legacy devices » :
Théorie : ce module sert à l’application de l’article 28 du RDM-DIV. Pour les fabricants, il leur permet de :
Pratique (sur la version 2.14.1 d’EUDAMED) :
Dans la pratique, ce module apparaît globalement complet par rapport aux attendus réglementaires. En effet, le fabricant peut aujourd’hui y enregistrer :
Toutefois, il est à préciser qu’au quotidien, l’accès à EUDAMED reste compliqué à cause de l’imbrication qui a été créé pour les droits et profils de ses utilisateurs.
En effet, prenons l’exemple d’un Opérateur Économique comme GENOTROPY qui est fabricant. GENOTROPY a son propre compte EUDAMED et cela est également le cas de chaque personne de l’entreprise. Chaque profil d’une personne de l’entreprise a un droit spécifique vis-à-vis de chaque module du compte de GENOTROPY. Il y a plusieurs droits possibles :
Cette imbrication se complique.
En effet, il est obligatoire pour chaque opérateur économique d’avoir au moins deux LAA qui lui sont connectés dont 1 avec un profil actif (l’adresse email avec laquelle est faite l’enregistrement initial de l’opérateur économique devient automatiquement son premier LAA). Cette particularité n’est cependant pas adaptée au cas des entreprises avec 1 seul employé comme GENOTROPY l’était avant mon arrivée.
De plus, EUDAMED est organisé de telle sorte que chaque personne de l’entreprise qui souhaite mettre à jour ses droits vis-à-vis d’un module de l’opérateur économique doit être approuvée par un LAA ou LUA de ce même opérateur [36].
Alternative :
Aujourd’hui, s’il n’a pas fait d’enregistrement sur EUDAMED, le fabricant a toujours la possibilité d’enregistrer son activité via un formulaire national disponible sur le site de l’ANSM conformément à l’article 113 paragraphe 3.f du RDM-DIV. Cependant, il est à noter que ce formulaire n’a qu’une portée nationale contrairement à EUDAMED qui est valable à l’échelle européenne. Par conséquent, un réenregistrement sera à faire, dans EUDAMED, par tout fabricant qui aurait employé ce formulaire une fois que la base sera obligatoirement utilisable [29].
2. Module 2 : « Enregistrement des dispositifs » (article 26 du RDM-DIV) :
Pour ce module, un préalable doit être présenté : c’est le système IUD.
Le système IUD comprend toujours trois étapes.
Dans un premier temps, il y a pour les « IVDR devices », une obligation de production de l’IUD valable depuis l’entrée en application du RDM-DIV c’est-à-dire depuis le 26 mai 2022. Un IUD comprend toujours (Figure 35) [37] :
D’après la décision d’exécution (UE) 2019/939 du 6 juin 2019, cette production de l’IUD passe obligatoirement par un des 4 organismes agréés par la Commission Européenne c’est-à-dire : le GS1, l’HIBCC, l’ICCBBA et l’IFA.
Dans un second temps, il y une obligation d’apposer l’IUD sur chaque niveau de conditionnement du DM-DIV (S’il y a plusieurs codes sur l’étiquetage, il faut également ajouter le logo UDI de la norme ISO 15223-1 à côté du code IUD) dans un format lisible par l’homme et un format lisible par la machine (=QR code, datamatrix ou code 128). D’après l’article 113.3.e du RDM-DIV, cette obligation posée par l’article 24.4 s’applique à des dates variables en fonction de la classe du DM-DIV :
Dans un troisième temps, dans le système IUD, la dernière étape est celle de la transmission des données rattachées à l’IUD-ID à EUDAMED, cette dernière étape restant volontaire aujourd’hui.
Aujourd’hui, les « Legacy devices » comme celui de GENOTROPY ne sont en revanche pas obligés de suivre ces trois étapes. En particulier, leur enregistrement dans EUDAMED n’est pour l’instant obligatoire que dans le cas où un incident grave se produit ou une FSCA est implémentée car l’enregistrement des dispositifs est une condition préalable à l’enregistrement éventuel de l’incident grave qui lui est lié dans EUDAMED.
Afin de permettre au fabricant l’enregistrement dans EUDAMED de son « Legacy Device », la base a créé deux outils en remplacement de l’IUD-ID de base et l’IUD ID : respectivement l’EUDAMED-DI et l’EUDAMED-ID.
Théorie : le module dédié à l’enregistrement des dispositifs dans EUDAMED doit permettre :
Il est à noter que la plateforme doit également permettre des téléchargements automatiques des informations relatives à l’IUD d’après l’article 28.4 du RDM référencé à l’article 25 du RDM-DIV. En revanche, l’IUD-IP ne peut être transmis via EUDAMED.
Pratique (sur la version 2.14.1 d’EUDAMED) :
Le dispositif de GENOTROPY est un « Legacy Device ». Il n’est donc pas contraint de respecter toutes les obligations relatives à l’IUD. Pourtant, celles-ci ont tout de même été appliquées par l’entreprise : en particulier, l’ensemble des étapes décrites dans le guide intitulé « Management of Legacy devices » de la Commission Européenne [38] ont été suivies pour l’enregistrement du DM-DIV sur EUDAMED.
Alternative :
Aujourd’hui, s’il n’a pas encore fait d’enregistrement de ses dispositifs sur EUDAMED, le fabricant a la possibilité d’employer le même formulaire que celui nécessaire à une déclaration d’activité pour les déclarer à l’ANSM. Ce même formulaire sert aussi, par ailleurs, à la déclaration à l’agence de la personne en charge de la réactovigilance en interne au fabricant [29].
3. Module 5 : « Surveillance Après Commercialisation et Vigilance » (article 87 du RDM-DIV) :
Théorie :
Ce module d’EUDAMED doit permettre plusieurs éléments au fabricant :
Pratique (sur la version 2.14.1 d’EUDAMED) :
Ce cinquième module fait partie des modules d’EUDAMED qui ne sont pas encore disponibles. Son achèvement est prévu au cours du deuxième trimestre de l’année 2024 d’après la Commission Européenne.
Alternative (d’après le guide MDCG 2022-12) :
Jusqu’à ce que EUDAMED soit pleinement opérationnel, pour assurer la transmission du PSUR à son ON (cas des classes D selon le RDM-DIV), le fabricant peut recourir à l’utilisation de mails sécurisés (d’après le guide MDCG 2022-12, [31]).
Selon le document MDCG 2022-12, la notification des incidents graves/FSCA/FSN et la soumission des différents rapports de vigilance doivent continuer à être faits par le biais des systèmes nationaux de vigilance par mail.
Par ailleurs, pour ce qui est du dernier module d’EUDAMED disponible à ce jour, le module 3- « Organismes Notifiés et certificats », celui-ci ne nécessite pas l’intervention des fabricants. Il est dédié à l’enregistrement des ON et des certificats délivrés par ceux-ci (cf. article 52 du RDM-DIV).
Aujourd’hui, cependant, ce module ne permet de voir aucune de ces informations (Figure 36) :
Mon année d’apprentissage dans la qualité et les affaires réglementaires chez GENOTROPY m’a permis de :
De par tous ses aspects, je pense que mon expérience professionnelle chez GENOTROPY a été enrichissante à tous les niveaux. J’ai désormais une meilleure idée du quotidien d’un chargé des affaires réglementaires et de la qualité. J’ai aussi gagné en confiance dans mes compétences professionnelles ainsi qu’en aisance dans mon anglais écrit et oral. Je suis donc particulièrement motivée à poursuivre dans cette voie après l’année d’apprentissage.
Il y a plusieurs compétences et connaissances me restant à acquérir à la suite de mon année d’apprentissage chez GENOTROPY.
Je pense notamment à la rédaction de la Documentation Technique d’un DM-DIV selon le Règlement, tâche que l’entreprise n’a pas encore pu développer puisque le système qualité est la priorité en période transition des « Legacy Devices ». Ainsi, en relation avec la Documentation Technique, je n’ai seulement pu participer qu’à son maintien de conformité selon la directive et dans la continuité des modifications apportées au système qualité.
J’ai aussi le souhait de développer ma connaissance des études de performances selon le Règlement. Enfin, je suis consciente de l’importance de consolider ma culture dans les domaines relatifs aux technologies des produits, pour la suite de ma carrière, car c’est d’eux dont dépendent ensuite les spécificités des activités réglementaires et qualité engagées.
Durant cette année d’apprentissage, le Master Ingénierie de la Santé que j’ai suivi à l’UTC m’a été utile sur plusieurs points :
Afin de bénéficier de la prolongation de la période de transition vers le Règlement, une démarche en trois points a été suivie chez GENOTROPY :
Il est à préciser que cette démarche a été construite en fonction du cas de l’entreprise et du cadre réglementaire existant en matière de transition. Celui-ci sera bientôt modifié puisque, le 23 janvier 2024, la Commission a proposé de nouvelles mesures qui consistent notamment à accorder plus de temps aux entreprises pour faire leur transition, sous réserve de nouvelles conditions. Cette proposition qui a été adoptée par le Conseil de l’Union et le Parlement Européen fait l’objet d’une analyse dans un document séparé disponible sur la page WordPress de ce projet.
Il est également à remarquer que cette démarche n’a pas concerné la Documentation Technique du « Legacy Device » : seul le maintien de sa conformité à la directive a été assuré ainsi que sa mise à jour en continu en fonction des modifications apportées au système qualité.
Par ailleurs, la notion de changements n’a pas été abordée dans le rapport car jugée particulièrement dépendante de l’ON du fabricant. En effet, bien que la réglementation exige que seuls les changements considérés comme substantiels selon la directive soit reportés à l’ON avant leur implémentation et qu’aucun changement significatif en matière de conception et d’usage revendiqué (selon le Règlement 2017/746) soit mis en œuvre pendant la transition, l’ON peut, comme dans le cas de GENOTROPY, exiger que certains changements particuliers lui soient notifiés ; substantiels ou non, significatifs ou non.
Enfin, il est à souligner les coûts importants mobilisés par cette démarche : notamment en matière de ressources humaines, de finances et de temps. Cela est conséquent pour une TPE comme GENOTROPY et peut provoquer un ralentissement des activités de R&D de la société puisque les ressources que ces activités mobilisent sont désormais employées à la mise en œuvre des obligations liées au Règlement. L’innovation ralentit donc, ce qui peut être préjudiciable pour le bénéfice des patients.
L’ordonnance n°2022-1186 du 29 juillet 2022 [26] sert à l’adaptation du droit français au règlement européen 2017/746 afin d’assurer sa mise en œuvre. Dans cette ordonnance entrée en vigueur le 31 juillet 2022, un article est d’importance particulière : c’est l’article 15 car il porte sur les dispositions transitoires.
Ce paragraphe concerne EUDAMED. Il fait la distinction entre :
Ce paragraphe concerne les études de performance des DM-DIV.
Celles-ci sont encadrées par les dispositions de la première partie du livre Ier du titre II du Code de la Santé Publique (dans leur rédaction antérieure au 31 juillet 2022) dans deux cas :
Pour ces deux cas, les dispositions de l’article L. 1123-10 ne sont pas applicables. De plus, tout évènement indésirable grave et défectuosités de DM-DIV survenant dans le cadre de ces recherches doit être notifié conformément à l’article 76 du RDM-DIV.
Ce paragraphe concerne les DM-DIV « in house » c’est-à-dire les DM-DIV fabriqués et utilisés au sein même des établissement de santé. Pour ces dispositifs sont aujourd’hui applicables :
Le point d du paragraphe 5 de l’article 5 du RDM-DIV ne deviendra applicable qu’à partir du 26 mai 2028. Le seul point restant du paragraphe 5 de l’article 5 du RDM-DIV, le point a, n’est pas mentionné.
Ce paragraphe fait référence à l’ordonnance n°2022-582 portant adaptation du droit français au Règlement (UE) 2017/745 [39].
Catiana RAKOTOZAFY
A rappeler pour tout usage : Catiana RAKOTOZAFY, « La gestion des risques liés aux dispositifs médicaux selon la norme ISO 14971:2019 au sein d'une PME », Université de Technologie de Compiègne (France), Master Ingénierie de la Santé, Mémoire d'Apprentissage, https://travaux.master.utc.fr/, réf n° IDS240, juillet 2024, https://travaux.master.utc.fr/formations-master/ingenierie-de-la-sante/ids240
La gestion des risques est un élément essentiel dans le développement et la fabrication des dispositifs médicaux. La norme ISO 14971 fournit un cadre structuré pour la gestion des risques, mais sa mise en place peut être complexe et nécessite une bonne compréhension de ses exigences et de ses principes.
Ce travail explore le cadre réglementaire applicable aux dispositifs médicaux, en particulier les exigences de l'ISO 14971:2019. La mise en œuvre de la gestion des risques au sein de Franklab SteriFrance, une PME, est décrite, en commençant par une analyse de l'existant, suivie d'une comparaison avec les exigences normatives.
Sur la base de cette analyse, des actions correctives ont été mises en place pour aligner les pratiques de Franklab SteriFrance avec les exigences réglementaires. Aujourd'hui, grâce à une politique de gestion des risques rigoureuse et une démarche d'amélioration continue, plusieurs non-conformités ont été levés. Les processus de gestion des risques ont été optimisés, améliorant ainsi la sécurité des dispositifs médicaux et assurant une conformité totale avec les normes réglementaires.
Les résultats obtenus démontrent l'impact positif de la mise en œuvre de cette politique de gestion des risques, soulignant l'importance de l'amélioration continue pour maintenir et optimiser ces pratiques au sein de l'entreprise.
Risk management is an essential element in the development and manufacture of medical devices. ISO 14971 provides a structured framework for risk management, but its implementation can be complex and requires a good understanding of its requirements and principles.
This work explores the regulatory framework applicable to medical devices, in particular the requirements of ISO 14971:2019. The implementation of risk management at Franklab SteriFrance is described, starting with an analysis of the existing situation, followed by a comparison with the normative requirements.
Based on this analysis, corrective actions were implemented to bring Franklab SteriFrance's practices into line with regulatory requirements. Today, thanks to a rigorous risk management policy and a continuous improvement approach, several non-conformities have been lifted. Risk management processes have been optimized, improving the safety of medical devices and ensuring full compliance with regulatory standards.
The results obtained demonstrate the positive impact of implementing this risk management policy, underlining the importance of continuous improvement in maintaining and optimizing these practices within the company.
A rappeler pour tout usage : Asmae NADIM, « Chef de produit junior en électrophysiologie cardiaque - Abbott Medical », Université de Technologie de Compiègne (France), Master Ingénierie de la Santé, Mémoire de Stage, https://travaux.master.utc.fr/, réf n° IDS237, juillet 2024, https://travaux.master.utc.fr/formations-master/ingenierie-de-la-sante/ids237/
Les maladies cardiovasculaires sont l’une des premières causes de mortalité dans le monde. Abbott Medical est une des entreprises leaders sur le marché des dispositifs médicaux notamment dans le traitement des maladies cardiaques en particulier les troubles du rythme cardiaque. Pour finaliser mes études et mon master 2 Ingénierie de la Santé parcours Technologies Biomédicales et Territoires de santé, j’ai réalisé un stage de fin d’études de 6 mois au sein de cette entreprise en tant que Cheffe de Produit Junior en Électrophysiologie Cardiaque.
L’électrophysiologie cardiaque est un domaine complexe et riche qui évolue très rapidement, durant ce stage j’ai pu accomplir diverses missions comme la veille concurrentielle, l’analyse du marché, la préparation de congrès, l’organisation de réunion régionale, la création de support de communication interne, l’arrêt de commercialisation et l’accompagnement de mise sur le marché de produits.
Ce mémoire met en avant le domaine de l’électrophysiologie cardiaque et le rôle d’un chef de produit au sein d’une multinationale qui ne cesse de se renouveler ainsi que les missions auxquelles j’ai pu prendre part lors de mon stage. Mais également l’apport personnel et les compétences professionnelles de cette expérience.
Cardiovascular diseases are one of the leading causes of mortality worldwide. Abbott Medical is a leading company in the medical device market, particularly in the treatment of heart diseases, especially cardiac rhythm disorders. To complete my studies and my Master's degree in Health Engineering, specializing in Biomedical Technologies and Health Territories, I completed a 6-month final internship at this company as a Junior Product Manager in Cardiac Electrophysiology.
Cardiac electrophysiology is a complex and rich field that is evolving rapidly. During this internship, I was able to accomplish various tasks such as competitive intelligence, market analysis, congress preparation, regional meeting organization, creation of internal communication materials, product discontinuation, and support for product market launches.
This report highlights the field of cardiac electrophysiology and the role of a product manager within a constantly evolving multinational company, as well as the missions I was able to participate in during my internship. It also covers the personal growth and professional skills gained from this experience.
Marwa MEDJ
A rappeler pour tout usage : Marwa MEDJ, « Ingénieur d'Application : Logiciel d'Imagerie Médicale - Avatar Medical », Université de Technologie de Compiègne (France), Master Ingénierie de la Santé, Mémoire d'Apprentissage, https://travaux.master.utc.fr/, réf n° IDS236, juillet 2024, https://travaux.master.utc.fr/formations-master/ingenierie-de-la-sante/ids236/
Ce mémoire a pour but d’expliquer les missions réalisées en entreprise lors d’une année d’apprentissage entre Avatar Medical et le master Ingénierie de la Santé (IdS) mention Technologies Biomédicales et Territoires de Santé (TBTS) à l’Université Technologique de Compiègne (UTC). L'imagerie médicale donne accès à des visualisations détaillées des structures internes du corps humain, essentielles pour le diagnostic et le traitement. Fondée en 2020, Avatar Medical est une start-up spécialisée dans la transformation des images médicales DICOM issues de scanners et d'IRM en avatars 3D tout en alliant la réalité virtuelle. Cette entreprise se distingue à l'intersection de la technologie et de la médecine, avec des applications principales telles que la planification chirurgicale, l'enseignement anatomique avancé, et l'engagement patient. Ces solutions visent à améliorer la préparation chirurgicale, enrichir la formation médicale et renforcer l'implication des patients. Ce mémoire explore en détail le processus de vente d'Avatar Medical, en mettant l'accent sur l'adaptation aux besoins des prospects et la gestion des risques, de la prospection à la conversion client.
This report aims to explain the tasks carried out during a year of work-study between Avatar Medical and the Master's program in Health Engineering (IdS), specializing in Biomedical Technologies and Health Territories (TBTS) at the University of Technology of Compiègne (UTC). Medical imaging provides detailed visualizations of internal human body structures, essential for diagnosis and treatment. Founded in 2020, Avatar Medical is a startup specializing in transforming DICOM medical images from scanners and MRIs into 3D avatars while integrating virtual reality. The company stands at the intersection of technology and medicine, with main applications including surgical planning, advanced anatomical education, and patient engagement. These solutions aim to improve surgical preparation, enhance medical training, and strengthen patient involvement. This report provides a detailed exploration of Avatar Medical's sales process, focusing on adapting to the needs of prospects and managing risks from initial contact to client conversion.
A rappeler pour tout usage : Naïda IBRAHIM, « Mise en place de la gestion documentaire pour l'obtention de la certification "AFAQ Service Biomédical"», Université de Technologie de Compiègne (France), Master Ingénierie de la Santé, Mémoire de Stage, https://travaux.master.utc.fr/, réf n° IDS232, juillet 2024, https://travaux.master.utc.fr/formations-master/ingenierie-de-la-sante/ids232/
Le service biomédical du Centre Hospitalier Princesse Grace (CHPG) de Monaco, engagé dans la quête de l'excellence, vise à obtenir la nouvelle certification « AFAQ Service Biomédical ». Initiée en 2018 par l'Association Française des Ingénieurs Biomédicaux, l'Association des Agents de Maintenance Biomédicale et l'AFNOR, cette certification garantit des standards élevés de qualité et de sécurité. Pour le service biomédical du CHPG, cette étape représente une première avancée vers l'objectif ultime d'obtenir la certification ISO 9001, qui établit les exigences pour un système de management de la qualité, applicable à toute organisation, quel que soit son secteur d'activité. Cette dernière certification est reconnue pour sa complexité, son coût élevé et la durée nécessaire à son obtention.
Ce mémoire explore la mise en place d’un Système de Management de la Qualité (SMQ), en mettant l'accent sur une gestion documentaire rigoureuse. En structurant et optimisant cette gestion, le mémoire démontre comment formaliser les processus et assurer la conformité aux exigences de la certification « AFAQ Service Biomédical », tout en renforçant la gestion de la maintenance des dispositifs médicaux. Cette initiative soutient non seulement la sécurité des soins et la gestion des risques, mais aussi une amélioration continue des pratiques biomédicales.
Le projet établit les bases pour que le service biomédical continue de contribuer à la qualité des soins délivrés par le CHPG, offrant ainsi un exemple inspirant pour d’autres services biomédicaux cherchant à obtenir des certifications similaires.
The Biomedical Service of the Princess Grace Hospital Center (CHPG) in Monaco, committed to the pursuit of excellence, aims to obtain the new "AFAQ Biomedical Service" certification. Initiated in 2018 by the French Association of Biomedical Engineers, the Association of Biomedical Maintenance Technicians, and AFNOR, this certification ensures high standards of quality and safety. For the biomedical service of CHPG, this step represents a first advancement towards the ultimate goal of obtaining the ISO 9001 certification, which establishes requirements for a quality management system applicable to any organization, regardless of its sector of activity. This certification is known for its complexity, high cost, and the time required to achieve it.
This report explores the implementation of a Quality Management System (QMS), with a focus on rigorous document management. By structuring and optimizing this management, the report demonstrates how to formalize processes and ensure compliance with the "AFAQ Biomedical Service" certification requirements, while enhancing the maintenance management of medical devices. This initiative not only supports the safety of care and risk management but also fosters continuous improvement of biomedical practices.
The project establishes the foundation for the biomedical service to continue contributing to the quality of care delivered by the CHPG, providing an inspiring example for other biomedical services seeking similar certifications.
A rappeler pour tout usage : Yan HUSEIN, « Ingénieur d’applications en échographie Cardiovasculaire et Point of Care - L’échocardiographie et la mini-sonde d’échographie transoesophagienne en cardiologie interventionnelle », Université de Technologie de Compiègne (France), Master Ingénierie de la Santé, Mémoire de Stage, https://travaux.master.utc.fr/, réf n° IDS231, juillet 2024, https://travaux.master.utc.fr/type-de-travaux/ids231
En imagerie médicale, l’échographie est, des points de vue patient et médecin, la modalité la plus simple à mettre en place, la moins onéreuse, la plus rapide, et présentant le moins de risques. Elle s’est rapidement installée en cardiologie, et demeure aujourd’hui indispensable à l’examen des structures et de la fonction cardiaques. Elle s’est aussi implantée en cardiologie interventionnelle, pour le guidage du médecin lors de l’opération percutanée, dans de nombreuses indications. L’échographie s’y est si bien implantée qu’on en a créé une sous-spécialisation de cardiologie : les cardiologues échographistes.
Aujourd’hui, le système de santé français fait face à de nombreux enjeux, qui se sont construits avec le temps : la démographie médicale baisse et sa répartition sur le territoire est inégale, en particulier chez les anesthésistes, la population vieillit et les maladies chroniques augmentent, et les dépenses en santé ne font que croître. De nombreuses mesures sont alors mises en place depuis plusieurs années afin d’améliorer la situation qui évolue constamment, issues des stratégies nationales de santé émises tous les 5 ans. Progressivement, on pallie ces problèmes grâce aux lois mises en place, avec un « virage ambulatoire » comme une des mesures phares.
L’innovation technologique en est en partie responsable. En l’occurrence, GE HealthCare commercialise depuis 2022 la mini-sonde pour échographie transoesophagienne (ETO), la 9VT, qui encourage la cardiologie interventionnelle à basculer de l’hospitalisation conventionnelle des patients vers l’ambulatoire. Ce rapport retrace donc l’implantation de l’échographie en cardiologie interventionnelle et les bénéfices que la miniaturisation de la sonde ETO a apportés à la cardiologie interventionnelle et, plus globalement, au système de santé français, et, enfin, les changements impliqués dans le métier d’ingénieur d’applications en ultrasons.
From a patient and physician standpoint, ultrasound is the simplest, least expensive, fastest, and least risky imaging modality in medical imaging. It quickly became established in cardiology and remains essential for examining cardiac structures and function today. It has also been implemented in interventional cardiology to guide the physician during percutaneous procedures in numerous indications. Ultrasound has become so well established in this field that a subspecialty of cardiology has been created : echocardiologist cardiologists.
Today, the French healthcare system faces numerous challenges that have built up over time : the medical demography is declining and its distribution across the country is uneven, particularly among anesthesiologists, the population is aging and chronic diseases are increasing, and healthcare spending is only growing. Numerous measures have been implemented for several years to improve the constantly evolving situation, resulting from national health strategies issued every 5 years. Gradually, these problems are being addressed thanks to the laws put in place, with "ambulatory surgery" as one of the key measures.
Technological innovation is partly responsible for this. In this case, GE HealthCare has been marketing the mini-transesophageal echocardiography (ETO) probe, the 9VT, since 2022, which is encouraging interventional cardiology to switch from conventional hospitalization of patients to outpatient care. This report therefore traces the implementation of ultrasound in interventional cardiology and the benefits that the miniaturization of the ETO probe has brought to interventional cardiology and, more generally, to the French healthcare system, and finally, the changes involved in the profession of ultrasound application engineer.
Keywords : Application engineer, Echography, Interventional cardiology, Miniaturization of a medical device, Outpatient surgery
Rapport de stage d'ingénieur d'applications ultrasons cardiovasculaire et point of care. L'échocardiographie et la mini-sonde d'ETO en cardiologie interventionnelle.
Avant de commencer ce rapport, je tiens à remercier toutes les personnes qui m’ont accompagné, aidé, conseillé, enseigné durant mon stage. Je remercie tout d’abord mes parents, qui m’ont accompagné tout au long de mon long parcours d’études, et qui m’ont toujours aidé. Merci pour votre patience, ce diplôme, c’est aussi le vôtre. Merci à mes frères et sœurs qui sont toujours là pour moi.
Ces remerciements s’adressent aussi à mes amis, du master et d’avant, d’avoir toujours été là et de m’avoir assisté de toutes les manières, en particulier Alexandre, Ariane, Aashna, Claire, Wassim, Antoine.
Je remercie mon manager Eloge TINHAN, de m’avoir offert cette opportunité d’évoluer au sein de son équipe, de découvrir l’entreprise et de travailler avec d’excellents produits. Merci à celles et ceux qui, dans l’équipe, m’ont tant appris, m’ont accompagné avec bienveillance et ont contribué au bon déroulement de mon stage.
Merci à Zakaria ZAROUI d’avoir toujours répondu à mes appels et mes questions, de m’avoir suivi pendant mon stage et de m’avoir enseigné tant de choses, et à Houda HAFI de m’avoir montré son quotidien, et appris le terrain. Merci à François BIALY et à Pauclair MOMO GUENA, responsables des ventes publiques et privées dans mon secteur, d’avoir aussi été là pour moi pendant mon stage, d’avoir contribué à mon apprentissage sur le terrain et de m’avoir accordé votre confiance. J’espère à l’avenir que vous pourrez compter sur moi autant que nécessaire.
Je tiens enfin à remercier Madame Julie FOLLET, ma suiveuse à l’UTC, de m’avoir accompagné et aidé à encadrer mon stage, ainsi que Madame Isabelle CLAUDE et Monsieur Jean-Matthieu PROT et tous les enseignants du master pour votre formation et vos enseignements.
L’apparition de l’échographie comme technique d’exploration du corps s’est vite tournée vers l’exploration cardiaque, puisqu’à son apparition, et notamment au début des années 50, avant l’angiocardiographie, il n’existait encore aucun moyen d’étudier le fonctionnement des ventricules cardiaques et de leurs valves.
La technique et la technologie évoluent avec le temps et ont conduit aujourd’hui à des machines complexes et complètes, vendues par différents constructeurs. GE HealthCare propose de larges gammes variées d’échographes, à l’ergonomie et aux fonctionnalités variant selon les spécialités de médecine visées. Ces machines s’accompagnent de leurs sondes, qui changent aussi d’aspect et de mode de fonctionnement selon la finalité désirée et le type d’examen réalisé [1].
De plus, les récentes lois et décisions politiques en France conduisent le système de santé national vers une simplification et une réorganisation vers les soins de proximité avec un virage ambulatoire comme mesure phare depuis plusieurs années. Cela pousse les constructeurs de dispositifs médicaux (DM) à proposer des solutions et des produits favorisant les soins ambulatoires, et les médecins à développer de nouvelles pratiques et s’y adapter. Dans ce contexte, on peut se demander comment l’échographie s’est-elle implantée en cardiologie interventionnelle, et comment la miniaturisation d’un DM peut-elle transformer le parcours du patient ?
La sonde pour échographie transoesophagienne (ETO) 6VT est un exemple de DM qui s’adapte à ces nouvelles pratiques, puisque de nombreux médecins la remplacent aujourd’hui par son homologue la 9VT, plus fine, plus légère et plus tolérable par le patient. En tant qu’ingénieur d’applications en échographie Cardiovasculaire et Point of Care, j’ai pu voir de nombreux examens dans différents services, et voir concrètement les apports de l’utilisation de la petite sonde par rapport à sa grande sœur. Pour répondre à cette problématique, je vais détailler dans ce rapport le principe de l’échographie cardiaque et de l’échographie transoesophagienne (ETO) en liant la littérature à mon expérience terrain, tout en me focalisant sur la mini-sonde ETO 9VT de General Electric HealthCare.
General Electric HealthCare (GEHC) est une entreprise indépendante de technologies médicales, spécialisée dans l’imagerie. Elle produit et commercialise principalement de larges gammes de dispositifs médicaux d’imagerie, de produits de contrastes en imagerie médicale et de radiopharmaceutiques. A la suite d’une longue histoire d’évolution, d’acquisitions et d’investissements, l’entreprise GE se développe pour proposer fin 2022 de nombreuses filiales, telles que GE Aerospace, GE Power, GE Finance ou GE Healthcare. Cette dernière est donc fondée en 1994, sous le nom de GE Medical Systems, après de nombreuses acquisitions et beaucoup d’investissements en R&D, principalement autour de l’imagerie médicale, en Amérique du Nord et en Europe.
D’après le Syndicat National de l'Industrie des Technologies Médicales (SNITEM), GEHC fait partie des 3 acteurs majeurs (avec Philips et Siemens Healthineers) qui détiennent les 2/3 du marché de l’imagerie médicale en France, pour un marché qui représente plus d’un milliard d’euros, avec entre 4 et 5% de croissance annuelle [2]. Cette position dominante se renforce avec son leadership sur les DM d’intelligence artificielle (IA), puisque l’entreprise se place en tête de la liste des DM d’IA de la Food and Drugs Administration (FDA) en 2023 pour la deuxième année consécutive (58 DM au total) [3]. GEHC se place donc en leader sur le marché de l’imagerie médicale, qui continue de croître annuellement en France et dans le monde.
Présente dans plus de 160 pays, pour une base installée de plus de 4 milliards de produits et solutions, GEHC permet la prise en charge de plus d’un milliard de patients chaque année. GEHC travaille avec plus de 51 000 collaborateurs dans le monde, dont 1800 ingénieurs d’applications et en R&D, qui se répartissent en quatre divisions : Imagerie, Echographie, Patient Care Solutions (PCS, Monitorage d’anesthésie-réanimation) et Pharmaceutical Diagnostics (PDx).
En janvier 2023, GEHC devient indépendante. Ce spin-off, fruit d’une décision stratégique, lui offre plus de libertés et de souplesse et de nombreux avantages. En effet, quitter ce conglomérat américain qu’est GE permet à GEHC de se concentrer davantage sur les marchés clés et d’accélérer l’innovation. Cette liberté d’action offre à l’entreprise une flexibilité dans sa prise de décision, de manière autonome et plus rapide, un accès plus facile aux capitaux pour les investissements et une culture d’entreprise plus agile.
Ainsi, GEHC propose des produits à tous les stades du parcours patient : prévention, diagnostic, traitement et suivi. Cela comprend les appareils d’imagerie lourde tels que la tomodensitométrie (TDM), l’imagerie par résonnance magnétique (IRM) ou la tomographie par émission de positons (TEP), les différentes gammes d’échographes et l’échographe ultraportable, des moniteurs patients et des ventilateurs de soins intensifs, quelques produits de contrastes en imagerie par rayons X et IRM et, enfin, de nombreuses solutions informatiques de gestion des soins et d’optimisation du parcours patient (différentes solutions notamment pour la gestion et l’optimisation des données patients, l’IA pour l’analyse des images médicales…).
D’après Statista, l’échographie représente avec la radiographie conventionnelle plus de 60 millions d’actes par an en France, constituant la majorité des actes d’imagerie médicale, contre 3,5 millions pour l’ensemble des autres modalités d’imagerie. L’échographie représente alors en France un marché d’environ 300 millions d’euros, et devient un examen indispensable dans de nombreuses spécialités de médecine, incluant la gynécologie-obstétrique, la cardiologie, la radiologie ou l’anesthésie. La croissance de la population, son vieillissement, l’augmentation des maladies chroniques et de la demande en imagerie sont les principaux facteurs responsables de la croissance du marché future. De plus, l’échographie permettant une visualisation rapide et simple, non irradiante et non invasive des patients commence à se répandre à de nouvelles spécialités de médecine, comme les urgences [4]. Le développement de la technologie a permis aujourd’hui de proposer des gammes ultraportables, très simples à manipuler, qui s’adapte à ces spécialités nouvelles et à toutes les utilisations. Enfin, de nouvelles possibilités avec l’imagerie 3D/4D, l’intelligence artificielle et une excellente qualité d’image offrent de nombreux paramètres puissants dans le pronostic de nombreuses maladies, notamment en cardiologie.
La division ultrasons de GEHC se distingue de ses concurrents, puisqu’elle propose plusieurs gammes de produits spécialisés, qui s’adaptent aux besoins des praticiens. Certaines gammes ont été développées chez GE après l’acquisition d’autres petites entreprises. C’est le cas de la gamme Voluson, après l’acquisition de Kretztechnik en 2001 ou de la gamme des Vivid qui fait suite à l’acquisition de Vingmed en 1998. L’acquisition plus récentes de BK Medical a offert à GE de nouvelles technologies de sondes et de solutions logicielles, accentuant leur position de leader sur le marché. Plus globalement, le marché de l’échographie mondiale est caractérisé par quelques grosses acquisitions par les grandes entreprises qui le dominent aujourd’hui, plaçant à sa tête GEHC, suivi par Philips, Fujifilm puis Canon (Annexe 1). La gamme Logiq quant à elle, a été la première à être développée par GEHC, suivie plus récemment par la gamme des Venue, qui a été conçue pour être simple d’utilisation et dédiée aux spécialités de PoC.
La diversité des produits de GEHC lui permet de couvrir un large éventail de segments de marché, avec des solutions dédiées à de nombreuses spécialités médicales. Cette stratégie présente des avantages indéniables, en offrant aux professionnels de santé des outils adaptés à leurs besoins spécifiques, mais ces avantages font aussi les faiblesses de l’entreprise : GEHC ne propose pas actuellement de produit aux fonctionnalités multiples capable de s'adapter à des utilisations variées. Dans le contexte actuel où les déserts médicaux s’intensifient, les médecins se réunissent souvent dans des structures polyvalentes comme les maisons médicales, soutenus par les politiques récentes (Ma Santé 2022), avec des spécialités variées et complémentaires. L’entreprise ne propose alors pas un produit qui se positionne correctement dans ces contextes et qui puisse basculer d’une spécialité médicale à une autre facilement, et on se retrouve en difficulté face aux concurrents qui vendent des produits plus polyvalents.
Dans le contexte de la gamme cardiovasculaire (CVUS), les produits Vivid sont spécifiques de la cardiologie, mais ne sont pas toujours adaptés à la médecine vasculaire. Ainsi, un cardiologue utilisera un Vivid, dont l’ergonomie et les modes et options sont spécifiques à la spécialité, et un angiologue trouvera son compte avec un Logiq, qui montre de meilleures performances pour l’étude des vaisseaux (meilleur Doppler couleur, B-Flow…). Cependant, un Logiq ne sera pas forcément adapté à un service qui comprend des cardiologues et des angiologues ; un Vivid serait idéal, mais la moins bonne performance en vasculaire nous mettrait en difficulté face aux concurrents. De la même manière, en urgences, dans un service où l’échographie a des utilisations très variées, la machine positionnée dans ces services peut changer en fonction des besoins des médecins. Malgré tout, la place de leader mondial des DM d’imagerie ultrasonore est permise grâce aux larges gammes de produits très performants et dédiées à différentes spécialités :
En tant qu’ingénieur d’applications PoC et CVUS, je travaillais principalement avec des Vivid et Venue, et aussi et en moindre mesure des Logiq et les Vscan. Mon activité tournait donc autour de ces systèmes, et principalement des machines complexes que sont les Vivid.
Dans la gamme Vivid, les technologies diffèrent en fonction de l’échographe. C’est l’architecture du formateur de faisceau qui influe sur la qualité d’image et fait la différence dans le positionnement des machines dans la gamme. Les T8 et T9 Matrix utilisent la technologie du TruScan héritier de l’ancien Vivid E9, qui fut longtemps le haut de gamme de l’échocardiographie. Miniaturisé et amélioré, le TruScan est aujourd’hui adapté aux Vivid T. Les Vivid S70 et S70 Dimension et les Vivid IQ quant à eux utilisent le formateur de faisceau cSound, la nouvelle génération de cette technologie. Enfin, les E90 et E95 ont une architecture cSound améliorée, la cSound adapt, offrant l’option Hybrid, améliorant la qualité globale de l’image. Les machines utilisant cSound comme architecture de formateur de faisceau voient également leur connecteur de sonde évoluer : les connecteurs RS deviennent des connecteurs D. Cette nouvelle connectivité offre une meilleure transduction du signal ultrasonore et donc une meilleure image. Ainsi, plus on monte dans la gamme, meilleure est l’image de l’échographe.
Le choix d’une machine dépend ensuite des besoins du médecin et des options et fonctionnalités qui l’intéressent, qui varient en fonction de la machine, mais aussi des sondes compatibles. Aujourd’hui, la sonde cardiaque adulte de référence est la sonde phased-array matricielle M5Sc. La disposition matricielle des cristaux transducteurs des ultrasons offre une meilleure qualité d’image, une plus grande profondeur de pénétration et une meilleure résolution spatiale. Cette sonde n’est pas compatible avec les T8, sur lesquels l’ancienne version est utilisée, la 3Sc. D’autres sondes ne sont pas compatibles sur toutes les machines, telles que la sonde volumique 4Vc qui permet d’obtenir des images multiplans et 4D en échographie transthoracique (ETT), qui n’est compatible qu’à partir du S70, ou les sondes pour ETO 6VT et 10T qui ne sont compatibles qu’à partir du S60, ou enfin la sonde 9VT qui fait l’objet de ce rapport de stage, qui n’est compatible qu’avec le E95.
Enfin, des options logicielles ne sont pas compatibles sur toutes les machines, notamment les modules de strain AFI (Automated Function Imaging) du VD et OG (en plus de l’AFI VG, qui est disponible sur toutes les machines) et les outils de reconnaissance automatique 2D et du spectre Doppler (AI auto-measure 2D/Doppler) indisponible sur le T8, le travail myocardique qui n’est compatible que sur les E90 et 95 et d’autres options d’optimisation de la 4D sur les E90 et 95.
La gamme Vivid convient donc parfaitement aux cardiologues, tant dans l’ergonomie globale de l’appareil et celle du logiciel, avec les mesures adaptées personnalisées et organisées selon l’activité des médecins dans la spécialité, que dans la présence des options uniques et spécifiques à la cardiologie, telles que le calcul de la fraction d’éjection automatique, le module de strain myocardique, ou la visualisation 4D du cœur en ETT ou ETO.
En cardiologie, l’échographie permet d’étudier le cœur tant sur le plan anatomique que fonctionnel. La première chose qu’on voit en plaçant la sonde sur le cœur est une image bidimensionnelle de sa structure, il est donc nécessaire de connaître l’anatomie cardiaque avant d’étudier le cœur par échographie. Le cœur, à la forme d’une pyramide et dont l’apex pointe vers la gauche, se situe dans le thorax, entre les poumons, derrière le sternum. Sa fonction de pompe est permise grâce à ses cellules myocardiques musculaires, permettant ainsi de faire circuler le sang oxygéné vers tous les organes, soit près de 8000 litres de sang par jour. Le cœur se divise en deux parties et 4 cavités : le cœur droit, composé de l’oreillette droite (OD) et du ventricule droit (VD), qui permet la petite circulation, et le cœur gauche, composé de l’oreillette gauche (OG) et du ventricule gauche (VG). Ensuite, différents vaisseaux relient les cavités : les veines caves supérieure (VCS) et inférieure (VCI) s’abouchent dans l’oreillette droite et y apportent le sang non oxygéné, l’artère pulmonaire sort du ventricule droit pour conduire le sang aux poumons, les veines pulmonaires, au nombre de 4, s’abouchent dans l’oreillette gauche et y conduisent le sang oxygéné sortant des poumons, et, enfin, le sang est envoyé dans la circulation générale par le ventricule gauche dans l’aorte (figure 7) [5][6].
Le système cardiovasculaire est une boucle fermée, dont la circulation est à sens unique. Pour garantir cette bonne circulation, des valves dans les cavités du cœur permettent d’éviter tout reflux ou mauvaise circulation du sang dans l’organe : l’oreillette gauche et le ventricule gauche sont séparés de la valve mitrale, l’oreillette droite et le ventricule droit sont séparés de la valve tricuspide, la valve aortique se trouve au départ de l’aorte, et la valve pulmonaire au départ de l’artère pulmonaire [7]. Toutes les valves possèdent 3 feuillets, sauf la valve mitrale, dont la forme fait penser à la mitre de l’évêque, qui en possède 2 (figure 8) [8]. La rétention de ces valves, permettant la coaptation et l’étanchéité, et ainsi au sang de ne circuler que dans un sens prédéfini, est permis par les muscles papillaires des parois ventriculaires, reliés aux valves par les piliers et les cordages. Enfin, le cœur est approvisionné en sang grâce aux artères coronaires qui le parcourent, et qui quittent l’aorte à sa base, au niveau du sinus aortique, au nombre de 2. Il existe également une petite cavité dans l’oreillette gauche, l’auricule, où le sang peut stagner et où peuvent se former des caillots.
La circulation intracardiaque est donc permise et régulée par la contraction régulière et involontaire du cœur, la disposition des valves, et les différences de pression entre les cavités. Elle a lieu en plusieurs étapes successives :
La contraction des cœurs droit et gauche est simultanée [5].
Il existe trois voies d’abord par échographie pour examiner le cœur : l’échographie transthoracique (ETT), l’échographie transoesophagienne (ETO) et l’échographie intracardiaque (ICE pour Intra Cardiac Echo). La première échographie réalisée chez le patient est l’échographie transthoracique. Indolore, non invasive, rapide, l’ETT permet de vérifier le bon fonctionnement du cœur et en examiner les structures. Il existe plusieurs voies d’accès au cœur en ETT, offrant différentes vues du cœur : on le regarde principalement par la voie para-sternale grand axe (dans l’axe longitudinal du cœur) ou petit axe (dans l’axe transversal du cœur), ou apicale (offrant une vue à 5, 4, 3 ou 2 cavités selon l’orientation de la sonde), et plus rarement par voie sous-costale ou sus-sternale (figure 10) [9].
Le patient est en décubitus latéral gauche, le bras gauche derrière la tête et le bras droit le long du corps. Une fois l’anatomie cardiaque en mémoire, on repère facilement les anomalies, telles que les cardiomyopathies hypertrophiques (CMH) ou dilatées (CMD), les épanchements myocardiques ou les cardiopathies congénitales. On observe alors le cœur en 2D et on fait différentes mesures sur le VG ou l’aorte en fonction des besoins. Le mode 2D permet aussi d’observer les valves, repérer les bicuspidies ou quadricuspidies sur les valves habituellement tricuspides, d’observer la calcification et la bonne ouverture/fermeture des valves, identifier les valvulopathies, mais aussi diagnostiquer les malformations cardiaques, telles que le foramen ovale perméable (FOP) avec l’utilisation d’un produit de contraste. En vue apicale, la mesure du Strain du VG, ou du pourcentage de raccourcissement systolique du myocarde entre la systole et la diastole, associé à la fraction d’éjection du VG, offre des valeurs importantes pour le pronostic des CM ou le suivi des patients sous chimiothérapie (figure 11).
D’autres modes s’ajoutent au bidimensionnel et permettent de compléter l’examen, notamment les différents modes Doppler. Le Doppler couleur, entre autres permet de voir la direction du flux sanguin à l’image, et ainsi de détecter les éventuelles fuites au niveau des différentes valves cardiaques, signes d’insuffisance valvulaire. Les Doppler pulsé et continu ajoutent plus d’informations en mesurant les vitesses des flux. S’affichent alors des courbes dont on peut avoir une première impression visuelle, et sur lesquelles on mesure différents paramètres, tels que la pente, la vitesse maximale ou l’intégrale des courbes. Toutes ces données communiquent des informations sur l’état du cœur du patient et l’éventuel pronostic d’une maladie cardiaque [10].
L’ETT permet de voir le cœur sous de nombreux angles et communique des informations très importantes sur l’état du patient. Cependant, elle présente ses limites dans la visualisation plus poussée des structures :
L’ETO offre une visualisation plus fine des structures que l’ETT ne permet pas toujours de voir. C’est une méthode semi-invasive et désagréable, puisqu’on fait passer par l’œsophage du patient une sonde relativement épaisse, pour la faire descendre jusqu’à avoir une image du cœur. L’œsophage étant en contact direct postérieur à l’OG, la sonde est au plus proche du cœur et permet d’avoir une meilleure résolution d’image et une image plus détaillée, pour un plan inversé par rapport à l’ETT. De nombreux constructeurs proposent aujourd’hui des sondes ETO, GE HealthCare en propose principalement 4 : la 6T, la 10T (micro-sonde, pour la pédiatrie), et les nouvelles sondes volumiques 6VT (figure 12) et 9VT.
En exploration fonctionnelle, l’ETO est indiquée pour l’évaluation valvulaire, l’examen des cavités ou la recherche d’un thrombus [11]. En effet, il est courant que des thrombus se forment dans l’auricule gauche, phénomène fréquent en cas de troubles de l’arythmie comme la fibrillation atriale, et plus rarement en cas de sténose mitrale, dont les complications sont graves, pouvant entraîner une embolisation systémique ou l’obstruction de l’orifice mitral [12]. L’examen est relativement rapide et n’a pas besoin de sédation du patient. L’anesthésie générale est requise pour les longues interventions, car le geste est très désagréable, à laquelle on ajoute souvent l’anesthésie locale par xylocaïne au fond de la gorge. Le rôle de l’anesthésiste est alors essentiel en ETO en cardiologie interventionnelle. En chirurgie interventionnelle, l’ETO est alors indiquée pour le guidage en plus des arceaux à rayons X dans des cas de remplacement ou réparation valvulaires, de fermeture de communication inter-atriale ou interventriculaire ou du foramen ovale perméable.
L’ETO est très efficace dans la visualisation des structures cardiaques, mais elle reste contre-indiquée dans quelques cas, notamment si le patient à une tumeur ORL ou s’il a eu une chirurgie ORL ou œsophagienne récente, ou en cas d’irradiation médiastinale. De plus, l’ETO peut engendrer de nombreuses complications, qui restent rares, mais dont le risque n’est pas nul, notamment une perforation de l’œsophage, une hémorragie, une odynophagie ou une lésion dentaire. Ainsi, des précautions avant l’examen doivent être prises : le patient doit être à jeun et coopérant, et un cale-dent lui est donné, permettant aussi d’éviter les morsures potentielles de la sonde [13].
Il existe alors plusieurs vues du cœur, différentes des vues classiques d’ETT, schématisées en figure 8 : une vue aorte-artère pulmonaire (I), une vue 4 cavités à (II), et une vue trans-gastrique à (III). L’angulation de la sonde, grâce aux commandes qui sont disponibles directement sur la sonde ou sur l’échographe, permet ensuite, en fonction du positionnement de la sonde, d’observer différentes structures du cœur. De plus, la possibilité d’avoir une image en 3 ou 4 dimensions ainsi que d’obtenir des images multi-coupes offre au médecin plus de possibilités dans l’observation des structures. En effet, obtenir une image en 4D du cœur permet de naviguer plus facilement au sein du volume, et d’obtenir des coupes qu’il est habituellement impossible à obtenir en 2D [14].
En 1964, Charles Dotter, un radiologue américain, réalise la première dilatation d’une artère périphérique, et la cardiologie interventionnelle nait. Les évolutions technologiques depuis plus de 40 ans ont permis à la cardiologie de développer des techniques de plus en plus sophistiquées, faisant d’elle une spécialité rigoureuse et complexe. Elles ont permis à Andreas Gruentzig, un cardiologue allemand, en 1977, de réaliser la première angioplastie coronaire transluminale, et à Jacques Puel, cardiologue français, 9 ans plus tard, d’implanter le premier stent coronaire chez l’Homme. La cardiologie interventionnelle intègre les actes médicaux de cardiologie pratiqués par voie endovasculaire, par l’introduction d’instruments chirurgicaux à l’intérieur d’un vaisseau sanguin, généralement la veine fémorale, pour atteindre les cavités cardiaques. Ces techniques mini-invasives influent énormément sur le confort des patients puisqu’elles permettent d’éviter les chirurgies à cœur ouvert et les sternotomies dans la majorité des cas, qui entraînent une cicatrisation longue et douloureuse, nécessitant de la rééducation, et elles permettent de prendre en charge de nombreux patients jusque-là inopérables [15].
La révolution se poursuit en 2002, avec la première réalisation d’une implantation percutanée d’une prothèse valve aortique (TAVI) par Alain Cribier, un cardiologue français, et la première implantation d’un pacemaker miniaturisé sans chirurgie en 2013 en France [16]. La miniaturisation des DM en cardiologie devient indispensable et a révolutionné la spécialité, en donnant une place très importante à la cardiologie interventionnelle dans la prise en charge de millions de patients chaque année, pour diverses indications, et améliorer le confort et la qualité de vie de ces patients par la même occasion [17].
La démocratisation du TAVI pour la valve aortique a rapidement permis de développer des DM relativement similaires pour le traitement des valves mitrale et tricuspide, notamment le MitraClip et le TriClip de la société Abbott Vascular. Ces dispositifs permettent le traitement des insuffisances mitrale et tricuspide par voie percutanée, en rapprochant les feuillets entre eux pour en rétablir la coaptation [18]. Les indications à la cardiologie interventionnelle en alternative à la chirurgie s’agrandissent régulièrement et permettent la prise en charge de nombreux patients pour lesquels la chirurgie n’est plus possible, en raison de la sévérité de leur état. Les avantages de la voie percutanée ne sont plus à prouver : confort pour le patient, gain de temps et de ressources en réduisant le besoin d’hospitalisation, rétablissement plus rapide du patient… Des précautions sont tout de même à prendre en compte chez le patient avant de procéder à l’intervention, pour laquelle il existe plusieurs risques à la ponction des artères : hémorragie, perturbation du système cardiaque ou risque d’accident vasculaire cérébral (AVC), entre autres. Le risque d’AVC est d’1% pour toute procédure interventionnelle et reste tout de même inférieur à celui observé à la suite des chirurgies du cœur [19]. La rythmologie interventionnelle continue aussi progresser, avec les ablations des troubles du rythme, et la cardiologie interventionnelle plus globalement s’accompagne du développement de l’imagerie.
Préalablement à l’intervention, l’imagerie médicale est nécessaire pour le diagnostic et l’évaluation de la fonction cardiaque. L’ETT est la technique de première intention, comme technique non invasive, non irradiante et simple à mettre en place, dans le diagnostic des valvulopathies, ou dans l’étude de la fonction cardiaque : l’échographie de stress est l’examen échographique à l’effort du patient ou sous stress pharmacologique (dobutamine par exemple). L’échographie de stress permet alors d’identifier l’étiologie d’une ischémie ou de différents troubles cardiaques. De la même manière, l’imagerie par scintigraphie, la résonnance magnétique nucléaire ou la tomographie par émission de positons (PET) permettent d’évaluer la fonction cardiaque sous stress. La TDM offre également une image très détaillée du réseau coronaire et de l’anatomie cardiaque grâce à des résolutions spatiale et temporelle importantes. Enfin, différentes combinaisons de modalités d’imagerie permettent d’améliorer le diagnostic grâce à des images plus précise en alliant l’anatomie et l’évaluation fonctionnelle, telle que la combinaison TEP et IRM.
Durant l’intervention, la fluoroscopie et l’ETO sont indispensable dans le guidage et le suivi des interventions percutanées des valvulopathies. La fluoroscopie est indiquée dans la réalisation de plusieurs procédures, en particulier l’angioplastie coronarienne : la technique permet de suivre le parcours des artères coronaires, de diagnostiquer les sténoses et de suivre la mise en place du stent. Un cathéter est remonté jusqu’au réseau coronaire, et la production de rayons X par le fluoroscope couplée au produit de contraste injecté par le cathéter permet d’observer les artères sur un écran en temps réel pendant l’intervention. Dans le cas des valvulopathies, les deux techniques d’imagerie couplées permettent une grande précision dans le repérage et le placement des prothèses, précision indispensable pour une intervention réussie [11].
La place de l’échographie transoesophagienne est devenue indispensable en cardiologie interventionnelle. Ses indications sont peu nombreuses, mais les interventions n’auraient pas lieu si elles n’étaient pas accompagnées du guidage par ETO. Principalement, ce sont les traitements des valvulopathies par voie percutanée par réparation ou et les fermetures du foramen ovale perméable (FOP).
Une insuffisance valvulaire, mitrale ou tricuspide par exemple, correspond à un défaut de coaptation des feuillets de la valve et donc à l’absence d’étanchéité. Ainsi, elle ne remplit pas entièrement sa fonction, puisqu’elle n’empêche plus le sang de prendre la mauvaise direction en repassant par la valve. Ces insuffisances peuvent être dues à différentes causes, le plus souvent une pathologie intrinsèque ou une distorsion de la valve par dilatation de l’anneau valvulaire. Le pronostic de la maladie dépend de plusieurs facteurs, notamment de la fonction du VG et de l’étiologie de l’insuffisance valvulaire : elle peut être physiologique, ou discrète et asymptomatique, nécessitant une surveillance sans traitement. En revanche, une insuffisance valvulaire symptomatique (dyspnée, fatigue, asthénie, palpitations… dans le cas de la valve mitrale) évoluera vers l’insuffisance cardiaque et des troubles du rythme, ou une fibrillation auriculaire dans le cas de l’insuffisance tricuspide. La réparation ou le remplacement de la valve devient alors nécessaire [20] [21].
La réparation valvulaire concerne les valves mitrale et tricuspide. Elle est indiquée quand l’annuloplastie et la chirurgie sont irréalisables ou présentent trop de risque. Elle a lieu par voie percutanée en faisant monter un guide et un cathéter au cœur par l’artère fémorale, pour l’injection de produit de contraste de fluoroscopie, ainsi qu’un dispositif, souvent le MitraClip ou le TriClip de la société Abbott, qui permet d’apporter une prothèse valvulaire jusqu’au cœur. Le MitraClip établit une connexion entre les feuillets postérieur et antérieur de la valve mitrale, en retenant ces feuillets entre ses bras et en les pinçant, pour ensuite les rapprocher en se refermant. Le clip est alors placé au niveau de la fuite, entre les feuillets, et les maintient en place, annulant la fuite [22] (figure 14).
Le principe du TriClip est relativement similaire, pour une procédure plus complexe, puisque la valve est formée de 3 feuillets. Le guidage par échocardiographie transoesophagienne est indispensable à la procédure, pour visualiser la valve, repérer les feuillets, suivre le clip, le placer correctement, étudier la fuite, et vérifier le placement correct du clip en fin d’intervention. L’ETO 3D offre alors aux médecins une vue bien plus complète de la valve en question, offrant plus d’information, et l’obtention d’un volume leur permet d’y naviguer à souhait et ainsi observer la valve sous plusieurs angles. D’autres options permettent également de faciliter l’intervention, telle que la possibilité d’obtenir une image multi-coupe, sous plusieurs angles, en temps réel, afin de mieux placer le clip au centre de la fuite [24].
Le TAVI n’est généralement pas concerné par l’ETO, puisque l’observation des feuillets n’est pas nécessaire pendant l’intervention. De plus, d’expérience au bloc de cardiologie interventionnelle, de nombreux médecins affirment que l’échographie gênerait l’intervention, et que la fluoroscopie est suffisante, parfois l’ETT. Cependant, j’ai pu aussi assister à plusieurs interventions de mise en place de TAVI durant lesquelles l’ETO était pratiquée : l’image par échographie permet de s’assurer du bon placement de la valve. Ce type d’intervention ne nécessite donc habituellement pas d’ETO, mais les nouvelles possibilités de l’échographie, ainsi que la miniaturisation des sondes et la facilitation de son application pourraient changer les pratiques.
Le foramen ovale (FO) perméable quant à lui est une communication entre les deux oreillettes, OG et OD. Présent physiologiquement chez le fœtus, le FO se referme par une membrane après la naissance. Il permet normalement au sang d’éviter le passage par le cœur droit qui est inutile au fœtus, après son passage par le placenta. Le FO devient pathologique par sa persistance : il reste perméable chez près d’une personne sur quatre, à cause de l’absence ou la non-complétion de la fermeture du foramen, et se résulte par la possibilité d’un shunt inter-atrial. Le FOP est diagnostiqué par ETT ou ETO, avec utilisation d’un produit de contraste échographique. Une solution de microbulles est injectée par voie intra-veineuse, augmentant l’échogénicité des tissus qu’elle traverse, et permettant alors de mettre en évidence la communication entre les oreillettes. Les complications d’une persistance du FOP peuvent être notamment la migration de caillots, dont les conséquences peuvent être l’AVC ou l’infarctus du myocarde [25]. Lorsque le traitement par anticoagulants n’est pas suffisant, la fermeture interventionnelle peut être envisagée, sous certaines conditions. La procédure percutanée repose sur le placement d’un DM, appelé ombrelle, au niveau du FOP, rétablissant l’étanchéité entre les deux cavités [26].
Enfin, une procédure courante en cardiologie interventionnelle, pour laquelle l’ETO est requise est la Fermeture d’Auricule Gauche (FAG). Chez les patients souffrant de Fibrillation Atriale (FA), cette procédure permet notamment de prévenir les risques d’AVC [26].
Le système de santé français fait face à de nombreux changements démographiques, sociaux et économiques. L’Organisation Mondiale de la Santé le définit comme « l’ensemble des organisations, des institutions, des ressources et des personnes dont l’objectif principal est d’améliorer la santé ». On trouve alors en France parmi les acteurs qui y interviennent les offreurs de soins, les producteurs de biens et services en santé comme l’industrie pharmaceutique, les institutions publiques, les financeurs et les bénéficiaires. Sa direction se décline de manière hiérarchique, avec le ministère chargé de la santé au niveau national, soumis aux lois et objectifs votés par le Parlement, et les Agences Régionales de Santé (ARS). D’autres institutions interviennent aussi dans le conseil de ces dernières et la gestion du système de santé, telles que le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP), ou l’Agence Nationale d’Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP). Enfin, la cour des comptes participe au contrôle de ces institutions par la gestion des finances de ce système de santé [27]. De nombreux facteurs influent sur les différents acteurs du système de santé, dont la direction doit prendre en compte les changements afin de continuer à fonctionner de manière optimale et à répondre aux besoins de l’ensemble de la population.
En 2017, le Premier Ministre Edouard Philippe parlait de « vieillissement de la population donc plus de maladies chroniques ; l’aspiration des nouvelles générations de médecins à rechercher un meilleur équilibre entre vie privée et professionnelle ; et surtout la démographie médicale déclinante ». L’espérance de vie augmente, l’incidence des maladies chroniques augmente, et les dépenses de santé en France suivent difficilement.
En effet, malgré une faible baisse en 2020 durant l’année du COVID, l’espérance de vie à la naissance est croissante depuis plusieurs décennies, passant de 75,4 ans en 1985 à 82,3 ans en 2020 en France [28]. De plus, la prévalence des maladies chroniques passe de 14,6% en 2008 à 17,8% en 2021 [29]. La pyramide des âges change aussi, à cause du vieillissement de la population (d’après l’INSEE, 19,6% de la population avaient plus de 65 ans en 2018, contre 19,2% un an auparavant et 18,8% en 2016 [30]).
Les dépenses en santé augmentent alors en réponse à ces changements, et à la volonté de d’offrir une couverture universelle de qualité optimale. La part de la richesse nationale consacrée à la santé en France est la plus importante des dépenses de la protection sociale, faisant de notre pays l’un des plus dépensiers en santé. Cette part importante et cette augmentation dynamique est sous l’effet de nombreux facteurs, notamment démographiques comme l’augmentation de l’espérance de vie, ou l’amélioration des prestations [31]. Accentuée depuis la crise de COVID, cette part de la richesse nationale, comptabilisée comme Dépense Courante en Santé au sens international (DCSi) correspondait en 2021 à 12,3% du produit Intérieur Brut (PIB), contre 11,2% en 2019, et elle est représentée à 75% par la Consommation de Soins et Biens Médicaux (CSBM). La CSBM regroupe tout ce qui est destiné au traitement direct des malades, c’est-à-dire les soins hospitaliers et ambulatoires, les transports sanitaires, les médicaments et dispositifs médicaux… Les 25% restant de la DCSi correspondent aux dépenses liées aux soins de longue durée des personnes handicapées ou âgées en établissement, aux indemnités journalières versées par l’Assurance Maladie en raison d’un arrêt de travail, aux subventions au système de soin, aux dépenses de recherche médicale et aux formations des professionnels de santé, aux dépenses pour la prévention et aux coûts liés à la gestion du système de santé [32]. La CSBM s’élève à 235,8 Milliards d’euros en 2021, soit 8,9% du PIB, et la DCSi continue d’augmenter chaque année (figure 16). Cette hausse s’explique principalement par le prix des soins hospitaliers et les volumes de ventes de médicaments [33].
Ces dépenses importantes et leur croissance constante participent au déficit dans les comptes publics et à l’intensification de la dette publique en France. En effet, les administrations de Sécurité Sociale représentent 10,6% de la dette publique, soit 300,1 milliards d’euros. Ce déficit dû à la Sécurité Sociale est sujet à débat depuis de nombreuses années, puisque la Sécurité Sociale n’a pas été excédentaire depuis 2001. La mise en place en 1996 de l’Objectif National des Dépenses d’Assurance Maladie (ONDAM), un indicateur de maîtrise des dépenses de santé, voté chaque année par la loi de financement de la Sécurité Sociale a eu pour but de fixer les plafonds d’emprunts des organismes de Sécurité Sociale et propose un plan de gestion des dépenses annuelles en fonction des recettes. Ainsi, depuis 2010, le budget était respecté, jusqu’à la crise sanitaire de 2020 où les dépenses ont largement dépassé le remboursement des prestations [34].
« Nous manquons de médecins » est une phrase qui revient régulièrement au cœur de nos discussions. L’inégalité de répartition du personnel soignant et des ressources médicales, ainsi que la diminution du nombre de paramédicaux amplifient les problèmes d’accès aux soins. Le ministère des solidarités et de la santé affirmait en 2022 que le nombre de médecins baisse fortement, et que l’accès aux soins pour tous et partout sur le territoire est au cœur des préoccupations des Français [35]. Le problème est aussi sujet de nombreux débats, et la loi immigration de 2023 en est la preuve en proposant de diminuer l’accès aux soins pour les étrangers en situation irrégulière [36].
L’évolution du numerus clausus (NC) est en partie responsable : le nombre de nouveaux médecins aujourd’hui ne compense pas les départs en retraite, pour une population française qui ne cesse d’augmenter. Faisant sa seconde apparition en 1971 (la première date de la seconde guerre mondiale, le NC servait alors à limiter le nombre d’étudiants juifs pouvant passer à l’année supérieure d’études), il fait suite au début de la gratuité des études, avec pour but de bien gérer les dépenses dans la formation des étudiants et garder une gestion optimale du système hospitalier, mais aussi de maintenir un prestige de la formation. Le premier quota de places ouverts pour le passage en deuxième année était alors de plus de 8000, très loin de la volonté de l’Ordre des Médecins et du Syndicat Autonome des Enseignants de Médecine (SAEM) qui estimaient « qu’il ne faut pas former plus de 4000 nouveaux médecins par an ». Progressivement et à partir de 1976, après l’émission d’une circulaire du ministère de l’éducation nationale, le numerus clausus diminue jusqu’à atteindre un minimum de 3500 places en 1993 (figure 17), sans analyse précise des besoins médicaux, et surtout sans prise en compte des facteurs démographiques changeant et du vieillissement de la population [37].
C’est cette baisse du nombre d’étudiants admis en deuxième année de médecine à la suite de l’instauration du numerus clausus qui est responsable de la diminution du nombre de médecins aujourd’hui, relativement à la population grandissante. La tendance s’inverse dès 1994 pour faire face au départ en retraite des nombreux médecins précédents, mais il faudra attendre 2030 pour retrouver une densité médicale optimale (figure 18). Cette tendance à s’inverser est une prédiction de la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (DREES) de 2007, qui part de l’hypothèse que la population devrait croître de 10% entre 2006 et 2030 [38].
Au nombre de médecin diminuant s’ajoute la répartition des spécialités inégale lors des Epreuves Classantes Nationales (ECN) : chaque spécialité ne voit pas le même nombre de médecins formés chaque année. De plus, ce nombre de place évolue, et en anesthésie-réanimation en particulier, 500 anesthésistes étaient formés en 1985 contre 90 en 2000. Cela a entraîné une baisse drastique du nombre de médecins spécialistes en anesthésie-réanimation, dû au nombre de sortie de fonction (principalement dues à des départs à la retraite) plus important que le nombre d’entrées [38]. Cependant, en se basant sur des prédictions du nombre de départs et d’entrées chaque année, et sur le nombre d’anesthésistes formés chaque année qui est remonté à 307 en 2015 (grâce à l’augmentation du numerus clausus de la spécialité en 2009), les nombreuses statistiques menées par le Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière (CNG) estime un retour à un solde positif du nombre d’anesthésistes en 2022. Ainsi, les effectifs de praticiens hospitaliers à temps plein en anesthésie réanimation qui sont en baisse constante depuis plusieurs années, devraient atteindre un minimum en 2022 à environ 3600 spécialistes, puis remonter à plus de 4000 en 2030. Cet effectif prévu est toujours insuffisant en termes de densité et de besoins, et cela se fait ressentir dans de nombreux établissements de santé : il est commun de voir des hôpitaux ou établissements de santé manquer d’anesthésistes et dépendre d’eux pour l’optimisation de leur activité, en l’occurrence dans la région qui m’est attribuée, le nord et le grand-est.
En parallèle du nombre d’anesthésiste évoluant, les pratiques médicales de la spécialité ont changé, avec l’augmentation des actes d’anesthésie, et leur intervention en chirurgie, dans les maternités, aux urgences et pour les endoscopies digestives. A cela s’ajoute la réduction du temps médical disponible par la mise en place du repos de sécurité post-garde et l’augmentation des honoraires qui ont induit une réduction du temps de travail [37].
Enfin, la présence de déserts médicaux en France se fait ressentir : plus de 5,4 millions de Français n’ont pas de médecin traitant, et les inégalités territoriales sont importantes. D’après le rapport de la DREES dans le rapport de l’Assemblée nationale début 2022, 11,6% des Français vivraient dans un désert médical. La répartition des médecins de spécialité médecine générale (MG) et des autres spécialités hors MG change : la proportion des spécialistes hors MG augmente aux dépens des spécialistes en MG (figure 19).
Cette répartition ne comble pas les territoires à faible densité de médecins, où les inégalités restent importantes : le déficit de médecins spécialistes hors MG reste important dans de nombreuses régions (figure 20), malgré une meilleure répartition depuis quelques années [39].
Les inégalités d’accès aux soins sont renforcées, les délais de prise en charge peuvent être importants et entraîner l’aggravation de l’état de santé des patients, la qualité des soins baisse et surtout la satisfaction et la confiance de la population et du personnel médical envers leur système de soins diminuent. En effet, d’après le « baromètre d’opinion » publié par la DREES en 2015, « une large part des Français estime qu’il y a eu une hausse des inégalités, de la pauvreté et de l’exclusion », et « plus de 40% pensent que leur situation est plus difficile que celle de leurs parents » [40]. Un rapport de l’Institut Français d’Opinion Publique (IFOP) de 2022 confirme la confiance de la majorité des Français dans leur système de santé, mais que ces mêmes Français soulignent le manque de personnel soignant et les difficultés d’accès aux soins sur l’ensemble du territoire. L’avis de la population et leur peur pour le futur qui s’ajoute à tous les problèmes économiques, démographiques et sociaux auquel fait face le système de santé français conduisent à de nombreuses mesures et lois pour améliorer la situation et prévenir au mieux les problèmes futurs [41].
Ces changements dans la démographie française et dans la démographie médicale, ainsi que l’augmentation de l’endettement et des dépenses de santé sont progressivement pris en compte. De nombreuses mesures sont mises en place par le gouvernement avec le temps afin d’optimiser le système de santé français : depuis 1991, les réformes de santé se multiplient dans le cadre de la Stratégie Nationale de Santé (SNS), émise par le ministère chargé de la santé, fixant des objectifs prioritaires pour cinq ans (Annexe 2). Par ailleurs, les soins en ambulatoire représentent une solution en faveur de la régulation des coûts et d’un meilleur accès aux soins. En ce sens, le « virage ambulatoire » est officialisés dès les textes de 1991, avec pour but d’améliorer la qualité de prise en charge et de confort des patients [42].
Le ministère des Affaires Sociales et de la Santé affirme dans un rapport que « notre système de santé laisse subsister d’importantes inégalités et n’est pas préparé à l’évolution des besoins de la population ». Il met alors en place la réforme de 2016, la loi de modernisation du système de santé français, avec pour but de rassembler les acteurs de la santé autour d’une stratégie partagée, autour de trois axes d’amélioration :
Dans la continuité, la SNS 2018-2022 repose sur la prévention, la lutte contre les inégalités sociales et territoriales d’accès à la santé, la pertinence et la qualité des soins, et le soutien à la recherche. Ces objectifs nationaux sont déclinés à l’échelle régionale au niveau des Agences Régionales de Santé (ARS) en projet régionaux de santé (PRS).
La loi Ma santé 2022, annoncée par le président de la République Emmanuel Macron en septembre 2022, propose des réponses aux différents défis et changements auxquels fait face le système de santé du pays, tant dans les inégalités d’accès aux soins que dans la répartition de la démographie médicale ou dans l’optimisation des dépenses de santé.
Cet « engagement collectif » a pour but une fois de plus de réorganiser les soins entre la médecine de ville et les spécialistes, avec la généralisation des Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS) et des Maisons de Santé Pluriprofessionnelles (MSP), regroupant personnels médicaux et paramédicaux, et offrant une meilleure coordination des soins et une prise en charge globale des patients. Les objectifs ici sont d’offrir une meilleure coordination des soins et une prise en charge plus globale des patients, de mieux répartir l’offre de soins. L’offre hospitalière est repensée pour délocaliser les soins primaires aux établissements de proximité, et, par conséquent, de s’adapter au vieillissement de la population et à l’augmentation des maladies chroniques, et de participer au désengorgement des urgences. L’hôpital n’est alors plus le centre mais une étape de la prise en charge des patients, et leur parcours est fluidifié. De plus, la lutte contre l’inégalité d’accès aux soins primaires est soutenue par l’encouragement du développement de la télémédecine, permettant aux patients éloignés des centres de santé de consulter un médecin plus facilement [43].
La loi Ma Santé 2022 a aussi prévu sa réponse à la baisse du nombre de médecins : les études de santé sont revues de la première à la sixième année d’études. En 2021 a eu lieu la fin du numerus clausus, pour la mise en place d’un numerus apertus (nombre ouvert), qui permettrait d’accepter plus d’étudiants en deuxième année d’études de médecine. Le nombre de places n’est plus fixé par les ministères mais par les universités elles-mêmes. Ainsi, 13 050 étudiants supplémentaires seraient prévus de 2021 à 2025 par rapport à la période de 2016 à 2020. De plus, les lieux de formations seraient étendus aux déserts médicaux, afin de prévenir le surplus d’étudiants en stage d’externat par médecin et par service, et de sensibiliser dès le début des études à l’installation dans ces régions. Enfin, la loi a eu pour projet d’en finir avec la voie royale et sélective d’accès aux spécialités médicales : l’ECN fut remplacé par l’Examen Dématérialisé National (EDN) en 2021. L’EDN est nouveau par la meilleure valorisation et répartition des coefficients des expériences cliniques de l’externe et de son parcours, et un meilleur accompagnement de l’externe dans le choix de ses études d’interne, ainsi que la hiérarchisation des connaissances à maîtriser pour les épreuves théoriques de début de sixième année. Ainsi, le but serait de faciliter la spécialisation des étudiants dès le début de leur parcours, et de mieux répartir les médecins spécialistes sur l’ensemble du territoire [43] [44].
Enfin, la loi apporte son soutien aux projets d’innovation en chirurgie ambulatoire. L’Etat a notamment lancé un appel à projet « accompagner le développement de la chirurgie ambulatoire par des projets d’innovation en chirurgie ambulatoire ».
Dans un contexte où le besoin en anesthésie pour les actes chirurgicaux et interventionnels augmente et où le manque de spécialistes en anesthésie-réanimation est important, le virage ambulatoire se présente comme une solution idéale pour répondre à cette problématique. Il faciliterait l’organisation de ces actes en réduisant le temps des anesthésistes requis pour un patient, les rendant plus disponibles pour d’autres actes, réduirait les durées d’hospitalisation et les coûts d’hospitalisation par la même occasion, et améliorerait le confort du patient grâce à une prise en charge plus rapide et moins contraignantes. Cependant, sa mise en place est complexe, et doit s’accompagner d’une évolution des pratiques.
Le mode de prise en charge ambulatoire correspond à la prise en charge des patients en moins de douze heures, sans nécessité d’hospitalisation. Elle est définie par la Haute Autorité de Santé en 2012 comme « une chirurgie programmée et réalisée dans les conditions techniques nécessitant impérativement la sécurité d’un bloc opératoire, sous une anesthésie de mode variable, suivie d’une surveillance postopératoire permettant, sans risque majoré, la sortie du patient le jour même de son intervention » [45]. En pratique, c’est une intervention chirurgicale qui permet la sortie du patient en moins de douze heures.
Sur l’ensemble de la chirurgie, d’après une enquête menée par l’International Association Ambulatory Surgery (IAAS), le taux de chirurgie ambulatoire en France est de 36% contre plus de 50% dans plusieurs pays du nord de l’Europe [45]. D’après Visuchir, l’outil mis à disposition par l’Assurance Maladie présentant des données sur les pratiques chirurgicales, ce taux atteint 62,8% en 2022, représentant près de 4 millions de séjours, et, mise à part la Guyane (35%), toutes les régions dépassaient les 60%. La marge de progression reste importante puisqu’on estime encore 1,21 million d’actes chirurgicaux potentiellement transférables en ambulatoire, ce qui permettrait d’atteindre un taux de plus de 80%. Ce taux dépend du type d’acte réalisé et de la spécialité médicale concernée. En effet, la chirurgie en ophtalmologie était à plus de 90% en ambulatoire contre 44% en urologie en 2022 [46].
La notion du virage ambulatoire comme objectif des politiques de santé a commencé à émerger lors des débats de la SNS de 2013. Les différentes mesures mises en place depuis ont pour objectif de rattraper le retard de la France par rapport aux autres pays européens sur le taux de chirurgie ambulatoire, mais aussi de répondre aux nombreux défis sociaux et financiers évoqués plus tôt. En ce sens, la loi de 2016 évoque d’une part la réduction des hospitalisations conventionnelles au profit d’hospitalisations de jour, et d’autres part la substitution des soins hospitaliers par des soins médicaux et paramédicaux en ville. Plus tard, la loi ma santé 2022 annonçait l’objectif de porter à 70% le taux de chirurgie ambulatoire en 2022 : comme évoqué précédemment, il n’est pas atteint, mais a grandement progressé depuis plusieurs années, et présente toujours un potentiel d’augmenter [42]. Différentes mesures sont mises en place à cet effet, telles que la mise en place d’un tarif unique, entre les séjours de chirurgie ambulatoire et ceux présentant le degré le plus faible de sévérité en hospitalisation conventionnelle, pour des interventions chirurgicales pour lesquelles étaient observé, selon l’instruction en vigueur du ministère, « un contenu médical similaire entre ces niveaux et une prise en charge réalisable en ambulatoire ». De plus, les seuils de durée de séjour en hospitalisation conventionnelles en deçà desquels les tarifs étaient minorés de 50% ont été supprimés [42]. De leur côté, les sociétés savantes émettent des recommandations afin de guider et rassurer les praticiens sur la qualité et la sécurité des actes ambulatoires et leurs avantages [47].
Ces mesures sont mises en place car il existe des avantages à la chirurgie ambulatoire sur plusieurs plans. Pour le patient, elle réduit l’inconfort grâce à une prise en charge plus rapide (chez soi est toujours plus agréable qu’un lit d’hôpital) et moins contraignante, et réduit le risque d’infection nosocomiales et associées aux soins puisqu’il augmente avec la durée d’hospitalisation. La chirurgie ambulatoire permet également une meilleure organisation des services de chirurgie avec une optimisation des conditions de travail et un gain de temps considérable. Enfin, d’un point de vue financier, et c’est ce qui fait de cette mesure un point phare des différentes SNS qui l’évoquent, la chirurgie ambulatoire mobilise moins de ressources que la chirurgie avec hospitalisation conventionnelle. En effet, les frais d’hébergement et de restauration sont moindres, la quantité de soins et d’examens complémentaires est diminuée, des lits sont libérés pour les patients plus lourds, moins de matériel médical est nécessaire, la planification est plus simple et plus rapide, et les complications et réhospitalisations sont moins courantes [48].
Malgré les avantages indéniables, la chirurgie ambulatoire doit répondre à certains critères et ne peux pas être appliquée dans tous les cas [45]. En particulier, le patient ne doit pas présenter de comorbidités, doit être en bonne condition physique, afin de réduire le risque de complications, et son contexte social doit être stable afin de pouvoir être correctement accompagné après l’intervention. De plus, alors que les avantages cités précédemment pourraient laisser penser que durant une crise épidémique telle que la crise du COVID, la chirurgie ambulatoire serait mise en avant, le constat est paradoxal : 80% des prises en charge en ambulatoires ont été déprogrammées contre 58% des chirurgies avec hospitalisation conventionnelle, chiffres dus à une méconnaissances des apports de la chirurgie ambulatoire [47]. Enfin, tous les actes chirurgicaux ne sont pas réalisables en ambulatoires. Ces quelques limites restent moindres en comparaison des avantages que la chirurgie ambulatoire apporte, et que la SNS met en avant depuis quelques années en France, et les avancées technologiques en termes de DM permettent de faciliter la réalisation de nombreux actes chirurgicaux en ambulatoire.
La cardiologie interventionnelle permet de réaliser des procédures sans passer par une chirurgie à cœur ouvert. Ces procédures n’étaient pas possibles par le passé, mais l’évolution des technologies et techniques permettent de faciliter le parcours patient en rendant l’opération mini-invasive. Alors, quand le contexte et les conditions cliniques le permettent, certaines procédures chirurgicales sont transmises à la cardiologie interventionnelle. Or, alors que la cardiologie interventionnelle représente plus de 5% des séjours chirurgicaux et interventionnels, moins de 10% des 400 000 séjours en cardiologie interventionnelle ont eu lieu sans nuit d’hospitalisation en 2017. La cardiologie interventionnelle représente alors un potentiel important pour atteindre les 70% prévus par le plan Ma Santé 2022, et rattraper le retard sur les objectifs [49].
L’objectif de l’ETO en cardiologie interventionnelle est donc de guider l’intervention, mais aussi de sécuriser la ponction transseptale, c’est-à-dire le passage du cathéter de l’OD à l’OG. Le risque est de perforer les zones péricardiques ou l’aorte, et possiblement entraîner un AVC, une tamponnade voire une mort subite. L’ETO, au-delà de ce guidage, permet de s’intéresser à d’autres paramètres plus précis, comme la mesure de la taille de la déhiscence en cas de fermeture de CIA, ou l’évaluation de la fuite concernée en cas de réparation de valve.
Aujourd’hui, pour ces interventions chez l’adulte, c’est la sonde 6T (2D) ou la 6VT (3D/4D) qui sont utilisées. Les sondes 10T (2D) et 9VT (3D/4D) sont les sondes ETO pédiatriques. On appelle aussi la 10T micro-sonde, et la 9VT la mini-sonde, puisque ces dernières voient leur utilisation chez l’adulte se démocratiser dans les quelques indications de l’ETO en cardiologie interventionnelle. En 2022 commence la commercialisation de la mini-sonde ETO, la 9VT. Cette dernière révolutionne encore l’ETO en cardiologie interventionnelle, puisqu’elle complète les avancées permises par la micro-sonde, en offrant la possibilité d’obtenir des images en plusieurs dimensions.
La pointe de la micro-sonde de 5,2mm, soit presque 2 fois moins que sa grande sœur, offre une bien meilleure tolérance chez le patient. De nombreuses études sont publiées depuis quelques années appuyant les bénéfices de la sonde pour le patient, ajoutés à la qualité d’image et à la simplification de l’intervention. Alors que, très récemment et avant le début de la production des sondes ETO volumiques pour la pédiatrie, c’est la sonde 10T qui présentait son potentiel en cardiologie interventionnelle adulte, elle n’était encore que peu démocratisée, car la qualité d’image n’était pas encore assez bonne, et la possibilité d’obtenir une image volumique n’était pas encore là. Ce sont les deux inconvénients qui se présentaient à la sonde et qui limitaient donc son utilisation chez l’adulte. Malgré ces problèmes, le volume de vente de la 10T continuait de croître et les preuves de son efficacité s’accumulaient. La nouvelle sonde 9VT sortie plus tard répondit à tous ces problèmes : son excellente qualité d’image et la possibilité d’obtenir des volumes à plusieurs dimensions offrent des avantages indéniables à la sonde adulte classique dans de nombreuses indications de l’ETO en cardiologie interventionnelle. Son intérêt a été principalement mesuré pour les FOP et les FAG, et de nombreuses études ont été relayées à ces sujets.
L’ensemble des médecins et des patients que j’ai pu interroger l’affirment : la tolérance de la micro-sonde est excellente. Une étude d’impact réalisée en interne chez GE montre l’efficacité de la sonde sur ce point sur des cohortes de 20 patients par procédure et par type de sonde. Cette meilleure tolérance qui est avérée simplifie déjà l’intervention du point de vue du patient et de l’anesthésiste : les interventions qui auparavant nécessitaient 3 jours d’hospitalisation, une anesthésie générale, beaucoup de brancardage et un passage en service de soins post interventionnels, n’en requiers plus qu’un. En effet, la taille de la sonde classique oblige l’anesthésie générale, les risques dus à cette anesthésie augmentent, de nombreux personnels paramédicaux sont mobilisés, et, surtout, le patient n’est pas conscient de l’intervention qu’il subit. La mini-sonde permet alors de ne pas avoir à recourir à l’anesthésie générale, pour une insertion de sonde d’environ 24 minutes pendant l’intervention [50]. Le déroulement de l’intervention a alors évolué, et les praticiens se voient attribués de nouvelles tâches : le cardiologue échographiste prend le temps d’expliquer la démarche au patient éveillé, le produit anesthésique local est placé dans la bouche, puis un second est vaporisé au fond de sa gorge, le cale-dent est placé et l’échographiste passe la sonde dans la bouche du patient. Le plus dur est alors franchi pour le patient. Les échanges entre les différents praticiens continuent alors pour la bonne réalisation de l’intervention, et le positionnement de la sonde est modifié en temps réel pour obtenir des vues idéale, grâce aux commandes de flexion et rotation de la sonde. L’intervention se finit rapidement, et une ETT est réalisée après avoir retiré la 10T pour vérifier le bon état du péricarde.
L’inconfort de la sonde est donc pallié par l’anesthésie local, l’intervention est réalisée rapidement et efficacement, la collaboration entre les praticiens permet un travail d’équipe efficace, le patient est satisfait, et ressort le jour-même de l’intervention. Enfin, les objectifs de performance sont atteints : la médecine ambulatoire est favorisée, les ressources sont économisées et l’activité évolue. Cette nouvelle procédure pour l’intervention implique que la présence d’un anesthésiste n’est plus nécessaire, ce qui pallie le manque d’anesthésiste évoqué au chapitre II. Néanmoins, un anesthésiste pourra toujours intervenir en cas de bascule vers l’ETO classique si besoin, ou l’intervention peut être facilement reprogrammée. Ce taux de conversion d’anesthésie locale à générale reste minime, d’après l’étude menée par GE. Enfin, des ressources telles que le curare sont économisées, et peuvent être mobilisées pour d’autres interventions. Durant la pandémie de COVID, ces économies ont permis de pallier le manque d’approvisionnement, et de continuer l’activité en cardiologie interventionnelle.
La suppression de l’étape d’anesthésie générale a aussi modifié l’activité des praticiens de manière plus générale : le service de cardiologie interventionnelle augmente son activité et son efficacité, et les anesthésistes se recentrent sur d’autres. Il n’y a plus besoin de visite préanesthésique pour le patient, des lits d’hospitalisations se libèrent et laisse la place pour d’autres patients. Les patients quittent souvent l’hôpital de jour 4 à 6 heures après leur intervention, et peuvent rentrer chez eux. Une infirmière les appelles le lendemain pour un contrôle, et une ETT de contrôle est réalisée 6 mois après l’intervention.
Enfin, d’après mes discussions avec des échographistes, aucune complication imputable à la micro-sonde ou la mini-sonde n’a été répertoriée. La meilleure appréhension de l’intervention par le patient est justifiée, puisqu’elle s’accompagne d’une réduction de tous les risques et toutes les contraintes qu’implique l’anesthésie générale. Pour les patients ayant déjà fait de l’ETO auparavant, voir la mini-sonde est très rassurant.
Les changements dans la pratique et dans la stratégie thérapeutique dus à la miniaturisation de la sonde impliquent des résultats positifs sur les aspects de santé et du parcours patient, mais aussi sur l’aspect financier. En effet, des économies sont effectuées grâce à la réduction de l’utilisation de produits anesthésiants, de la mobilisation du temps disponible du personnel, du taux d’occupation des lits d’hospitalisation et de toutes les dépenses associées (repas, soins…) et des délais d’attente, avec un volume d’activité plus important. Les frais de santé du patient sont fortement diminués, et les coûts globaux sont optimisés également pour l’hôpital et la Sécurité Sociale.
Les DM impliqués dans ces interventions sont aujourd’hui totalement remboursés, comme les MitraClip ou TriClip, ou les Amplatzer PFO Occluder de Abbott Medical. La base de remboursement de l’anesthésie locale s’élève à 96,50 € pour ces interventions. Le reste à charge pour les patients est très faible, et les coûts en termes d’anesthésie sont fortement diminués. Cette optimisation de l’activité hospitalière encourage les établissements à se munir d’une mini-sonde ETO pour favoriser la prise en charge des patients pour FAG et FOP en ambulatoire, et répondre ainsi aux exigences de l’Etat dans le but d’atteindre le taux d’ambulatoire fixé comme objectif. En 2019, on compte en effet 3 150 actes de fermeture de FOP, soit sept fois plus qu’en 2016, et ce nombre est principalement dû à l’augmentation de l’activité grâce à la facilitation de l’acte avec la micro-sonde [51].
Cette bascule vers l’ambulatoire ne repose pas seulement sur la miniaturisation de la sonde : c’est, d’après de nombreux médecins que j’ai pu interroger, la sécurité du patient et son confort qui restent prioritaires. Toutes les procédures de cardiologie structurelle interventionnelle ne peuvent pas encore être prises en charge par l’ambulatoire. Le temps important nécessaire pour certaines interventions ne permet pas de basculer vers l’ambulatoire : même si la sonde est mieux tolérée, la garder trop longtemps dans l’œsophage est désagréable pour le patient et peut laisser des séquelles. De plus, certaines interventions doivent être suivie par une surveillance du patient plus accrue, puisqu’elles peuvent impliquer plusieurs conséquences chez le patient. C’est le cas des fermetures de CIA, où le risque d’embolisation de prothèse est important, et qui nécessitent une surveillance clinique et rythmologique pendant 48. La bascule vers l’ambulatoire est alors difficile dans un tel contexte.
Cependant, l’arrivée très récente de la 9VT permet de faciliter ces interventions avec une meilleure qualité d’image, et la possibilité de naviguer dans des volumes. La sécurité des actes est améliorée grâce à une précision plus accrue, permise par la 4D. c’est une option qui était fortement attendue par de nombreux praticiens : une combinaison de la micro-sonde et de la sonde classique volumique. Cette dernière version de la sonde ETO offre les mêmes possibilités que la 6VT, pour une qualité d’image quasi similaire. La 4D augmente la précision de l’acte et réduit les risques d’erreur, puisque le guidage est facilité et optimal, en temps réel. Enfin, son diamètre à peine plus grand que celui de la sonde classique reste moins désagréable pour le patient et permet les interventions en ambulatoire.
A l’avenir, l’ambulatoire pourrait être proposé également aux interventions plus complexes, telles que les réparations mitrales ou tricuspide. Cela implique le besoin d’augmenter l’efficacité, afin de réduire le temps d’insertion de la sonde dans l’œsophage pour réduire l’inconfort du patient. De plus, de nouvelles indications sont envisagées pour un remboursement de FAG, comment le cardiologue Dr Nicolas AMABILE a exposé dans un webinar au Collège National des Cardiologues des Hôpitaux en 2021 (figure 22).
L’ingénieur d’application est un expert de son produit. Il participe à la gestion de la base installée. Il fait l’intermédiaire entre le praticien, expert clinique, le vendeur, le technicien, et la machine. Il forme les utilisateurs et futurs utilisateurs à l’utilisation de la machine et aux nouvelles techniques qui se développent régulièrement. Il participe au développement du produit en étant chaque jour à ses côtés et en face des médecins, ains qu’en observant et en participant à l’évolution des pratiques. Il est pro-actif et répond aux besoins des médecins en configurant les appareils selon leurs besoins. L’environnement chez GEHC facilite cette implication dans la clinique et la formation des utilisateurs, tant sur le plan pratique de l’échographie que clinique, avec l’organisation régulière des Septimus et de formations ou workshop sur l’ensemble du territoires, accessibles à tous les médecins.
Ce rôle est alors indispensable en imagerie médicale, et il est voué à l’être d’autant plus dans le futur. Des nouvelles pratiques comme celle de cardiologie interventionnelle guidée par les mini-sondes ETO sont permises par la collaboration entre les médecins chercheurs et les entreprises comme GE HealthCare, par l’intermédiaire notamment des ingénieurs d’application. Il reste l’interface entre le monde médical et technologique, et le contact humain du médecin.
Enfin, il joue un rôle important aussi dans la vente des machines, puisqu’il organise et participe aux démonstrations. Le choix du médecin ne se joue pas que dans le logo affiché sur la machine ou ses options, mais aussi dans le service qu’il obtiendra après avoir acquis l’échographe. Avant l’achat, que le médecin passe par un appel d’offre ou non, il est essentiel de lui montrer toutes les fonctionnalités de l’appareil et ce que lui apportera d’acheter telle machine ou une autre. C’est un des rôles essentiels de l’ingénieur d’application qui ne pourra, selon moi, jamais être remplacé. Le contact avec le client est indispensable, puisque l’ingénieur d’application doit convaincre le futur client. Une fois de plus, être client chez GE HealthCare ne se limite pas qu’à la possession d’une machine : il sera accompagné de l’ingénieur d’application pour ses formations, pour la configuration de son appareil, il aura accès à de nombreux worshop et webinars, et un service client toujours disponible.
Bien que de nombreux outils soient développés régulièrement, facilitant certaines missions de l’ingénieur d’applications, l’ingénieur d’application évoluera mais ne disparaîtra pas. Parmi ces outils, il y a l’application à distance qui existe depuis quelques années, qui permet à l’équipe à distance de prendre en main la machine et d’effectuer tous les réglages possibles d’un ingénieur d’applications à distance, réduisant ainsi, quand c’est possible, les besoins de déplacements, et permettant au médecin d’avoir les réglages dont il a besoin au plus vite. Ensuite, le choix des machines pour une démonstration sera bientôt facilité par l’anticipation des besoins du médecin, grâce à un outil en ligne qui permettrait de faire une demande et de personnaliser la machine selon ses envies. Enfin, un outil comme Verisound Fleet permet de gérer toute une flotte de machines au niveau de leur préréglages d’imagerie, et d’analyser l’activité des échographes (les modes utilisés, les types d’examens réalisés…) pour étudier l’évolution des pratiques et s’adapter aux besoins.
L’échocardiographie est indispensable à l’étude de la structure et de la fonction cardiaque. L’ETO s’est rapidement implantée en cardiologie interventionnelle grâce à l’évolution rapide de la technologie et des possibilités qu’elle offre, notamment l’imagerie 3D/4D. Elle permet de guider le cardiologue interventionnel lors des chirurgies percutanées dans plusieurs indications, telles que la fermeture de FOP ou la FAG, ou les réparations de valve.
L’état du système de santé français qui s’est longtemps dégradé connaît progressivement un renouveau grâce aux stratégies nationales de santé depuis quelques années, qui ont imposé des objectifs et entraînés différentes lois et directives pour l’améliorer, en particulier la volonté d’un « virage ambulatoire ». Ainsi, ces objectifs sont relativement atteints, petit à petit, et l’innovation technologique y participe grandement.
La miniaturisation de la sonde ETO participe grandement à ce virage ambulatoire dans une spécialité qui se base encore beaucoup sur les hospitalisations conventionnelles dans la prise en charge de ses patients. Elle améliore la performance des services de cardiologie interventionnelle en réduisant les besoins en ressources matérielles, financières et humaines. Les économies sont considérables sur tous ces points, et le parcours du patient est grandement facilité, avec une prise en charge rapide et aux risques réduits.
La mini-sonde 9VT offre de nouvelles possibilités, depuis sa commercialisation en 2022, grâce à l’imagerie volumique qu’elle propose. Ainsi, les indications pourraient s’élargir à de nouveaux cas cliniques et de nouvelles pathologies à traiter. En clair, le champ des possible reste vaste dans l’innovation en cardiologie interventionnelle et en ETO.
J’ai pu écrire ce rapport grâce à toutes les études et tous les articles que j’ai lu, mais aussi grâce à mon expérience en tant qu’ingénieur d’applications ultrasons cardiovasculaire. J’ai pu découvrir le métier en travaillant avec les meilleures machines du marché, dans un environnement riche, et au contact des médecins tous les jours. J’ai pu apprendre beaucoup, tant sur la technologie que sur la pratique clinique, et enrichir mes propos des témoignages que j’ai pu récolter et des expériences que j’ai vécues. J’ai très apprécié travailler avec mon équipe, dans un tel environnement, et j’ai encore beaucoup à apprendre durant mes deux mois de stages restants, durant lesquels je vais également pouvoir ouvrir les nombreuses portes qui s’ouvriront à moi, dans un domaine très vaste.
A rappeler pour tout usage : Ouissal HAKIK, « Stratégie de marquage CE pour les dispositifs médicaux en Europe selon le Règlement 2017/745 : Zoom sur l'élaboration du Dossier Technique », Université de Technologie de Compiègne (France), Master Ingénierie de la Santé, Parcours Dispositif médical et Affaires Réglementaires, Mémoire d'Apprentissage, https://travaux.master.utc.fr/, réf n° IDS229, juillet 2024, https://travaux.master.utc.fr/formations-master/ingenierie-de-la-sante/ids229/
Le Règlement sur les Dispositifs Médicaux (RDM) de l'UE 2017/745 a apporté d'importants changements dans la procédure de mise sur le marché des dispositifs médicaux en Europe. Ce règlement exige des fabricants qu'ils démontrent non seulement la conformité de leurs produits mais aussi qu'ils disposent d'un système fiable pour la reproduction de ces dispositifs. Ces nouvelles directives constituent un défi majeur, en particulier pour les petites entreprises, nécessitant ainsi l'élaboration d'une stratégie réglementaire robuste pour se conformer aux normes renforcées du RDM et garantir une totale conformité réglementaire.
Ce rapport présente les missions menés pour accompagner la société Suricog, fabricant de dispositifs médicaux, dans son processus d'obtention du marquage CE. Il expose les étapes clés pour développer une stratégie réglementaire ciblée, en mettant particulièrement l'accent sur la préparation des dossiers techniques conformes au règlement européen (UE) 2017/745. De plus, il aborde les activités annexes menées en parallèle, notamment en ce qui concerne la conformité du système de management de la qualité, aidant ainsi Suricog à commercialiser ses produits sur le marché européen.
The EU Medical Device Regulation (MDR) 2017/745 has brought significant changes to the procedure for placing medical devices on the market in Europe. This regulation requires manufacturers not only to demonstrate the conformity of their products, but also to have a reliable system for reproducing these devices. These new directives represent a major challenge, particularly for smaller companies, requiring the development of a robust regulatory strategy to meet the enhanced standards of the MDR and ensure full regulatory compliance.
This report presents the assignments carried out to support Suricog, a medical device manufacturer, in its process of obtaining CE marking. It outlines the key steps involved in developing a targeted regulatory strategy, with particular emphasis on the preparation of technical dossiers compliant with European Regulation (EU) 2017/745. In addition, it discusses the ancillary activities carried out in parallel, notably with regard to quality management system compliance, helping Suricog to market its products on the European market.
A rappeler pour tout usage : Margaux GUILBERT, « Mise en application des exigences relatives à la base de données européenne EUDAMED au sein de l’entreprise SYMATESE DEVICE », Université de Technologie de Compiègne (France), Master Ingénierie de la Santé, Mémoire de Stage, https://travaux.master.utc.fr/, réf n° IDS228, juillet 2024, https://travaux.master.utc.fr/formations-master/ingenierie-de-la-sante/ids228/
Le secteur de la santé connaît des évolutions constantes et d’autant plus avec l’intégration de l’informatique. Ces nouvelles technologies peuvent être utilisés pour améliorer la performance des produits mais également pour en assurer la traçabilité et la sécurité, comme en témoigne la mise en service de EUDAMED. Ce mémoire de stage porte sur la mise en place des exigences relatives à cette base de données européenne au sein d’une entreprise française de dispositifs médicaux.
La mission principale de ce projet consistait à implémenter les exigences d’EUDAMED, incluant l’étude de la documentation, l’enregistrement des données nécessaires sur EUDAMED, et la pérennisation des activités liées à la base de données via l’établissement de procédures pour assurer la continuité et la conformité à long terme.
Ces activités ont permis de mettre en conformité l’entreprise vis-à-vis des exigences relatives à EUDAMED et à l’IUD, d’enregistrer avec succès les dispositifs médicaux sur EUDAMED, et de former le personnel concerné aux nouvelles procédures. Ces résultats permettent une amélioration de la traçabilité et de la sécurité des dispositifs médicaux, tout en assurant la conformité aux régulations européennes.
The healthcare sector is undergoing constant change, and particulary so with the integration of IT into the sector. These new technologies can be used to improve product performance, but also to ensure traceability and safety, as demonstrated by the launch of EUDAMED. This internship report deals with the implementation of the requirements relating to this European database within a French medical device company.
The main task was to implement the EUDAMED requirements, including the study of the documentation, the registration of the necessary data on EUDAMED, and the sustainability of the activities linked to the database by establishing procedures to ensure continuity and compliance in the long term.
The project carried out within the host organization enabled the company to comply with EUDAMED and UDI requirements, to successfully register medical devices on EUDAMED, and to train internal staff in the new procedures. These results have improved the traceability and safety of medical devices, while ensuring compliance with European regulations.
Mise en application des exigences relatives à la base de données européenne EUDAMED au sein de l’entreprise SYMATESE DEVICE
Swann GHEUNG
A rappeler pour tout usage : Swann GHEUNG, « Implantation du dispositif d’ablation par électroporation Farapulse dans les blocs de cardiologie interventionnelle », Université de Technologie de Compiègne (France), Master Ingénierie de la Santé, Mémoire de Stage, https://travaux.master.utc.fr/, réf n° IDS227, juillet 2024, https://travaux.master.utc.fr/formations-master/ingenierie-de-la-sante/ids227/
Boston Scientific est une entreprise américaine qui développe des dispositifs médicaux de pointe notamment dans le domaine de la cardiologie. Aujourd’hui, cee société est leader dans une nouvelle technique d’ablation des cellules du cœur, l’électroporation. Cte énergie permet de traiter certains troubles du rythme cardiaque avec plus de sécurité que la radio fréquence et la cryo-ablation, historiquement utilisées.
Ce rapport retranscrit mes débuts en tant qu’ingénieure d’application en électrophysiologie. C’est principalement au côté de l’équipe d’ingénieurs de la division d’électrophysiologie d’Île-de-France que j’ai évolué durant 6 mois. L’objectif de ce stage fut de me former afin de supporter techniquement et cliniquement les cardiologues durant les procédures d’ablation par électroporation.
Boston Scientific is an American company that develops high-tech medical devices, particularly in cardiology. Currently, Boston Scientific is the leader in a brand-new ablation technic for cardiac cells, electroporation or pulsed field ablation. This energy is used to treat heart rhythm disorders more safely than radiofrequency or cryo-ablation, historically used.
This report transcribes the beginnings as field clinical engineer in electrophysiology. It was within the Île- de-France electrophysiology engineer team, that I mainly worked for 6 months. The internship’s objective was to train myself to support technically and clinically physicians during pulsed field ablation procedures.
La fibrillation atriale (FA) est l’arythmie cardiaque la plus fréquente et est responsable d’un tiers des accidents vasculaires cérébraux (AVC). En France 110 000 à 230 000 nouveaux cas de fibrillation atriale sont observés par an [1]. Traiter ce trouble du rythme cardiaque est donc un enjeu de santé publique. Les traitements existants sont adaptés à chacun, il peut s’agir d’une simple prescription de médicaments (antiarythmique et anticoagulant) à une désactivation permanente des cellules de certaines zones du cœur nécessitant une intervention au bloc opératoire.
Dans le but de traiter de façon sécurisée et permanente les individus atteints d’arythmie cardiaque, la société Boston Scientific participe très largement au développement de nouvelles technologies et propose une gamme de produits entièrement dédiés au traitement des troubles du rythme. Boston Scientific est notamment précurseur dans l’implantation d’une nouvelle technique de désactivation ou ablation des cellules du cœur responsables d’arythmies, l’électroporation. Cette toute nouvelle méthode particulièrement sûre, rapide et efficace par rapport aux autres technologies d’ablation est de plus en plus adoptée par les cardiologues, rythmologues français pour soulager leurs patients.
L’ingénieur d’application travaille alors en collaboration avec les équipes du bloc opératoire afin d’assurer la bonne implantation et utilisation du système innovant qu’est l’ablation par électroporation (Pulsed Field Ablation PFA). C’est donc au sein de la société Boston Scientific que j’ai eu la chance de découvrir le quotidien et les missions d’un ingénieur d’application en électrophysiologie EP, dans le cadre de mon stage de fin d’études de Master Ingénierie de la Santé (Parcours TBTS) à l’Université Technologique de Compiègne (UTC).
Dans ce contexte d’implantation d’une nouvelle technologie, l’ingénieur d’application répond à la problématique déterminante d’assurer l’utilisation pérenne et adéquate de la PFA pour le traitement des troubles du rythme cardiaque.
La société Boston Scientific est fondée 1979 par John Abele et Peter Nicholas, dans le Massachusetts aux États-Unis. Les premiers produits développés par les fondateurs sont des ballons d’angioplastie. Ils ont ensuite étendu leurs activités à plusieurs spécialités médicales en investissant dans la recherche et le développement (R&D) et également en rachetant des start-ups au fil des années. C’est plus d‘un milliard de U.S dollars investis en R&D par an. Aujourd’hui Boston Scientific propose des dispositifs médicaux en urologie, neurologie, chirurgie, médicine vasculaire et évidement en cardiologie.
La société a une offre de produits essentiellement de haute technologie et à risque. En effet, il s’agit majoritairement de dispositifs médicaux en contact avec l’intérieur des patients et d’implants qui peuvent être électroniques. C’est plus de 37 millions de patients traités chaque année avec un dispositif Boston Scientific à travers les 140 pays dans lesquels la société commercialise ses produits. La diversité de produits et la rigueur portée à la qualité des dispositifs médicaux permettent l’immense croissance que Boston Scientific présente cette dernière décennie, voir figure n°1. Boston Scientific s’impose sur le marché du dispositif médical de pointe au même titre que de célèbres concurrents tels qu’Abbott ou Medtronic, avec un chiffre de vente net à plus 14 milliards de dollars en 2023.
Depuis 2012, le CEO est Michael Mahoney, il a à cœur de faire de Boston Scientific une entreprise avec des valeurs fortes. En effet, l’inclusivité, la diversité ainsi qu’une grande vigilance sur l’empreinte carbone offrent un environnement de travail favorable à la bonne croissance de la société et à la qualité des produits Boston Scientific. Cette politique permet d’ailleurs de placer cette société dans le top de nombreux classements tels que dans le top 100 America’s Just Most Companies [2] ainsi que la sixième place du classement Top Companies LinkedIn [3].
La raison d’être de Boston Scientific est « advancing science for life » et cela se traduit par l’investissement et la commercialisation de dispositifs médicaux particulièrement innovants et technologiques dans plusieurs spécialités médicales. Ainsi, six divisions, voir figure n°2, se distinguent autour de spécialités médicales :
Interventions périphériques
Boston Scientific étant historiquement présent sur le marché de la médecine vasculaire, aujourd’hui encore, ils assurent l’accès et le développement de ballon d’angioplastie hightech ou encore l’Angiojet qui permet d’aspirer les thromboses veineuses. S’ajoutent à cela des appareils chirurgicaux utilisés dans le traitement de certain cancer.
Cardiologie interventionnelle et structure cardiaque
Pour diagnostiquer et traiter une variété de maladies cardiovasculaires, cette division offre une large gamme de stents pour les coronaires, des prothèses de valves aortiques et des prothèses de fermeture d’auricule. Encore aujourd’hui, Boston Scientific participe activement à l’innovation pour ces dispositifs médicaux déjà performants dans le but de garantir une sécurité maximale.
Neuromodulation
La neuromodulation est un marché récent, encore peu exploité et à forte croissance avec une augmentation du nombre de patients éligibles. Il s’agit de dispositifs médicaux actifs, intelligents et technologiques qui permettent la gestion de la douleur chronique et des affections neurologiques comme la maladie de Parkinson.
Endoscopie digestive et pulmonaire
Leader sur le marché mondial de technologies pour le diagnostic et le traitement des maladies gastro-intestinales et des affections des voies respiratoires, Boston Scientific propose notamment des bronchoscopes, une large gamme d’endoscopes ainsi que des équipements pour réaliser les biopsies ou encore des prothèses pour le soutien structurel biliaire.
Urologie, Santé pelvienne et Gynécologie
Boston Scientific s’investit également dans la prise en charge des maladies rénales, de la vessie en proposant par exemple des urétroscopes pour le diagnostic et des lasers au CO2 pour les traitements chirurgicaux. S’ajoute à cela des dispositifs pour le traitement de la prostate élargie ou de l’incontinence urinaire.
Rhythm Management (RM)
Enfin, la division RM résulte du rachat en 2006 de l’entreprise Guidant spécialisée dans le traitement des troubles du rythme cardiaque, cette étape est d’ailleurs celle qui a permis l’incroyable croissance de Boston Scientific ces dernières décennies.
RM est divisé en deux sous-divisions : CRM Cardiac Rythm Management et EP Electrophysiologie. CRM propose tous les dispositifs cardiaques implantables actifs tels que les appareils d’enregistrement sous cutané connu sous le nom de holter, les stimulateurs ou pacemakers et les défibrillateurs et notamment le S-ICD qui était jusqu’à ce début d’année 2024 le seul défibrillateur sans sonde endocavitaire.
L’EP offre des solutions pour traiter les arythmies directement dans le cœur lors d’une intervention au bloc opératoire. C’est au sein de cette sous-division que j’ai pu évoluer durant mon stage.
Boston Scientific se coordonne autour de ces six divisions pour un management au plus proche de chacun, réduire le nombre d’intermédiaires et d’interlocuteurs et permettre à chacun d’être entièrement expert de ses produits. Ainsi chaque groupe de produits a sa propre équipe de vente, de marketing et d’ingénieurs d’application.
Boston Scientific compte aujourd’hui plus de 48 000 employés à travers le monde. La société américaine est divisée en continents United-State, APAC (Asia-Pacific), LACA (Latin America and Canada) et EMEA (Europe Middle East Africa). La France appartient au « cluster » Nord d’EMEA avec la Belgique, les pays scandinaves, l’Irlande et le Royaume-Uni, voir figure n°3. Cette répartition en cluster permet de s’adapter au mieux aux différents marchés et cultures.
En tant que stagiaire en EP, je dépends de la division RM. Cette dernière est assez large puisqu’elle regroupe également les forces de ventes, ingénieurs et support en Cardiac Rythm Management CRM. C’est donc au côté de 25 ingénieurs d’application en EP, dont deux alternantes, et 12 vendeurs que j’ai effectué mon stage tout comme 9 autres stagiaires. L’équipe de FCS est supervisée par 5 managers qui sont aussi ingénieurs et présents quotidiennement sur le terrain. Ils gèrent les différentes régions, à savoir Sud, Rhône-Alpes, Sud-Ouest, Île-de-France/Est et Île-de-France/Ouest, cette dernière étant celle sur laquelle j’ai exercé, voir figure n°4. Nous sommes alors deux stagiaires basées en région parisienne, les 8 autres stagiaires sont localisés à Bordeaux, Marseille, Nantes, Montpellier, Toulouse, Angers, Clermont-Ferrand et Lyon.
Le cœur est un muscle d’environ 300 à 400 grammes et de la taille d’un point situé sous le poumon gauche. Le cœur est donc le principal organe vital du corps humain car il joue un véritable rôle de « pompe ». Séparé en deux parties par une cloison appelée septum, le cœur droit assure la circulation pulmonaire, le sang qui va s’oxygéner dans les poumons et le cœur gauche la circulation systémique, celle qui va alimenter les muscles et les autres organes. Ces deux parties sont chacune divisées en deux cavités une oreillette et un ventricule, communiquant par une valve. A droite, l’oreillette communique avec le ventricule droit grâce à la valve tricuspide, à gauche c’est la valve mitrale qui sépare les deux cavités gauches, voir figure n°5. Concrètement, le sang désoxygéné est acheminé vers l’oreillette droite via les veines caves inférieure et supérieure. Il passe dans le ventricule droit qui l’éjecte vers les poumons. Une fois oxygéné, le sang est ramené à l’oreillette gauche via les quatre veines pulmonaires, voir figure n°6. Il passe ensuite dans le ventricule gauche puis l’aorte afin d’être redistribué à tous les organes du corps.
Afin de comprendre au mieux l’ablation des cardiomyocytes dans le cadre du traitement de la fibrillation atriale, il est également important de définir deux structures anatomiques du cœur : la fosse ovale FO et le sinus coronaire CS. La FO est un trou situé au niveau du septum séparant les deux oreillettes, voir figure n°7. Normalement destiné à se boucher lors du développement embryonnaire, il est cependant possible de trouver des patients chez lesquels cette fermeture ne s’est pas réalisée : on appelle ceci un Foramen Ovale Perméable FOP.
Le CS est une « veine » qui collecte le sang veineux du cœur, voir figure n°8, il s’enroule autour de la valve mitrale et son ostium débouche directement dans l’oreillette droite. En électrophysiologie, les médecins insèrent souvent des cathéters de diagnostic dans cette structure car celle-ci est stable et permet de recueillir les signaux du côté gauche du cœur.
Les contractions du cœur sont contrôlées par un système de conduction électrique. Les cellules cardiaques ont des propriétés particulières qui leur permettent de générer une impulsion et de se dépolariser de proche en proche. Le cheminement de ce courant électrique à travers le cœur assure sa contraction. L’impulsion électrique primaire est engendrée automatiquement au niveau du nœud sinoatrial, aussi appelé nœud sinusal SA. Ce véritable « pacemaker » du cœur est situé à la jonction entre l’oreillette droite et la veine cave supérieure et génère un rythme régulier d’environ 80 battements par minute (bpm). L’impulsion produite par le SA emprunte une voie de conduction particulière appelée faisceau de Bachmann pour rejoindre l’oreillette gauche et la contracter. En parallèle, l’impulsion se déplace via les faisceaux inter-nodaux menant au nœud atrioventriculaire NAV. Une fois excité, le nœud AV transmet le courant au faisceau de His, séparé en deux branches droite et gauche descendantes le long des ventricules. Les branches sont connectées à des filaments situés à l’apex du cœur : les fibres de Purkinje. Le parcours de l’influx électrique prend donc fin au niveau de ces filaments reliés aux fibres musculaires cardiaques, assurant ainsi une contraction des ventricules, voir figure n°9. Ce chemin électrique est le système normal de conduction cardiaque. Le rythme généré est appelé sinusal. Tout schéma de conduction différent du sinusal est appelé arythmie. Pour déterminer quel est le mode de conduction cardiaque d’un patient, il est possible d’enregistrer son activité électrique à l’aide d‘un électrocardiogramme (ECG). Les dépolarisations et repolarisations successives des oreillettes et des ventricules s’observent sur un tracé ECG à l’aide des ondes P,QRS et T. Chaque irrégularité au niveau de ces ondes permet de différencier et discriminer les arythmies cardiaques.
La fibrillation atriale (FA) est un trouble du rythme caractérisé par l’activation rapide et désordonnée des oreillettes, rendant ainsi la contraction atriale inefficace et la contraction ventriculaire irrégulière.
Lors d’un épisode de FA certaines cellules des oreillettes, déchargent successivement et de façon irrégulière, des potentiels qui vont ensuite dépolariser le reste des oreillettes. Ces activations aléatoires ont une fréquence entre 350 et 400 bpm ce qui est largement plus rapide que ce qu’orchestre le SA, entre 60 et 100bpm au repos et 200bpm lors d’une activité physique. Ce rythme atrial provoqué par ces activations prend alors le pas sur le SA, cependant le NAV a la capacité de filtrer les dépolarisations des oreillettes et protège les ventricules de se contracter également à 350/400 bpm, voir figure n°10. Ainsi en FA, les ventricules se contractent de façon rapide et totalement irrégulière avec environ 170bpm. Les mécanismes et sources exactes de la FA posent encore beaucoup de questions et reste un réel sujet de débat au sein de la communauté de rythmologue. Cependant, le travail du Professeur Bordelais Haissaguerre, suggère que ces décharges de potentiels rapides et désorganisées à l’origine de la dépolarisation des oreillettes proviennent très souvent des quatre veines pulmonaires de l’oreillette gauche. En effet, ces dernières initieraient la FA par leur capacité à libérer des triggers, influx électriques dans les oreillettes. Ainsi, ablater l’ostium des veines pulmonaires permet l’isolation électrique et l’interruption des dépolarisations inappropriées des atriums dans une majorité des cas.
La FA est une arythmie très courante, elle touche environ 750 000 personnes en France et elle est responsable d’un tiers des AVC. En 2050 c’est près de 2 millions d’individus qui risquent de souffrir de cette pathologie, cette croissance étant liée à l’augmentation de l’obésité et de la sédentarité [1]. Les symptômes s’expriment de façon très singulière chez chaque individu. En effet, une personne atteinte ne peut présenter aucun symptôme, comme ressentir une fatigue, la sensation d’un poisson dans la poitrine, des vertiges, …
De plus, la FA est discriminée selon deux types qui s’expriment selon les patients et l’avancement de la maladie :
Pour le diagnostic les patients soupçonnés de faire de la FA, passent alors un électrocardiogramme ECG ou portent un holter (appareil qui enregistre l’activité cardiaque sans interruption le temps de quelques jours) si l’épisode d’arythmie ne peut être diagnostiqué lors d’une consultation. A l’ECG la FA se caractérise par l’absence d’onde P puisque les contractions atriales son trop rapides pour être visibles, et l’irrégularité des QRS, voir figure n°11.
La FA étant encore un mystère, il n’y a pas vraiment de réel consensus autour de son traitement. Cependant en première intention, les cardiologues ont pour habitude de prescrire des antiarythmiques afin de diminuer les épisodes de FA et des anticoagulants qui permettent de minimer les risques d’AVC.
Lorsque les médicaments ne suffisent plus, il est nécessaire d’ablater les zones où des potentielles cellules qui délivrent les triggers sont présentes, en l’occurrence les veines pulmonaires. Avant l’électroporation qui est la technologie avec laquelle j’ai travaillé, ils existaient deux énergies pour neutraliser les cellules, la radiofréquence et la cryo-ablation, voir figure n°12.
Pour ablater les veines pulmonaires, il est nécessaire d’introduire du matériel dans l’oreillette gauche.
Ainsi, en début de procédure les rythmologues identifient à la main ou à l’échographie, la veine fémorale située au niveau du pli de l’aine. La veine peut alors être ponctionnée et des cathéters peuvent être introduis dedans. Le médecin fait alors monter un guide jusqu’à l’oreillette droite en passant par la veine cave inférieure. Une fois ce guide placé le cardiologue peut introduire une aiguille dans l’oreillette droite depuis le point de ponction au niveau de l’aine. Cette aiguille va permettre de faire la ponction transeptale, c’est-à-dire faire un petit orifice dans le septum séparant les deux atriums, plus précisément au niveau de la FO, et ainsi accéder à l’oreillette gauche.
Ce geste rapide est très bien maitrisé, mais il n’en est pas moins anodin, puisqu’à proximité de cette FO se trouve l’aorte, or perforer cette dernière peut être dramatique. Ainsi, les médecins s’appuient souvent sur les images, fournies en temps réel, de l’échographie trans-œsophagienne ETO ou se placent grâce à des repères anatomiques à la scopie et en utilisant une aiguille munie d’un capteur de pression à son extrémité, voir figure n°13, en effet si la pression augmente drastiquement c’est l’aorte qui est perforée.
La radiofréquence couplée à la cartographie est une méthode historique, remontant au milieu des années 2000’, pour isoler les veines pulmonaires. Elle consiste dans un premier temps à introduire un cathéter dit de « mapping », voir figure n°14, dans l’oreillette gauche après la ponction transeptale. Puis, il faut faire la carte anatomique et de voltage, c’est-à-dire repérer les zones actives électriquement de l’oreillette gauche, voir figure n°14. Pour cela le médecin bouge doucement le cathéter de mapping sur les tissus de l’oreillette gauche, les signaux émis par les cardiomyocytes sont captés par des électrodes et envoyés directement en traitement sur un ordinateur, l’ingénieur d’application en électrophysiologie formé à la cartographie joue alors un rôle fondamental sur la qualité de la carte en travaillant notamment sur l’anatomie et les signaux pris par le cathéter.
Une fois la carte faite, le médecin introduit le cathéter d’ablation dans l’atrium gauche et peut le repérer de façon extrêmement précise (au mm près) en temps réel sur la carte précédemment réalisée grâce à système de détection magnétique et par impédance. Le cathéter d’ablation est connecté à un générateur électrique radiofréquence et peut ainsi sur l’électrode distale envoyer de l’énergie pour chauffer le tissu par convection et ainsi le nécroser, voir figure n°15.
Après l’ablation les cellules ne sont plus en mesure de conduire les triggers, ainsi pour l’isolation des veines pulmonaire la stratégie d’ablation est d’encercler point par point les veines pulmonaires
La radiofréquence et la cartographie sont utilisées pour beaucoup d’autres formes d’arythmies, il est notamment possible de cartographier et d’ablater dans l’oreillette et le ventricule droit. Boston Scientific commercialise le système de cartographie Rhythmia, des cathéters d’ablation et de mapping.
La cryo-ablation est une technique dite « single-shot » pour l’ablation de FA. Après la ponction transeptale, le cardiologue monte sur un guide un cathéter spécifique à la cryo-ablation dans l’oreillette gauche. Grace à la fluoroscopie et au guide le médecin peut trouver chacune des quatre veines pulmonaires. Une fois la veine bien identifiée, le cardiologue peut décider de gonfler un ballon de protoxyde d’azote sous pression situé sur l’extrémité du cathéter de cryo-ablation. L’objectif est de plaquer le ballon à l’ostium de la veine et assurer le contact complet entre le cathéter et le tissu de la veine pour assurer l’isolation électrique, voir figure n°16. Le ballon descend à une température de -50° et ceux durant environ 4 minutes par application. Le tissu gèle et se nécrose, il n’est plus possible pour ces cellules de conduire les triggers, les veines sont donc isolées. Cette technique est donc « single shot » puisqu’en une application par veine, l’isolation est réalisée, contrairement au point par point de la radiofréquence. Boston Scientific propose la technique de cryo-ablation avec le PolarX.
Afin de visualiser les signaux et avoir une idée des activations électriques au sein même des cavités cardiaques le médecin introduit comme les cathéters d’ablation, c’est-à-dire par le point de ponction au niveau de l’aine et en remontant la veine cave inférieure, des sondes de diagnostic. Ces cathéters ont entre 4 et 20 électrodes et permettent d’obtenir des signaux très locaux entre chaque dipôle.
Le CS étant un repère et une partie anatomique très stable et dans laquelle la sonde peut rester sans être maintenue par le médecin, il est très fréquent qu’un cathéter y soit introduit pour une procédure. De plus dans cette position, les signaux les plus amples sont les activations de l’oreillette gauche.
Afin de récolter les signaux dits « endocavitaires », les sondes sont connectées à un amplificateur et ensuite on peut afficher en temps réel l’activité électrique de chaque dipôle sur un logiciel qui s’appelle la baie d’électrophysiologie, voir figure n°17. Pendant une procédure le médecin a les yeux rivés sur ces signaux affichés juste en face de lui sur un grand écran.
Le domaine de l’électrophysiologie dans sa globalité représente un marché mondial qui s’élève à 209 milliards d’euros en 2023 avec une croissance de +18%. Quatre acteurs principaux animent ce marché, Biosense Webster (Johnson & Johnson), Abbott, Medtronic et bien évidement Boston Scientific. Biosense Webster est le premier industriel a proposé la cartographie et la radiofréquence dans les années 2000’, ils ont par la suite été seuls sur le marché pendant plus d’une décennie, ce qui fait qu’encore aujourd’hui ils restent largement leader en système de cartographie et d’ablation par radiofréquence. Puis Medtronic est arrivé avec le premier système d’ablation par la cryo-ablation fin des années 2000.
Ensuite Abbott (anciennement St Jude Medical) et Boston Scientific développent également leur système de cartographie dans les années 2010’. Finalement, Boston Scientific a élargi dans les années 2020’ son catalogue de produits en proposant du single-shot en cryo-ablation et de l’électroporation. L’électroporation est maintenant la grande révolution en EP et provoque une réelle course à l’innovation chez tous les acteurs. Boston Scientific est clairement précurseur dans l’implantation de cette nouvelle énergie.
L’électroporation est une nouvelle énergie, extrêmement prometteuse, d’ablation des cardiomyocytes au regard de techniques comme la radiofréquence et la cryo-ablation. L’implantation de son utilisation en France et dans le monde est en cours, suscite un grand intérêt et une certaine curiosité de la part des rythmologues, infirmiers et même de patients demandant cette énergie pour leur ablation.
C’est donc au sein de l’équipe de vingt-cinq ingénieurs d’application qui développe l’activité d’électroporation en France, que j’ai effectué mon stage de 6 mois.
L’électroporation est une technique qui repose sur la maitrise de la perméabilité de la membrane de cellule du corps. Elle consiste en l’application d’un champ électrique particulièrement intense qui va provoquer la polarisation de la cellule. Des pores au niveau de sa membrane cellulaire vont alors se créés et permettre le contact entre le milieu intra et extra cellulaire.
Historiquement l’électroporation est un principe développé en oncologie dans les années 90’. En effet, le management de la membrane permet en oncologie de faire entrer les thérapies directement au sein des cellules cancéreuses. Ces dernières une fois traitées récupèrent la perméabilité de leur membrane, c’est l’électroporation réversible. Depuis une quinzaine d’années ce principe évolue pour l’ablation des cardiomyocytes en misant sur une électroporation irréversible, c’est-à-dire que la cellule n’est pas capable de refermer les ports créés dans sa membrane, voir figure n°18. Par conséquent, la cellule se vide de son contenu et finit par mourir par apoptose. Le succès de cette technique pour l’ablation des cardiomyocytes repose sur l’étude de la fréquence, de l’amplitude et le type d’onde du champ électrique appliqué aux cellules. En effet, l’étude de l’application d’un champ électrique sur des cellules est primordiale, car cela peut aussi provoquer l’échauffement plus ou moins intense du tissu. C’est alors soit le principe de l’ablation par RF lors d’échauffement, soit de l’électroporation réversible donc inefficace pour la neutralisation des cardiomyocytes, voir figure n°19.
Trois grands paramètres sont à prendre en compte pour l’élaboration d’un champ électrique permettant d’électroporer des cellules. Le premier est le voltage, le second le temps d’application et le troisième la forme d’onde.
Dans le cadre de l’électroporation des cardiomyocytes pour l’isolation des veines pulmonaires, il y a deux autres paramètres primordiaux à prendre en compte : la forme du cathéter qui va faire l’ablation dans l’oreillette gauche et le « workflow » c’est-à-dire le protocole d’application de PFA.
Farapulse est le premier système d’ablation par électroporation single-shot. Il a été développé à partir de 2012, par une strat-up du même nom. Les premiers essais sur l’humain ont été réalisés en 2017 et ont été succédés par de multiples études qui ont permis d’optimiser l’utilisation du dispositif médical et prouver son efficacité. C’est en 2020 que la technologie est rachetée par Boston Scientific, suit alors la commercialisation du Farapulse en France en 2021. Aujourd’hui, on compte une cinquantaine d’équipements sur le territoire français. J’ai donc eu la chance d’effectuer mon stage en travaillant avec ce très récent dispositif médical de pointe.
Le Farapulse est donc un système d’ablation par électroporation conçu et marqué CE pour l’ablation des veines pulmonaires. C’est à travers un cathéter, le Farawave, au design conçu spécialement pour les veines pulmonaires que l’énergie est délivrée sur les tissus. Composé de cinq branches, il peut prendre trois formes caractéristiques : nominal, basket et fleur, ces géométries sont modulables grâce à une glissière réglable par le médecin. Sur chacune des branches se trouve quatre électrodes qui permettent d’émettre l’énergie. Les troisièmes électrodes de chaque branche en partant de la distalité permettent en plus d’ablater, de recueillir les signaux locaux des tissus à proximité et de stimuler. Le Farawave est disponible en deux diamètres de position fleur, 31 et 35 mm, voir figure n°20.
Le Farawave n’est pas rigide et ne pas être courbé par le médecin avec une poignée comme les sondes d’ablation par RF. Pour permettre de modifier la courbure du cathéter et le positionner parfaitement à l’ostium de chaque veine, Boston Scientific commercialise également la gaine déflectable Faradrive. Cette gaine dans laquelle est introduit le Farawave et dont le diamètre externe est de 16F, soit environ 5,3mm, assure maintient et maniabilité, voir figure n°21.
Ces deux équipements sont des consommables, ils sont non stérilisables.
Le Farawave ne peut ablater sans avoir la source d’énergie nécessaire. Ainsi la Farastar est une console mobile branchée à une prise de courant au bloc, voir figure n°22. Elle est dotée de condensateurs permettant de délivrer 2000 volts en 2,5 secondes pour chaque application de PFA. Entre chaque tir les condensateurs doivent se recharger durant une petite dizaine de secondes. Un écran tactile sur la console permet à l’ingénieur d’application d’initier un tir en cliquant sur « confirm » puis « deliver » après avoir confirmé avec le médecin le lancement de l’ablation.
L’énergie délivrée par le cathéter dans le cœur du patient est très intense et a pour risque d’endommager les autres équipements du bloc. En effet, le patient étant porteur d’un ECG durant l’intervention et très probablement d’un cathéter de diagnostic, ces derniers ont pour risque de capter cette forte différence de potentiel électrique et d’endommager l’amplificateur de la baie. Ainsi chaque console est connectée à un Recording System Module RSM, voir figure n°22, auquel elle va indiquer lorsqu’un tir est lancé. Le RSM va alors jouer le rôle d’interrupteur et couper la connexion électrique entre l’ECG, les cathéters de diagnostic et l’amplificateur de la baie.
L’utilisation du Farapulse se fait essentiellement et très majoritairement sous fluoroscopie donc sans repérage dans une carte comme en radiofréquence. Il est donc important d’avoir les bons repères anatomiques et l’habitude des images de radiologie pour pouvoir ablater correctement les quatre veines pulmonaires de l’oreillette gauche.
Une procédure d’ablation par électroporation avec le système Farapulse se déroule de la manière suivante :
1 – Installation et anesthésie
La première étape est l’installation du patient et du matériel. L’infirmière du bloc pose un ECG 12 dérivations au malade et prépare la table stérile. Sur la baie avec l’ECG, il est possible de savoir si le patient est déjà en FA ou en rythme sinusal. L’ingénieur d’application va alors faire et vérifier les branchements de la console, du RSM, de l’ECG et des câbles de signaux endocavitaires. On allume la console avant d’endormir le patient pour s’assurer qu’elle est bien opérationnelle sans message d’erreur. L’infirmier anesthésiste supervisé d’un médecin anesthésiste peut procéder à l’endormissement et intubation du patient si le centre fonctionne avec de l’anesthésie générale ou à une sédation profonde qui ne nécessite pas d’intubation.
2 – Reconstruction 3D du scanner
Afin de connaitre au mieux l’anatomie cardiaque du patient ce dernier passe un scanner injecté quelques jours avant la procédure. L’injection permet de mettre en lumière les cavités du cœur. L’ingénieur d’application a alors pour mission de réaliser la reconstruction 3D de l’oreillette gauche et des veines pulmonaires. Le logiciel de cartographie Rhythmia permet de faire cette reconstruction, voir figure n°23. Plusieurs mesures peuvent être effectuées, comme le calcul du volume de l’oreillette gauche souvent dilatée lorsque le patient fait de la FA persistante et le diamètre des veines pulmonaires pour décider de la taille du cathéter Farawave (31mm ou 35mm de diamètre en fleur) la plus adaptée.
De plus, des anatomies particulières peuvent être rencontrées, voir figure n°24. Grâce au scanner, on peut découvrir une troisième veine à droite, un tronc commun à gauche, une veine sur le toit de l’oreillette ou encore un FOP qui consiste en une connexion entre l’oreillette gauche et droite, ce qui permet de ne pas faire de ponction transeptale.
2 - La ponction fémorale et cathéter de diagnostic
Le médecin habillé en stérile, procède sur le patient endormi ou sédaté, à la ponction de la veine fémorale. Puis, le cardiologue introduit un cathéter de diagnostic généralement quadripolaire dans le CS guidé par la scopie, voir figure n°25. Les signaux obtenus avec cette sonde sont lus sur la baie et permettent de confirmer ou non le rythme supposé à l’ECG en début de procédure, voir figure n°26.
En jaune la transparence du cathéter, entourées en orange : les électrodes
4 - Transeptal et héparine
Cette étape est certainement la plus délicate même si elle est maitrisée. Le transeptal est donc réalisé soit sous ETO ou à la pression et scopie. Une fois l’accès à l’atrium gauche effectué, un guide est introduit dans la veine pulmonaire supérieure gauche.
Le transeptal réalisé, le médecin demande qu’un bolus d’héparine soit fait, cela permet de fluidifier le sang et de limiter l’apparition de thrombus et risque d’AVC.
5 - Préparation et introduction de la Faradrive
Le cardiologue peut alors procéder à la préparation de la gaine Faradrive, en purgeant le dilatateur et l’intérieur de la gaine avec une solution saline. Il peut ensuite introduire le dilatateur dans la gaine et monter le tout sur le guide. Ce dernier étant déjà dans la veine pulmonaire supérieure gauche, c’est généralement sans difficulté que la gaine et le dilateur peuvent aller jusqu’à la cavité de l’atrium gauche.
Le septum traversé par la Faradrive, le dilatateur et le guide peuvent être retirés, et la gaine est branchée par un port d’irrigation à une poche de solution saline héparinée.
6 - Préparation et introduction du Farawave et chargement des condensateurs
La gaine sécurisée dans l’oreillette gauche, le praticien peut préparer le cathéter d’ablation. Pour cela il branche le Farawave au câble de la console Farastar, cette dernière reconnait le cathéter.
Ensuite, il purge la lumière interne du cathéter dans laquelle passera un guide, et le port d’irrigation. La connexion avec une seconde poche d’irrigation de solution saline héparinée et l’introduction du guide dans le Farawave peuvent être effectuées. Avec le guide bien visible à la distalité du cathéter, le cardiologue teste les différentes positions (fleur et basket) du cathéter et peut introduire le Farawave dans la gaine et le monter jusqu’à la cavité gauche. Pendant cette étape, l’ingénieur d’application guide le médecin sur les différentes purges et autres tests à réaliser. Il agit comme une seconde paire d’yeux pour limiter le risque d’introduction de bulles d’air dans la circulation systémique. Aussi, l’ingénieur d’application appuie sur le bouton « Prepare » de la console pour charger les condensateurs et s’assure que le voltage est bien à 2000 Volts.
7 - Ablation veines pulmonaire gauches
Le cathéter est dans la gaine qui est elle-même dans l’atrium gauche. Le médecin peut alors trouver la veine supérieure gauche avec le guide du Farawave.
Il peut déployer, dans la cavité, le cathéter en dehors de la gaine en forme basket et le plaquer à l’ostium de la veine pulmonaire supérieure gauche en le glissant sur le guide et en s’appuyant sur le retour de scopie. On observe le nombre de branche au-dessus et en dessous du guide. Le médecin et le FCS valident la position et les deux tirs de PFA peuvent être envoyés en appuyant sur « Confirm » et « Deliver » sur la console.
Le médecin peut faire une rotation d’environ 30° du cathéter pour avoir une position complémentaire aux deux premiers tirs. Deux nouveaux tirs sont alors lancés, toujours après accord entre praticien et ingénieur d’application.
Une fois les quatre tirs en position basket réalisés le praticien peut passer en configuration fleur, voir figure n°27. Il faut alors être vigilant à ce qu’il y ait bien contact avec le tissu et que les pétales soient bien repartis . Pour cela, le médecin peut jouer avec l’incidence de la scopie pour avoir différentes vues, perspectives, et valider les paramètres de répartition et de contact.
Tout comme les baskets 4 tirs dans 2 positions complémentaires sont nécessaires.
Le « workflow » recommandé par Boston Scientific est donc 4 tirs dans 2 positions complémentaires en baskets et en fleurs par veine.
Ainsi, pour la veine pulmonaire inférieure le médecin doit la trouver avec le guide en s’appuyant sur la scopie et la reconstruction 3D et en gardant le cathéter en forme de fleur. Ensuite, il suit le workflow d’ablation toujours en étant vigilant sur le contact et sur la bonne répartition des branches.
8 - Ablation veines pulmonaires droites
Pour les veines pulmonaires droites, le médecin peut rentrer le Farawave dans la gaine et courber cette dernière pour ne pas perdre le transeptal et ensuite faire une rotation de la gaine en sens horaire. Sinon, il peut laisser le cathéter en fleur et faire la rotation avec la gaine courbée et bien collée à la fleur et faire la rotation également en sens horaire.
Le workflow est le même pour les deux (ou trois en cas de veines d’intermédiaires) veines pulmonaires droites, voir figure n°28, que pour les gauches. Cependant, elles sont souvent plus difficiles à identifier et les positions fleurs et baskets sont plus compliquées à exécutées correctement à cause de contraintes anatomiques comme celle du septum.
8 Bonus - Ablation d’autres zones potentiellement arythmogènes
Le système Farapulse est marqué CE pour l’ablation des veines pulmonaires uniquement, cependant certains médecins l’utilisent pour ablater d’autres zones qui peuvent être responsables de triggers de FA ou d’autres arythmies. Le mur postérieur de l’oreillette gauche est très régulièrement ablaté.
L’isthme mitrale, c’est à dire la zone entre la veine pulmonaire inférieure gauche et la valve mitrale et l’isthme cavo-tricuspide (zone entre la valve tricuspide et la veine cave supérieure) sont parfois ablatés avec le Farapulse dans certains centres.
9 - Vérification des veines et tirs supplémentaires
Une fois les quatre veines ablatées, la vérification de l’isolation des veines peut être faite. Pour cela le rythme du patient doit être sinusal. Si le patient est en FA après les ablations, une cardioversion avec un défibrillateur externe est nécessaire.
Pour conclure sur l’isolation des veines, le médecin va introduire en position basket aplati le Farawave dans une veine, figure n°29. Grâce à la troisième électrode de chaque branche, les signaux locaux sont obtenus sur la baie comme les signaux du cathéter de diagnostic dans le CS.
Le succès est lorsque on ne voit pas de potentiels sur les dipôles du Farawave.
Cependant, il est possible d’avoir des signaux malgré l’ablation. Pour vérifier s’il s’agit de potentiels autres que ceux responsables de la FA ou qu’il s’agit d’une mauvaise ablation, il faut stimuler sur les électrodes du Farawave en envoyant des courants de faible intensité localement. S’il l’on capture, c’est-à-dire que la stimulation dans la veine engendre la contraction de l’oreillette tout entière, les signaux du cathéter de diagnostic dans le CS se synchroniseront avec la stimulation du Farawave, voir figure n°30. Dans ce cas, il est nécessaire de faire des tirs de PFA supplémentaires.
S’il n’y a pas de capture, alors le potentiel visible sur les dipôles sont ceux qu’on appelle du « far field », c’est-dire les signaux d’autres structures.
7 - Fin de procédure
Une fois les veines vérifiées, le médecin peut extraire tout le matériel du patient, à savoir Farawave, Faradrive, guide, cathéter de diagnostic et faire un point au niveau de la veine fémorale. Le patient se réveille ensuite et passera ou non une nuit à l’hôpital.
Une procédure Farapulse est plutôt rapide, il faut compter 30 à 50 min contre près du double pour un résultat équivalent en RF.
Finalement, quelques médecins font une cartographie de voltage de l’atrium gauche avant et après la PFA. Voici un exemple de carte de voltage, figure n°31, et il est intéressant de voir à quel point cette technique est efficace et permet de couvrir d’immense zone en peu de temps.
Vue postérieure et latérale gauche de l’oreillette, en gris la zone qui ne présente plus de potentiels électriques et en violet les zones saines
Aujourd’hui l’électroporation apparait comme une technique d’ablation sécuritaire, limitant le risque d’apparition des pires complications déjà connues en cryo-ablation et RF. L’engouement des rythmologues envers la PFA est justifié par la sélectivité tissulaire de cette technique. En effet, par chance les cardiomyocytes ont un seuil d’électroporation irréversible plus bas que les autres cellules. Ainsi, lorsqu’une ablation est réalisée, les cardiomyocytes sont neutralisés mais les nerfs, les cellules œsophagiennes, la matrice extra-cellulaire et les vaisseaux proches des zones ablatées ne sont pas impactés. De plus avec la PFA, le tissu cellulaire est largement préservé contrairement à l’ablation par RF, voir figure n°32.
Les complications comme la paralysie du nerf phrénique (permet les mouvements diaphragmatiques) connues avec la cryo-ablation, la sténose des veines pulmonaire et la fistule atrio-œsophagienne provoquées par la RF ne sont pas des dangers que l’on peut trouver avec la PFA, voir figure n°34.
Il est important de savoir que la fistule atrio-œsophagienne, qui consiste en une communication entre l’œsophage et l’oreillette gauche, est la pire des complications aboutissant dans la majorité des cas au décès du patient.
La grande force du Farapulse est également liée aux résultats très favorables en termes de sécurité, d’efficacité et de rapidité obtenus dans différentes études.
En effet, l’étude clinique randomisée ADVENT AF, voir figure n°33, a permis au système Farapulse d’obtenir le marquage de FDA (l’équivalent du marquage CE aux États-Unis) et prouve la non-infériorité de l’électroporation vis-à-vis de la RF ou la cryo-ablation. Il montre que le temps moyen de procédure est largement réduit et qu’il n’y a pas de complications majeures liées à la PFA. Cette étude a été réalisée aux États-Unis dans plus de 30 centres sur plus de 350 patients randomisés entre un bras électroporation et un autre qui regroupe RF et cryo.
Le registre Manifest AF regroupe au niveau européen plus de 1300 patients sur 24 centres et confirme les résultats d’ADVENT avec : aucune complication majeure (sténose de veine, paralysie définitive du nerf phrenique, fistule atrio-œsophagienne) sur un groupe de patients plus large.
Durant mon stage, le Centre Hospitalier Universitaire de Grenoble a remarqué une réaction d’hémolyse lorsque le nombre de tirs de PFA est supérieur à 100 (le workflow normal est de 32 tirs). L’hémolyse étant la destruction des globules rouges, ces derniers libèrent des protéines d’hémoglobine en grande quantité. Or, il s’agit d’une protéine de grosse taille qui risque de gravement endommager la fonction rénale. Une étude est en cours pour évaluer les effets d’un protocole d’hydratation à la suite de la procédure. Pouvoir suivre tout au long de mon stage l’évolution des discours autour de cette complication était très enrichissant et a permis d’avoir un sens critique.
Jusqu’à ce début d’année, cela faisait presque 3 ans que Boston Scientific était l’unique constructeur de système d’ablation par électroporation. Aujourd’hui, MedTronic avec le PulseSelect et l’historique Biosense avec VaryPulse s’essayent à l’électroporation single shot combinée à la cartographie, voir figure n°35.
MedTronic a également fait l’acquisition d’Affera qui propose un système de cartographie ave un cathéter de PFA point par point, c’est-à-dire qui crée des lésions de quelques millimètres. Cependant, la quantité disponible de consommables et d’équipement est très limitée. Aujourd’hui on ne compte que 4 systèmes en France.
Abbott ne rentrera sur le marché de l’électroporation qu’en 2025 avec le Volt.
Aujourd’hui, Boston Scientific envisage de pouvoir utiliser le Farawave combiné à la cartographie Rhytmia pour début 2025 et continue le développement de cathéter d’électroporation point par point pour 2026, voir figure n°36.
Afin d’être un bon FCS, Boston Scientific propose une formation mixte ponctuée de journée au bloc en observation avec un autre ingénieur senior et un apprentissage par e-learning. Ainsi dès mon second jour de stage, j’ai pu découvrir le bloc de rythmologie du Centre Hospitalier Universitaire CHU de Tours avec ma mentor. Les trois premières semaines de stage, le rythme fut donc d’environ trois/quatre journées de bloc par semaine et une/deux journées de e-learning. Des modules sur l’anatomie, les différents types d’arythmies, le fonctionnement des technologies, le comportement à adopter en salle sont obligatoires et à valider sur la plateforme d’apprentissage à distance.
La quatrième semaine de stage s’est déroulée sans bloc, au siège de Boston Scientific France à Voisins-le-Bretonneux. Les dix stagiaires en électrophysiologie ont été réunis pour une semaine de formation en présentielle. Ce qui a été vu en e-learning les trois premières semaines, a été revu plus en détail pour une bonne compréhension. L’anatomie cardiaque, les arythmies, la lecture ECG, les produits Boston en électrophysiologie, Farapulse, la RF, la cryo-abaltion, la cartographie ont été travaillés sous forme d’atelier pratique en petits groupes de 3 ou 4. Nous avons eu la chance de disséquer un cœur afin de bien prendre conscience de la structure des cavités, mais aussi voir de la RF sur du tissus animal et se rendre compte de la lésion, voir figure n°37. Une journée entièrement dédiée à Farapulse nous a permis d’affirmer nos connaissances et de nous essayer à la manipulation du Farawave dans un cœur artificiel.
Il a été également extrêmement enrichissant de retrouver les autres stagiaires acteurs dans d’autres régions de la France. En effet, cela nous a permis d’échanger sur nos premières expériences au bloc, sur les pratiques des différents centres et rendre compte des différences entre les régions.
Ainsi, à la suite de cette semaine, Boston Scientific nous encourage à voir d’autres centres. J’ai pu alors voir des procédures Farapulse à Grenoble, Aix-en-Provence et Monaco. Découvrir de nouvelles équipes avec leurs propres fonctionnements, des points de vue différents sur la technologie et des usages insolites du Farapulse, fût très formateur. Cela m’a permis par la suite, de voir le système d’électroporation sous un angle plus global et d’avoir une vision moins cloisonnée des utilisations possibles. Un sens critique plus aigu, mais aussi pouvoir débattre de ces observations avec les équipes Franciliennes.
Afin de vérifier nos compétences sur le terrain, je me suis rendue, avec deux autres stagiaires à une PFA Academy le 20 mars au CHU de Clermont Ferrand. Pendant cette journée, nous avons accompagné un médecin très expérimenté avec la technologie sur 5 procédures. Le praticien étant parfaitement à l’aise avec la technologie, il a pris soin de nous tester sur nos connaissances et potentielles recommandations à faire durant une intervention Farapulse.
J’ai été certifiée début avril 2024, voir figure n°38. Cela permet de faire de procédures Farapulse en autonomie, sans FCS senior. Cette certification consiste en une réunion d’environ deux heures, pendant laquelle deux FCS experts du Farapulse, teste nos connaissances et nos capacités à surmonter les difficultés qui peuvent être rencontrées au bloc. Dès le lendemain, j’étais en procédure en autonomie à la Pitié-Salpêtrière.
Cependant même après la certification, des formations doivent régulièrement être faites pour rester à jour, notamment sur les recommandations, les études cliniques ou la concurrence.
J’ai eu la chance d’observer plusieurs procédures de cartographie Rhythmia avec des ingénieurs d’application formés, et suis actuellement au tout début des e-learning de formation pour la cartographie. Aussi, j’ai eu l’opportunité de m’essayer à cette discipline de cartographie avec ma mentor, cette dernière faisait les cartes que le médecin voyait et je pouvais, avec les mêmes données et en direct, faire également mes propres cartes que seule ma mentor et moi pouvions voir, figure n°39.
Finalement j’ai pu élargir ma culture du traitement du rythme cardiaque en assistant à l’implantation de deux défibrillateurs sans sonde endocavitaire, voir figure n°40, au CHU de Tours. Ce fut une expérience très enrichissante puisque j’ai pu découvrir le métier, les missions et les enjeux des FCS en CRM.
Tout ce parcours de formation est évidement encadré par notre manager, et également par un mentor. Chaque nouvel entrant ingénieur d’application se voit attribuer un FSC senior. Le mentor a un unique stagiaire à aider et encadrer durant la formation, ce qui permet un accompagnement vraiment personnalisé. Ce rôle a beaucoup d’importance, puisque le mentor est le premier lien qu’on a avec l’entreprise, il est présent pour répondre aux questions techniques ou administratives, et surtout il a une vraie fonction de transmission du savoir et de passion.
Au bloc opératoire le FCS assure un rôle de support technique et clinique.
Les premières procédures en autonomie sont réalisées avec des médecins déjà à l’aise avec la technologie et la manipulation du cathéter. L’ingénieur est alors présent pour installer et brancher le matériel en fonction de la configuration du bloc et des cathéters utilisés.
Il réalise ensuite la reconstruction 3D du scanner du patient, établit l’anatomie de l’oreillette (tronc commun, veine supplémentaire, FOP, volume), et mesure le diamètre des veines pour ensuite discuter avec le rythmologue de la taille de cathéter la plus adaptée au patient.
Lors de la préparation de la FaraDrive et du Farawave, le FCS observe chaque geste de purge et s’assure qu’aucune étape n’est omise.
Durant la procédure le FCS s’assure que le workflow est correctement suivi, c’est-à-dire que les 4 tirs par veine dans deux positions différentes en fleur et en basket sont bien réalisés sans oubli. Il peut être décidé de faire des tirs complémentaires, mais ils seront toujours en supplément des 32 tirs recommandés.
Lorsque le médecin est prêt pour le tir de PFA, il fait signe et l’ingénieur peut envoyer les tirs en appuyant sur « confirm » puis « deliver ».
En cas de bruit ou de plat sur les signaux ECG ou endocavitaire, le FCS doit immédiatement réagir et a pour mission de trouver la cause. Le nombre de câbles et d’électronique fait que cette situation arrive régulièrement. Heureusement nous avons été formés à suivre une stratégie de détection des causes et à rétablir rapidement une bonne qualité de signaux. De plus, il arrive que la console indique des erreurs avant ou pendant un tir de PFA. Le plus fréquemment les erreurs sont liées à la trop grande proximité entre les branches du cathéter d’ablation. La console détecte que certaines électrodes sont trop proches et annule le tir, le médecin peut alors essayer de bouger le Farawave et libérer la contrainte sur les branches du cathéter pour que ce dernier prenne une forme fleur ou basket avec une bonne répartition. Le FCS est là pour donner des astuces pour avoir la meilleure position et limiter l’apparition d’erreur.
De plus, les branches du cathéter étant souples il est possible que l’une d’elle s’« inverse », c’est ce qu’on appelle le cobra. Cette situation est rare mais nous avons des conseils pour guider le médecin à libérer le pétale, voir figure n°41.
Enfin à la fin des procédures, le FCS échange sur déroulement de la procédure, des nouvelles recommandations avec le médecin avant de ranger et nettoyer les câbles et la console.
En avançant dans les procédures en autonomie, j’ai travaillé avec des médecins moins à l’aise avec la technologie.
En plus de faire ce qui a été évoqué précédemment s’ajoute un rôle « d’expert » de l’utilisation du Farapulse. Le but est de guider au mieux le médecin débutant en Farapulse pour que les bonnes pratiques et les réflexes nécessaires soient adoptés. Le travail commence dès la préparation en rappelant les étapes clés des purges et aspirations de la gaine et du cathéter d’ablation. Puis lorsque le cathéter est dans la gaine, elle-même dans la cavité de l’atrium gauche le coaching peut commencer. Le FCS guide alors sur la cathérisation des veines, rappelle que le déploiement du cathéter doit se faire au milieu de la cavité, sans contrainte de la gaine, s’assure que les électrodes soient bien en contact avec le tissu cardiaque et que le cathéter a vraiment une position idéale. L’ingénieur d’application invite le médecin à s’habituer aux signaux obtenus avec le Farawave dont l’interprétation n’est pas toujours évidente à cause du far Field.
Lorsque les équipes et les praticiens sont à l’aise et le souhaitent, l’autonomie est possible avec le Farapulse. Une assistance à distance « RythmCare » est également proposée, il s’agit d’un numéro de téléphone qui redirige vers une FCS sénior qui travaille depuis chez elle et guide les équipes à la résolution de problèmes.
Il me semble intéressant de communiquer quelques statistiques clés de ce stage. En effet, c’est plus de 150 procédures d’ablation toutes techniques confondues, auxquelles j’ai pu participer, voir figure n°42.
Motivée par mon tuteur et ma mentor, j’ai eu la chance de pouvoir découvrir un très grand nombre de centres, notamment en dehors de la région d’Ile de France. Au total, c’est 18 hôpitaux et cliniques différentes que j’ai pu découvrir, voir figure n°43. Les déplacements étant propres au métier, ils m’ont conduite à parcourir plus 18 000 km en cinq mois de stage.
Avoir ainsi circulé durant mon stage m’a également donné la chance de rencontrer plus de 50 médecins, une vingtaine d’équipes de paramédicaux et ainsi autant de techniques, discours et avis différents. Être confrontée à cette diversité fut extrêmement formateur et m’a permis de développer mon sens critique.
Cette première expérience professionnelle fut un tremplin pour le développement de compétences professionnelles et personnelles. En effet, une solide base de connaissance en rythmologie a été édifiée au cours de ces six derniers mois. La formation en e-learning complétée par l’apprentissage sur le terrain avec les FCS, médecins et paramédicaux a été passionnante et c’est avec enthousiasme que je souhaite élargir d’avantage mon champs de connaissance en électrophysiologie.
La confiance qui m’a été donnée par les FCS seniors et les superviseurs m’a permis de développer mon assurance et de faire d’immenses progrès sur ma nature timide. J’ai été obligée de sortir de ma zone de confort et cela pour le meilleur. En effet, aller en autonomie (sans senior) dans un bloc encore inconnu me semblait impensable.
La Clinique de l’Europe à Amiens aura été ma première expérience en autonomie dans un centre dans lequel je n’étais jamais allée. Aujourd’hui, je continue à développer davantage mes compétences relationnelles ainsi que ma confiance en moi, et c’est avec fierté que je vois semaines après semaines les progrès réalisés et les difficultés surmontées.
De plus, il a été très gratifiant de voir que mon travail et ma présence est utile et je trouve satisfaisant de voir au fil des procédures certains cardiologues adopter les bonnes pratiques et gestes que vous lui avez précédemment suggérés.
Durant ce stage j’ai été confrontée à quelques moments délicats.
La plus grande difficulté a été lorsque j’ai été certifiée et que j’ai fait mes premières procédures en autonomie. Il a été difficile de me sentir légitime et d’affirmer des points de vue sur l’utilisation du Farapulse à des médecins qui ont fait plus de 10 années d’études et qui ont deux, voire trois fois mon âge.
Créer du lien avec le personnel médical et paramédical n’a pas été simple, sachant que l’on est en cous de formation et que l’on change quotidiennement de centres. Pendant mes premières semaines de procédures en autonomie, j’ai été deux à trois fois par semaine dans le même centre. Cela m’a rassurée sur le fait que je pouvais créer de bonnes relations de travail et de confiance avec les équipes de ce centre. Aujourd’hui, je travaille quotidiennement à créer un lien solide avec les différents acteurs des blocs que je fréquente.
Enfin, la balance vie professionnelle et vie personnelle n’a pas toujours été simple à équilibrer. Pourtant, la fluctuation du temps de travail et des sites géographiques font aussi le grand charme de ce métier. En effet, ne pas avoir de routine fait que chaque jour est une surprise. Aucune journée ne se ressemble et surtout cela me montre que pour le moment je ne me vois absolument pas effectuer un travail de bureau.
L’électrophysiologie est un domaine passionnant et innovant qui est en pleine mutation avec la technique de la PFA et j’ai eu beaucoup de chance de pouvoir participer son expansion sur le territoire français au cours de ces six derniers mois. Je souhaite poursuivre dans le domaine de l’électrophysiologie et surtout continuer à développer mes compétences et élargir mon champ de connaissance.
Ce stage marque de la meilleure des façons, la fin de cinq ans d’études supérieures. Je suis fière de l’évolution personnelle que m’a permis cette expérience. J’ai été obligée de sortir progressivement de ma zone de confort en rencontrant quotidiennement des personnes passionnées et passionnantes.
Aujourd’hui, c’est un socle de connaissances solides en électrophysiologie que j’ai construit, et c’est avec envie et curiosité que je souhaite poursuivre dans ce domaine innovant.
Pour conclure, c’est avec enthousiasme que je vais poursuivre la construction du parcours professionnel que j’ambitionne.